Rémi, mobilisé au Cameroun dans le domaine de l’eau et de l’assainissement

Je pars avec la satisfaction de savoir que le prochain volontaire aura les moyens de mettre en œuvre le projet pour lequel j’ai milité.

Rémi, 26 ans, est arrivé au Cameroun il y a 10 mois. Spécialisé dans le domaine de l’eau et de l’assainissement, il a choisi de s’engager pour une mission de service civique international.

• Quelle a été la principale motivation qui t’a poussé à devenir volontaire ? Quel est ton parcours ?

Je suis diplômé d’une école d’ingénieur et je suis spécialisé dans le domaine de l’eau et de l’assainissement. C’est en 2019, durant mon cursus universitaire, que j’ai appris l’existence du service civique. Début 2020, j’ai candidaté pour plusieurs missions, malheureusement l’épidémie de COVID-19 a stoppé les procédures de recrutement et je n’ai pas pu réaliser ce projet.

M’engager en service civique représentait pour moi une occasion unique de m’investir dans une expérience citoyenne et solidaire, différente des expériences en entreprise et en intérim que je connaissais déjà. Je souhaitais participer à des projets priorisant davantage l’humain et la qualité, plutôt que la rentabilité et la quantité.

Ce n’est qu’en 2023, une fois diplômé et après un an d’expérience dans un bureau d’étude, que j’ai décidé de retenter ma chance, avant d’atteindre la limite d’âge. Le service civique était une occasion unique de mettre à profit mes connaissances et mon savoir-faire en hydraulique urbaine, au profit des acteurs de la solidarité internationale. Animé par une volonté de voyager et découvrir, c’est ce dernier critère qui m’a amené à postuler pour la mission que je réalise actuellement au Cameroun.

• Peux-tu nous décrire ta mission actuelle et les objectifs de ta structure ?

Ma structure d’accueil est l’association française ANI-International. Fondée en 2002 par un étudiant camerounais de Science Po Paris, elle intervient au Cameroun depuis 2010 à travers 3 projets opérationnels de développement : Autonomisation de la femme rurale, Insertion socioprofessionnelle, Eau et assainissement. Le projet Eau et assainissement vise au développement local de zones défavorisées par la construction d’ouvrages d’eau, tels que des forages équipés d’une pompe à motricité humaine (EPMH) ou des mini-adductions, et d’ouvrages d’assainissement à l’instar des latrines.

Mes missions sont multiples, et je participe notamment à la rédaction des appels à projets afin de mobiliser des ressources financières pour la mise en œuvre des ouvrages, ainsi qu’à la rédaction des comptes rendus des diverses activités menées par l’association et des réunions auxquelles j’assiste avec les partenaires financiers, institutionnels, politiques, techniques et opérationnels.

Au quotidien, je participe également aux diverses activités menées par ANI-International :

• rencontres avec les autorités politiques et locales afin de favoriser le développement des projets de l’association,
• sensibilisation des populations locales sur les thématiques Eau, assainissement et hygiène (EAH),
• mise en place des comités de gestion des ouvrages,
• réception des ouvrages auprès des autorités légales,
• visite de contrôle des ouvrages en présence des partenaires financiers.

Lorsque j’ai débuté ma mission, les forages dans la commune de Sa’a étaient déjà livrés mais les latrines étaient encore en construction, j’ai donc pu participer au suivi final des travaux.  Je suis vraiment fier d’avoir participé à cette fin de projet, débutée en 2022 par l’association, et d’avoir pu constater sa concrétisation.

Par la suite, j’ai activement participé à la rédaction des appels à projet pour le futur projet Eau et assainissement d’ANI-International. Après plusieurs mois, ma participation a permis l’obtention de la totalité du financement du projet prévoyant la construction de sept forages EPMH et sept latrines dans la ville de Monatélé. Je pars avec la satisfaction de savoir que le prochain volontaire aura les moyens de mettre en œuvre le projet pour lequel j’ai milité.

• Quels sont les principaux défis auxquels tu as été confronté depuis le début de ta mission et jusqu’à présent ? Comment gères-tu l’interculturalité au quotidien ?

Tout au long de mon expérience, j’ai eu à relever de nombreux défis, qui m’ont permis de mieux comprendre l’environnement au sein duquel j’évolue. Durant la préparation de mon séjour depuis la France, j’ai réalisé des recherches sur l’histoire du Cameroun, sa géographie, son climat et sa politique qui m’ont permis de mieux appréhender mon arrivée.

