Passer au contenu principal
21 juil. 21

Lévi, volontaire en service civique à Metz dans le cadre de la Saison Africa2020

Lévi, 22 ans, vient du Cameroun et réalise une mission de service civique à Metz, dans le cadre de la Saison Africa2020. Elle nous partage son expérience.

Témoignage vidéo

Présentation

Peux-tu te présenter et présenter ton parcours ?

Mon nom est Simona Lévi Betsogo Etongo. Je suis une étudiante de 22 ans, née en mars 1999 à Akak 1, une localité située non loin de Yaoundé, la capitale du Cameroun.

Titulaire d’un baccalauréat d’enseignement général obtenu en 2016, ce n’est qu’à l’Université que je m’intéresse réellement aux arts visuels après avoir grandi dans cet univers. Je décide alors de suivre des études dans le domaine et trois ans plus tard, j’obtiens une licence en arts plastiques et histoire de l’art à l’Université de Yaoundé 1, où je suis actuellement inscrite en Master 2 en histoire de l’art option patrimoine et muséologie.

J’ai participé à plusieurs projets culturels jusqu’ici. J’ai également assuré le commissariat de plusieurs expositions comme celle intitulée Pouvoir de l’artiste Keutchogue Gael, lauréat du prix découverte Goethe-Institut volet Arts plastiques en 2018, qui fut l’une de mes premières expériences professionnelles.

Je ne compte en aucun cas m’arrêter là car je désire faire carrière dans ce domaine.

Ta mission

Peux-tu présenter ta structure d’envoi ?

Doual’art est un espace de rencontre entre les artistes et les publics autour de l’art et de la notion de l’Urbain. C’est un centre d’art contemporain créé sous forme d’association à but non lucratif en 1991 par la Princesse Marilyn Douala Manga Bell et l’historien Didier Schaud. Doual’art œuvre au développement et à la mise en valeur de la ville et mène des actions d’aménagement urbain. Cette structure soutient également la production artistique contemporaine à travers les ateliers, résidences, séminaires et expositions qu’elle organise.

Doual’art est une plaque tournante de l’art contemporain dont le travail fait écho bien au-delà des frontières camerounaises.  J’ai participé à plusieurs évènements dans lesquels était impliqué Doual’art, mais c’est au cours de l’année 2020 que je suis réellement entrée en contact avec ce centre d’art, par le biais d’un de ses médiateurs avec lequel j’avais déjà  travaillé quelques années avant.

Peux-tu nous parler de ta structure d’accueil ?

L’Espace Bernard-Marie Koltès tire son nom d’un grand auteur dramatique français, né à Metz en 1948 et décédé à Paris en 1999.

Porteur des valeurs d’éducation citoyenne et acteur de l’émancipation individuelle et collective à  travers la culture, l’Espace Bernard-Marie Koltès – Théâtre du Saulcy est un carrefour citoyen situé au cœur de l’université de Lorraine à Metz. Il a pour vocation la rencontre entre les publics et les artistes autour des écritures contemporaines et donne à découvrir des formes artistiques différentes en plaçant le texte au cœur d’une programmation engagée.

C’est aussi un lieu de diffusion qui accompagne la vie artistique et culturelle locale, régionale et même nationale à travers une programmation à la fois professionnelle et amateure, renforcée par de multiples partenariats avec les acteurs culturels de la région (Grand-Est).

La programmation est axée sur trois thématiques principales réparties en sous-thématiques : corps, société, étranger ; traitées dans les différents spectacles et événements accessibles à tout type de public.

Quel est projet de ta structure d’accueil dans le cadre de la Saison Africa2020 ?

Dans le cadre de la Saison Africa2020, l’Espace Bernard-Marie Koltès travaille avec l’équipe de Passages Transfestival (Metz) et du Ishoyo Arts Centre de Kigali (Rwanda) autour de l’évènement “Kuya Kwetu” qui signifie “Bienvenue chez nous”en Swahili.

