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14 nov. 22
Côte d’Ivoire

Pauline, volontaire superviseure en suivi écologique et anti-braconnage

Le confort de vie était rudimentaire : dormir sous tente, se laver à la rivière durant les périodes en forêt, vivre dans un village sans eau courante. Je pense que cette capacité d’adaptation me sera bien utile dans mes futurs projets.

Passionnée par la faune et la flore, Pauline, volontaire en service civique, a été envoyée par le Service de Coopération au Développement (SCD), pendant un an dans le parc de Taï, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, auprès de la Wild Chimpanzee Foundation (WCF). 

Peux-tu te présenter en quelques mots ? 

Je suis diplômée d’un Master en Écologie. J’ai toujours aimé bouger, durant mes vacances, mais aussi durant mes études. J’ai effectué plusieurs échanges universitaires : une année à Taïwan en Licence 3 que j’ai adorée. Je passais mon temps à explorer le pays durant mes week-ends en partant randonner. Et une année en Allemagne pour mon Master 2, malheureusement, suite au COVID, je n’ai pas pu effectuer mon année à l’étranger en entier, je suis rentrée en avance et je l’ai terminé en distanciel.

Pour quelle(s) raison(s) ce projet d’engagement ?

Après deux années où travailler sur le terrain n’était pas possible à cause du Covid-19, je voulais me trouver un premier poste loin des bureaux et ordinateurs. J’avais besoin de grands espaces et d’effort physique. Je ne cherchais donc pas un poste pour m’engager dans du volontariat, le poste s’est présenté à moi et il convenait parfaitement à ce que je recherchais : être la majorité du temps dehors (20 jours par mois).

Peux-tu nous présenter ta structure d’accueil et tes différentes missions ?

J’ai travaillé pour la Wild Chimpanzee Foundation (WCF), la fondation pour les chimpanzés sauvages. Cet organisme s’engage à la protection des chimpanzés et leur écosystème. Ainsi, j’étais basée dans le parc national de Taï, l’une des dernières forêts primaires d’Afrique de l’Ouest (forêt primaire : forêt qui n’a jamais était exploité par l’Homme).

Mon rôle consistait à superviser deux équipes de quatre ivoiriens, nous alternions entre 10 jours en forêt en totale autonomie (bivouac) et 7 jours au village. Durant les 10 jours en forêt, nous collections des données sur la faune sauvage et des indices de la présence des braconniers en forêt. Lorsque j’étais au village, j’effectuais mes rapports de mission.

2 à 3 heures de piste depuis la dernière ville avec goudron étaient nécessaires pour rejoindre le village de Taï.

Quelles ont été tes premières impressions à ton arrivée ?

Le rythme de vie est très différent du nôtre, j’ai trouvé les gens assez nonchalants. Vivant dans un village en pleine brousse, les habitants organisent leurs journées de travail comme ils le souhaitent, en travaillant surtout le matin. Ils n’ont pas d’horaires de bureau et n’ont pas la même notion de week-end que nous. De ce fait, il m’est arrivé d’avoir des collègues qui m’appelaient à 7h30 le samedi matin pour me demander des informations sur le boulot. J’ai dû poser mes limites pour faire la séparation entre temps de travail et temps personnel, mais cela n’était pas toujours bien respecté. De plus, en Côte d’Ivoire, le français est une langue bien maîtrisée, mais beaucoup de personnes parlent en langue locale, ce qui rend la création de lien plus difficile.

Est-ce que tu as connu des difficultés ?

Les équipes que je gérais étaient toutes constituées uniquement d’hommes, tous plus âgés que moi. De plus, pour la plupart, ils avaient déjà quelques années d’expérience sur le terrain. Cela ne m’a pas forcément aidé à me sentir légitime et me faire écouter lors des missions en forêt. Ce qui a aussi été difficile, c’est que j’arrivai sur ce projet extrêmement motivée, mais que les équipes ne l’étaient plus. Lorsque les équipes me parlaient, c’était pour faire remonter des informations négatives. Et finalement, les équipes ne parlaient qu’en langue locale entre elles, ce qui ne m’a pas permis de créer du lien avec elle. Au final, ma mission a été étonnement plus difficile psychologiquement que physiquement.