Une fois sur place, la découverte de mon nouvel environnement de vie a été intense et parfois déroutante. En effet, j’ai été confronté à un mode de vie totalement différent de ce à quoi j’étais habitué, et j’ai eu besoin d’un temps d’adaptation d’environ un mois afin de me familiariser avec ce nouveau quotidien : la gestion du logement, les habitudes de locomotion et d’orientation dans la ville, comment prendre le taxi, la façon de consommer et de négocier avec les commerçants, la rencontre avec un univers culinaire varié et nouveau…

Finalement, je pense qu’en matière d’interculturalité, le meilleur allié reste le temps. Vivre au Cameroun et être baigné dans la vie locale m’a permis de relativiser et d’observer sous un nouveau prisme certaines traditions aux antipodes de nos habitudes occidentales. Je n’oublie jamais que je ne suis pas en France, et qu’en tant que volontaire je me dois d’essayer de comprendre et de m’adapter au mieux à leurs us et coutumes.

S’il y avait un défi à souligner et qui relève de l’anecdote, ce serait la gestion du temps. En effet, le retard est normal et fait partie intégrante de la vie ici, et il n’est pas rare que les rendez-vous soient annulés à la dernière minute. Cet aspect a parfois été compliqué à gérer dans le cadre de ma mission ; c’est un frein à la mobilisation des différentes acteurs financiers, institutionnels, opérationnels et même les bénéficiaires, mais on s’y fait !

• Quelles compétences as-tu acquises ou développées depuis le début de ta mission ?

Durant ma mission, j’ai eu à développer plusieurs compétences en matière de gestion de projet. J’ai notamment participé à la rédaction des appels à projet et des comptes rendus, me permettant de ce fait d’améliorer mes compétences de rédaction, de synthèse et de maîtrise des outils bureautiques. J’ai également contribué à l’organisation et à la réalisation d’ateliers de sensibilisation et de visites de contrôle mobilisant plusieurs acteurs de nos projets, développant ainsi mes compétences en planification, en mobilisation des acteurs et en animation des ateliers.

• Est-ce que cette expérience en tant que volontaire a-t-elle changé ta perspective sur le monde et sur toi-même ?

Énormément. Je suis arrivé au Cameroun avec certains a priori que j’ai pu déconstruire durant ma mission. Venir au Cameroun était pour moi l’occasion d’expérimenter la vie locale et ainsi faire fi des préjugés que nous pouvons avoir avant de s’engager. Cette expérience m’a permis de relativiser sur ma propre vie et de conscientiser la chance et les facilités dont nous disposons au quotidien en France.

• Peux-tu nous partager une anecdote ou un moment marquant qui t’a particulièrement touché pendant ta mission ?

Il y a tellement d’anecdotes et de moments marquants, vécus aussi bien dans le cadre privé que professionnel que c’est difficile de choisir ; mais je retiens particulièrement mon 1er trajet en brousse. Je devais aller au village de Ndong Elang, dans le cadre d’un atelier de sensibilisation. C’est un village très difficile d’accès, et je me suis fait conduire en moto à travers des routes cahoteuses en terre battue pendant 1 heure. J’ai dû descendre à plusieurs reprises de la moto et avancer à pied car le chemin devenait impraticable pour le motoman. Durant ce trajet, j’ai croisé un camion retourné sur le bas-côté, et dans ces conditions, au beau milieu de la brousse, seuls les quelques habitants des alentours ont pu venir en aide. Equipés de simples pelles, ils creusaient la terre pour essayer de remettre le camion sur roues. C’était impressionnant, j’avais le sentiment d’être au bout du monde, et de voir une scène de vie unique qu’on ne perçoit généralement qu’à la télé, via des documentaires et confortablement installé dans son canapé. J’ai alors pleinement pris conscience que cette vie est réelle, qu’elle existe, et que la réalité de certains camerounais peut s’avérer très éprouvante.

• Quels sont tes projets à la suite de ta mission ?

A l’issu de ma mission, je vais rentrer en France et rester au moins 1 an pour profiter de ma famille et de mes amis Français. Durant ma mission, je n’ai pas quitté le Cameroun et je me suis rendu compte de l’importance que j’accorde à mes proches. Je ne suis pleinement épanoui qu’à leurs côtés. Pour autant, je n’exclus pas de repartir à l’étranger après cette année, dans le cadre d’un autre volontariat si une opportunité se présente à moi. Cette expérience au Cameroun était tellement enrichissante et grandissante que j’ai envie de continuer cet engagement dans la solidarité internationale.

• Un conseil pour les futurs volontaires ?

Ne craignez pas de passer le cap, et de sortir de votre zone de confort. C’est dans ces moments- là que vous allez découvrir la personne que vous êtes vraiment et celle que vous souhaitez devenir !