Il s’agit d’une semaine intense (rencontres, spectacles, concerts, résidences, installations et projections) ouverte au public et qui mêle théâtre, musique et arts visuels. Il est question d’aller à la découverte d’artistes et de créateurs venus du Rwanda, Burundi, Nigeria, Afrique du Sud, République Démocratique du Congo, Togo, Congo-Brazzaville, Sénégal, Cameroun, Burkina Faso, Kenya et Mali.

Le covid impacte-t-il la programmation et les projets généraux de ta structure d’accueil ?

L’Espace Bernard-Marie Koltès étant un théâtre, il a dû fermer temporairement ses portes au public comme c’est le cas pour bon nombre de structures culturelles en France en ce temps de crise sanitaire.

Néanmoins, le théâtre reçoit chaque semaine des étudiants accompagnés de leurs enseignants pour des cours et il accueille parfois des sessions (spectacles joués et captés) uniquement réservées aux professionnels.

Il a également monté un concours d’écriture en collaboration avec l’association Quai-Est, dans le but de mettre en lumière et d’accompagner la jeune écriture dramatique. Il s’agit du « Prix Bernard-Marie Koltès : prolonger le geste », qui est ouvert aux jeunes auteurs et autrices qui sont en quelque sorte les oubliés de la tragédie que vit la culture en ce moment, selon la directrice Lee Fou Messica.

L’espace continue aussi à mener certaines activités (beaucoup plus par le biais des visio-conférences) avec ses différents partenaires dont les autorités administratives, les acteurs culturels et universitaires, les compagnies ainsi que les établissements scolaires et les particuliers. La situation a certes bouleversé l’organisation du théâtre, mais dans un même temps, elle a permis de repenser le contact avec les publics et de profiter de leur absence pour réaménager l’espace.

Dans ce contexte, quelles sont tes missions au sein de ta structure d’accueil ?

Ma mission principale dans le cadre de la Saison Africa2020 est la médiation culturelle en direction des publics étudiants. Il était question, au sein de ma structure, de préparer, animer, diffuser les différentes manifestations et événements. Étant donné que le public est absent, je participe aux différents projets et activités mis en place pour remédier à cette situation de crise. Il s’agit de réunions ou d’échanges en visioconférence et j’assiste quelques fois aux cours et ateliers de théâtre et d’écriture dramaturgiques avec les étudiants.

En ce moment, je travaille plus particulièrement sur un projet d’exposition avec des élèves de seconde du lycée de la Communication, basé sur une pièce théâtrale, Cardamone, qui sera présentée à l’Espace Bernard-Marie Koltès.

Régulièrement, j’échange avec tous les membres de l’équipe et chacun me montre ce qu’il fait concrètement au sein de l’espace, que ce soit en terme d’administration culturelle, de gestion de la structure, de communication ou de relations avec les publics.

Je participe chaque semaine à un rendez-vous culturel appelé le 12/12, pendant lequel artistes, directeurs de compagnies et d’espaces, universitaires et acteurs culturels, échangent sur une œuvre littéraire ou artistique.

Je me suis également mise à l’écriture. Dans cette lancée, j’aide à la rédaction des comptes rendus de spectacles et des rencontres, qui servent pour les articles publiés sur les pages de l’pace Bernard-Marie Koltès et de l’Université de Lorraine.

J’ai commencé il n’y a pas longtemps un travail qui consiste à archiver des données dans le site de l’EBMK, guidée et accompagnée par les membres de l’équipe, comme c’est le cas pour bien d’autres choses.

Qu’est-ce que selon toi ta présence apporte à ta structure ?

Selon moi, c’est une expérience particulière pour l’équipe du théâtre d’accueillir en son sein une jeune femme qui non seulement vient de loin, mais est également curieuse, à l’écoute et prête à donner main forte dans toutes les activités données. C’est toujours un plaisir de partager avec eux la culture de chez moi que beaucoup ne connaissaient pas vraiment et dont certains n’avaient même jamais entendu parler. C’est aussi une occasion donnée pour déconstruire les clichés que nous avions les uns envers la culture des autres et cela est très important, et répond d’ailleurs à l’un des objectifs de la Saison Africa2020.

