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10 juin. 20

Marie et Bastien, volontaires de solidarité internationale auprès de BELACD-Caritas Tchad

Marie, Bastien et leur fils Maël ont passé un an et demi à Laï, dans le Sud du Tchad avant de devoir prématurément mettre un terme à leur mission pour cause de Covid-19. Dans ce portrait de volontaire, ils reviennent sur leur expérience de Volontariat de Solidarité Internationale en famille.

Pourquoi avoir choisi de vous investir dans un VSI ?

Lorsque nous nous sommes rencontrés, nous avions tous les deux déjà beaucoup voyagé et souhaitions nous investir dans une mission de volontariat à l’étranger pour partir à la rencontre d’autres personnes, d’autres cultures sur des territoires inconnus. Pour profiter pleinement de cette expérience, nous avions envisagé de concrétiser ce projet assez tôt dans notre vie de couple. L’idée a mûri petit à petit et notre fils Maël est arrivé un peu plus tôt que prévu dans nos vies alors nous avons pris la décision de vivre cette aventure à trois.

Nous n’avons pas construit notre projet en pensant à un contrat particulier mais selon la fiabilité des structures d’envoi. L’important était de partir avec une structure sérieuse qui proposait un suivi de ses volontaires, des structures d’accueil et des missions. La Délégation Catholique pour la Coopération (DCC) correspondait à ce que l’on recherchait : une mission pouvant nous accueillir tous les trois, un accompagnement tout au long de notre expérience et une bonne préparation au départ.

Comment est venue l’idée du Tchad ?

Trouver une mission qui pouvait accueillir un couple avec un bébé et qui permettait en plus de nous épanouir tous les deux dans nos domaines d’expertise (Marie dans la santé et Bastien dans la culture) n’a pas été facile. Alors c’est plutôt le Tchad qui s’est imposé à nous grâce à la mission proposée par le BELACD. Comme nous ne connaissions pas ce pays, mis à part sa localisation sur un planisphère, et que nous avions quelques appréhensions quant à l’accès aux soins, notamment pour Maël, nous avons un peu hésité avant d’accepter l’aventure. Lors d’un week-end de préparation au départ, la DCC nous a poussé à faire des recherches sur notre pays de mission afin de le présenter aux autres volontaires. Cela nous a permis d’avoir une première approche et une meilleure compréhension du pays pour partir sereinement.

Pouvez-vous nous parler de vos structures d’accueil ?

Nous étions mis à disposition de l’ONG BELACD CARITAS à Laï. Ce BELACD est l’une des huit associations membres de UNAD Caritas Tchad ; un instrument de la pastorale sociale de l’Eglise Famille de Dieu.

Cette ONG développe des projets de santé, d’agriculture, d’économie locale ou encore de micro-crédit afin de développer une société plus juste et résiliente dans laquelle chaque femme et chaque homme peut assurer son autonomie. Bien que d’identité chrétienne, les projets mis en place sont destinés à toutes et à tous sans distinction de religion, de race et de genre.

Quelles étaient vos missions ?

Marie : J’occupais le poste de directrice d’hôpital et de coordinatrice du pôle santé du diocèse qui comprenait un hôpital, quatre centres de santé et trois centres de dépistage volontaires pour le sida répartis dans toute la Tandjilé. En plus de la Tandjilé, je coordonnais aussi toutes les structures de santé diocésaine du Tchad (comme à Sarh, Goré, Pala, Mongo, N’Djaména et les hôpitaux privés chrétiens du Tchad). Cela consistait par exemple à la coordination du stock de médicaments des hôpitaux, la supervision par l’amélioration financière, la comptabilité, la gestion des déchets, la formation, la coordination des partenariats avec le Ministère de la santé publique et bien d’autres tâches. Contrairement à ce que je faisais avant, ce poste était vraiment dédié à la gestion de projet et au travail avec les partenaires.

Bastien : Je gérais la radio communautaire de Laï initiée par CARITAS, son budget, les projets de développement, je cherchais des financements, des partenariats, gérais les équipes et prodiguais des formations journalistiques.

 Le projet principal consistait à la création d’émissions visant à la mise en valeur du droit des femmes et des enfants notamment à travers des témoignages de femmes et d’hommes sur leur quotidien, leur place dans la société, le rôle que chacun joue au sein des foyers. Un partenariat avec l’UNICEF a aussi permis de créer une émission animée par dix jeunes de la Tandjilé dédiée à la jeunesse afin de leur permettre d’échanger sur des sujets qui les concernent ainsi que leur communauté.

En plus de la radio, je m’occupais de coordonner l’activité et l’animation des centres culturels de la Tandjilé. Ces centres permettent de mettre un peu de piment dans la vie sociale de la Tandjilé grâce à des activités culturelles proposées dans les bibliothèques, terrains de sport et salles de théâtre.

Que retenez-vous de cette expérience ?