Quel est le meilleur moment que tu retiens dans ta mission ?

“Pouvoir voir les animaux évoluer dans leur habitat naturel et non dans des caches est une sacrée chance, surtout quand l’endroit est encore bien préservé.”

Les meilleurs moments lors de mes missions, étaient de pouvoir voir les singes et autres animaux (nandinie, athérure, civette, …) lorsque l’on faisait le suivi de faune sauvage sur le terrain. Pouvoir voir les animaux évoluer dans leur habitat naturel et non dans des caches est une sacrée chance, surtout quand l’endroit est encore bien préservé. Ma rencontre avec les chimpanzés restera aussi un moment fort de cette année d’engagement, les voir se déplacer avec autant de faciliter et sans faire un bruit dans cette forêt m’a impressionné. J’ai aussi beaucoup aimé travailler sur la visualisation des vidéos des pièges caméras que l’on avait posé en forêt, voir un léopard passer là où l’on est passé deux jours avant donne des frissons.

Et l’accomplissement dont tu es la plus fière durant ta mission ?

Malgré le fait que les équipes que je gérais n’était pas facile, j’ai au moins pu avoir une expérience de management. J’ai vu que j’étais capable de gérer la planification pour des groupes de personnes. De plus, ce n’est pas quelque chose que j’ai remarqué personnellement, mais beaucoup de personnes extérieures au projet m’ont dit qu’il était impressionné par ma capacité d’adaptation. En effet, pour ce travail, le confort de vie était rudimentaire : dormir sous tente, se laver à la rivière durant les périodes en forêt, vivre dans un village sans eau courante. Je pense que cette capacité d’adaptation me sera bien utile dans mes futurs projets.

Maison de Pauline 20 jours par mois, dans un champ d’hévéa

Quel bilan retire-tu de cette mission ? 

Sur le point de vue professionnel, je retiens que dans l’immédiat, je ne souhaite pas avoir un poste avec des responsabilités de management. Je souhaite continuer à travailler sur le terrain, j’ai vraiment adoré pouvoir à la fois collecter des données et les analyser.

Sur le point de vue personnel, je suis très proche de ma famille, je me suis bien entendu avec les autres volontaires de ma structure et cela a permis de recréer un petit cocon familial. Toutefois, ne pas être présente pour les événements importants de la vie, n’a pas toujours été facile (naissance, fête de noël). Je sais que je veux continuer à travailler hors de France, mais depuis une destination qui permet de plus facilement rentrer pour revoir les amis et la famille.

Quels sont tes projets après cette expérience ?

Depuis que je suis rentrée, j’en profite pour revoir tous les amis et la famille que je n’ai pas vus depuis plus d’un an. J’en profite pour me poser et souffler un peu avant de repartir pour de nouveaux projets. Je commence un doctorat en février 2023, en Pologne, donc plus proche de la famille et des amis comme je le souhaitais. Je vais travailler sur un sujet qui va me permettre de combiner la collecte de données sur le terrain, étude en laboratoire et analyse statistique. Je passerai aussi un peu de temps dans le Svalbard en Arctique pour étudier une petite espèce d’oiseau : le mergule nain.

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui veut faire du volontariat à l’international ?

Je pense que le volontariat est une question d’opportunité, si le sujet ou le projet qui est proposé te tente, fonces !!! Certes, l’indemnité n’est pas forcément très élevée, mais l’expérience même si elle ne se passe pas comme prévu – la mienne n’a pas été le monde des bisounours – permet d’apprendre donc je ne la regrette pas. L’expérience sera forcément enrichissante sur le point de vue professionnel : tu pourras voir ce qui te plaît ou ne te plaît vraiment pas. Sur le plan personnel, tu feras certainement de magnifiques rencontres que ce soit avec d’autres volontaires ou bien avec des locaux. Et puis, sur ton CV ça interpellera toujours !

Pauline, cuisinant en pleine nature lors d’une après-midi de libre