Ce temps passé dans ta structure d’accueil te permet-il de mieux connaître certaines facettes du métier ?

J’avoue qu’au départ, j’appréhendais un peu le fait de devoir effectuer ma mission dans un théâtre, alors que j’ai suivi des études en muséologie. Mais au fil du temps, j’ai pris conscience du lien parfois étroit qu’il pouvait y avoir entre les disciplines dans le domaine de l’art.

J’ai surtout expérimenté beaucoup de choses qui m’aideront, j’en suis certaine, dans ce que je veux réaliser plus tard. Il s’agit par exemple de trouver comment appliquer des méthodes utilisées dans le théâtre pour valoriser les arts plastiques.

J’ai aussi pu, grâce à ma participation aux différentes réunions et activités de la structure, comprendre les mécanismes de fonctionnements d’un espace culturel, tant bien dans le volet organisation, programmation, administration, gestion des comptes et des publics que dans celui de la communication et de la diffusion des contenus. Je me suis aussi rendue compte de l’importance constante à accorder à l’aménagement de l’espace.

J’ai pu, et ce malgré les restrictions dues à la pandémie, découvrir certains lieux comme des salles de théatre dans la Région et participer à des représentations.

Aussi, j’apprends comment peuvent se former des partenariats entre les différents acteurs et structures culturels, les écoles et les autorités administratives.

Quelles sont les compétences que tu acquiers grâce à ta mission ?

Depuis le début de ma mission, j’ai appris de nombreuses choses qui me seront utiles au-delà du cadre professionnel : le sens de l’organisation, de la planification et de la programmation ; la discipline, le sérieux, la rigueur et l’adeur au travail. Il y a aussi le travail en équipe qui est très important dans tous les domaines mais plus spécifiquement dans le notre, le respect de l’autre et l’intégrité.

J’ai aussi pu développer le coté « écriture » à travers la rédaction d’articles et de comptes- rendus de spectacles. Cela m’a fait gagner en confiance et m’a motivé à écrire (biographies d’artistes et analyses d’œuvres d’art) et surtout à soumettre mes textes à la lecture.

Le travail sur l’archivage des données et contenus dans le site m’a aussi fait découvrir d’autres choses et m’a donné plein d’idées pour la suite.

Je suis aussi ravie d’avoir rencontré quelques personnes de la culture et aussi d’apprendre à gérer les relations avec les publics, malgré la situation sanitaire.

Tout cela rejoint mes objectifs d’études, de carrière et de vie, qui est de créer des ponts entre les différents acteurs culturels, les artistes, les espaces de diffusion et tous les types de publics.

Est-ce qu’à travers cette expérience de service civique dans le cadre de la Saison Africa2020, tu apprends des choses nouvelles sur des contextes africains ?

C’est une grande chance d’avoir une équipe de volontaires aussi diversifiée. Cela nous permet de discuter des questions générales liées à nos différents domaines, dans quels contextes évoluent les choses dans nos pays respectifs et surtout le point de vue de chacun d’entre nous par rapport aux différents sujets abordés.

En plus de cela, la Saison Africa2020 reflète à travers les différents projets selectionnés, les contextes dans lesquels les choses se déroulent en Afrique aujourd’hui et ce dans tous les domaines de la vie. Je prends toujours plaisir à découvrir ou redécouvrir tout le potentiel dont regorge notre continent, à travers la diversité et la richesse des programmes proposés.

Il y a aussi la question du panafricanisme qui, en plus d’avoir fait l’objet de certaines discussions dans le cadre de cette Saison, est quelque chose qui se vit de façon concrète par chacun d’entre nous, même si la manière diffère.

Pour finir, je suis impatiente de participer au projet « Kuya Kwetu » qui est censé réunir des savoir-faire artistiques de plusieurs pays d’Afrique dont le Cameroun dont je suis originaire.

Ton expérience en France

Et sinon, parle-nous de la ville dans laquelle tu habites.