Marie : Les difficultés que nous avons rencontrées tant dans notre mission que celles d’ordre médicale (paludisme à répétitions et éloignement des centres de santé appropriés) m’ont fait découvrir un côté de ma personnalité que je ne connaissais pas, je me suis découverte plus forte. Ces épreuves et le soutien qu’elles nous ont amenés à avoir l’un envers l’autre ont aussi renforcé notre couple.

Bastien : Je garderai le souvenir des amitiés créées et de la simplicité du premier contact avec les tchadiens. Même s’il est souvent difficile de créer des amitiés sur la durée, les « Lalé » (bonjour) qui nous suivaient tout au long de notre chemin, les personnes qui s’intéressaient à notre vie en France ou encore celles qui n’hésitaient pas à nous donner des conseils pour nous aider à mieux nous intégrer nous ont fait nous sentir comme chez nous, quelque part où la bienveillance est de mise. C’est aussi déconcertant car c’est une vie qui peut à la fois être douce par son tempo, sa fluidité et très rude par son climat, ses cultures et la difficulté d’accès aux besoins primaires.

Comment Maël a-t-il vécu l’aventure ?

Maël avait dix mois lorsque nous sommes arrivés au Tchad. Il a donc vécu des premiers moments de vie très importants ici et il s’en est très bien sorti. Sa nounou et lui se sont très bien entendus, il a fait ses premiers pas lors d’une visite chez notre boutiquier et a été inscrit au jardin d’enfants. C’est une vie très simple pour un bébé qui nous a permis de profiter en famille de ces précieux moments, ce qu’on n’aurait sûrement pas pu faire en France avec un rythme de vie si différent.

Le plus compliqué pour lui a été le manque d’échange avec les autres enfants qui le regardaient comme une curiosité. Mais aujourd’hui inscrit en collectivité, Maël est très à l’aise et en confiance partout où il est. Nous pensons que c’est en partie grâce à notre vie au Tchad où la simplicité d’approche avec les gens a fait qu’il a vu beaucoup de monde passer, lui parler et qu’il a pu découvrir librement son environnement.

L’arrivée de la pandémie de COVID-19 au Tchad a-t-elle eu un impact sur vos missions ?

Bastien : Nous n’avons pas été obligés de rentrer mais au vu de l’ampleur que la pandémie a pris dans certains pays, des restrictions de déplacement au Tchad, de notre situation géographique et de la présence de notre fils, les structures d’envoi de volontaires et l’Ambassade de France au Tchad nous ont proposé d’être rapatriés. Tout s’est passé très vite, en l’espace d’une semaine, nous avons pris la décision d’accepter le rapatriement et donc de mettre fin à notre mission.

Marie : Pour finir ma mission, mon équipe et moi devions mettre en place un important projet visant à l’amélioration des structures de santé et de la prise en charge des patients. L’innovation de ce projet se trouvait dans l’investissement communautaire.  Encore trop peu de patients viennent se faire soigner à l’hôpital par manque d’argent ou par conviction. Avec ce projet, nous devions sensibiliser ces personnes l’importance des consultations dans des vrais centres de santé avec du personnel qualifié et surtout les initier à la création d’une mutuelle permettant à chacun, selon ses possibilités, de cotiser pour faire face, lorsqu’ils en auront besoin, aux dépenses de santé. Malheureusement, l’arrivée du COVID-19 au Tchad et la fermeture des frontières n’a pas permis à mon remplaçant, bloqué au Nigeria, de venir. Le projet a donc été totalement mis à l’arrêt. Cependant, bien avant l’arrivée de cette pandémie, nous avions commandé des oxygénateurs qui sont arrivés juste avant mon départ ; c’est un petit soulagement qui permettra peut-être de sauver des vies.

Quel est votre sens du « volontariat » ?

Le volontariat c’est « vivre avec ». Nous nous sommes beaucoup posé la question de l’impact de notre volontariat et nous sommes venus à la conclusion que nous n’étions qu’un grain de sable au sein d’une grosse mécanique. Nous avons plutôt le sentiment d’avoir été envoyés dans le cadre d’une mission de paix, d’échange au profit du développement humain culturel. Le volontariat est l’occasion de « vivre avec » celui dont la culture est différente de la nôtre, de « vivre avec » des comportements qui ne correspondaient pas avec nos valeurs initiales mais que nous comprenons désormais et de « vivre avec » les moyens que nous avons pour effectuer la mission.

Avez-vous des conseils pour de futurs volontaires ?

Si c’est au Tchad, ne jamais dire « tant pis » ! Nous l’avons appris à nos dépends, c’est très mal vu !  Nous leur conseillons de vivre l’aventure à fond, de partir avec beaucoup de dynamisme, de curiosité et d’ambition mais aussi d’être indulgent avec soi-même quant au résultat de la mission car tout ne dépend pas uniquement de soi et ils risqueraient de passer à côté d’une très belle expérience humaine.

 

Liens utiles

Le site internet de la Délégation Catholique pour la Coopération (DCC)