J’effectue ma mission dans la ville de Metz. C’est une commune située dans le département de la Moselle, en Lorraine, dans le Nord-Est de la France. Metz est une ville de 120 000 habitants, elle détient un exceptionnel patrimoine artistique et historique de plus de trois millénaires. Elle est riche d’un fort héritage médiéval et classique d’influence française et germanique. C’est une ville touristique où se mêlent parfaitement tradition et modernité avec des espaces plus impressionnants les uns que les autres.

Comment s’est passée ton installation en France ? Quelles ont été tes premières impressions ?

Mon installation en France s’est très bien passée, entre l’accueil chaleureux de l’équipe de France Volontaires à Paris et celui de ma structure d’accueil à Metz. J’ai pu voir à quel point les gens pouvaient faire preuve de bienveillance, ce à quoi je ne m’attendais pas forcément. J’ai tout de suite réalisé à quel point les choses étaient différentes de là d’où je viens, car même si je le savais déjà, le vivre a été une autre chose : le fonctionnement et le rapport social, l’organisation de la vie (socio-culturelle, économique, politique), les conditions climatiques, etc.

Bien évidemment, ce n’est pas facile au tout début, car cela nécessite une réorganisation de ses habitudes, de ses modes de vie aussi. J’ai par exemple très mal vécu l’hiver car c’était la première fois que j’étais confrontée à de telles températures. Mais sur certains autres points, cela a été moins difficile car nous avions été avisés à l’avance et aussi parce que j’étais prête à déployer les ressources pour m’adapter.

J’ai surtout remarqué que la région dans laquelle je vis réunit plusieurs cultures différentes, ce à quoi je ne m’attendais pas du tout.

Pour finir, je dirais que la vie est plutôt agréable mais que cela n’exclue pas les difficultés du quotidien, qui sont d’ailleurs quelque chose de normal et de visible ici et ailleurs.

Qu’est-ce qui te plait dans ta vie en France, ou au contraire, qu’est-ce que tu trouves difficile, étrange, inattendu ?

Il est vrai que la situation sanitaire est une menace permanente qui a un impact considérable sur le quotidien des citoyens, mais le cadre de vie me plait parce que tout est pensé et mis en œuvre pour faciliter le quotidien aux habitants*, du moins selon ce que j’ai pu constater.

*l’organisation de la vie en général, du cadre de travail, de la formation et de l’éducation, de la sécurité sociale,…

Qu’est-ce que tu as amené dans ta valise et qu’aujourd’hui tu es particulièrement heureuse d’avoir avec toi ?

J’ai rapporté avec moi des documents de classe qui me sont vraiment utiles et que je n’hésite pas à exploiter dès que l’occasion de le faire se présente. Avec moi, j’ai aussi un livre de prières que je consulte régulièrement, la spiritualité étant un point important dans ma vie de chaque jour.

Et après le volontariat ?

Et enfin, qu’aimerais tu faire après ton volontariat ?

Après mon volontariat, je souhaiterais terminer mes études, du moins jusqu’à l’obtention du Master 2. Je voudrais également continuer à participer aux différents évènements culturels et dans la mesure du possible, apporter ma petite contribution dans leur organisation et leur mise en œuvre. J’aimerais également monter mon propre événement : une rencontre, un talk ou une exposition par exemple, ou tout autre projet dans lequel je pourrai user de mes compétences et des connaissances que j’ai acquises.

Je pense par exemple à un projet que je mûris depuis pas mal de temps, qui consisterait à créer des contenus écrits et audio-visuels pour valoriser le travail des artistes du Cameroun mais aussi d’Afrique et d’ailleurs.

Je voudrais également faire quelque chose dans l’humanitaire.

 

En savoir plus :

Le programme de volontariat de la Saison Africa2020 :

Dans le cadre de la Saison Africa2020 et grâce à une coopération inédite entre France Volontaires, l’Institut français, l’Agence française de développement (AFD) et l’Agence du service civique, onze jeunes venus de différents pays d’Afrique réalisent une mission de service civique auprès d’établissements culturels, acteurs de la Saison Africa2020, aux quatre coins de la France.

Notre rubrique sur le programme de volontariat Africa2020