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Vingt ans après, une volontaire guadeloupéenne revient sur son engagement en Guinée

Myriam Malo, “volontaire du progrès” au début des années 2000, a partagé son expérience avec des candidates au départ en volontariat lors d’une formation au départ courant juillet. © France Volontaires

Myriam Malo a fait partie des premiers volontaires de Guadeloupe partis en volontariat international en Guinée, en Afrique de l’Ouest. Déployée au début des années 2000 par l’Association Française des Volontaires du Progrès (l’ancien nom de France Volontaires), sa mission consistait à appuyer et orienter les autres volontaires du progrès (VP) tout au long de leur mission.

A l’occasion d’un stage de préparation au départ de volontaires, l’antenne de France Volontaires aux Antilles a accueilli Myriam Malo dans ses locaux afin d’animer l’un des modules de la formation. L’occasion pour cette ancienne « volontaire du progrès » (VP), comme on les appelait avant l’apparition du Volontariat de solidarité internationale en 2005, de témoigner auprès des nouveaux partants, et de partager son regard sur cette expérience, une vingtaine d’années après sa mission.

Les débuts en volontariat international en Guinée Conakry

« On nous appelait les VP et les VPettes », s’amuse d’emblée Myriam, face aux volontaires présentes pour l’occasion. Celle qui était alors en mission « Information et Formation » (VIF) durant trois ans explique sa démarche : « J’avais déjà quitté la Guadeloupe et j’accompagnais ceux pour qui c’était un premier départ ». Tout comme c’est le cas aujourd’hui, il y avait alors énormément de profils différents, des Bac + 3 aux ingénieurs. 

Myriam, curieuse de tout et multi-casquettes avait contribué à différentes missions, découvrant des secteurs d’activités allant de « l’élevage à l’agriculture, en passant par la mise en place de coopératives, et même la prévention santé, sans oublier l’encadrement de volontaires au sein de leur nouvel univers ».

Pour Myriam, vivre à l’étranger, c’est vivre tout plus fort.  Durant la mission, « On vit tout doublement, voire triplement. Il est important de prendre du recul et de faire le point sur soi. À l’étranger, hors de notre zone de confort, on est beaucoup plus vulnérable. On ne s’en rend pas compte, mais nos émotions sont décuplées, on les vit puissance deux.  D’un côté, c’est très bien car on profite du moment présent, mais d’un autre côté, il faut savoir rester lucide sur les enjeux de notre présence, même si l’expérience est intense. On peut aussi avoir l’impression, poursuit-elle, que personne ne peut comprendre ce que l’on vit ou ce qu’on a vécu. »

«À l’étranger, hors de notre zone de confort, on est beaucoup plus vulnérable. On ne s’en rend pas compte, mais nos émotions sont décuplées, on les vit puissance deux. »

Myriam Malo, ancienne volontaire du progrès et désormais formatrice et animatrice à la radio.

C’est la raison pour laquelle elle incite les participantes à garder un contact régulier avec leur famille, des proches qui savent qui on est et peuvent parfois nous rappeler nous-mêmes. Néanmoins, pour Myriam, il faut aussi savoir faire la part des choses entre la réalité des faits et les clichés qui alimentent parfois la vision de ceux qui sont restés au pays. 

Vivre son volontariat intensément et créer du lien avec la population

Pour Myriam, le secret d’un volontariat réussi tient autant dans l’ouverture aux autres que dans la simplicité des instants partagés. Même si le choc culturel n’a pas été aussi marqué qu’elle l’imaginait, les premiers jours ont eu leur lot d’inconforts. Une fois ces repères trouvés, elle s’est pleinement ouverte à son environnement : danser, pratiquer un sport local, apprendre la langue, observer la faune et la flore… « C’est en Guinée que j’ai découvert ce qu’était une buse ! » lance-t-elle en riant. Et de conclure : « Pour s’épanouir, il faut vivre la mission au-delà du cadre professionnel, en passant du temps avec les habitants. Ce sont ces moments simples, hors de toute obligation, qui créent des liens durables et font naître de vraies amitiés. »

Au fil de l’entretien, la conversation glisse vers la question de la valorisation de la mission et de la manière d’en garder une trace, pour soi comme pour les autres. L’expérience est, selon Myriam, si intense qu’elle peut sembler fugace, au risque de s’effacer avec le temps. D’où ses conseils : photographier, documenter, consigner. Elle recommande de tenir un carnet de bord en deux volets. L’un, personnel, pour revenir sur ses activités, ses choix, ses émotions ; l’autre, professionnel, pour consigner les tâches accomplies, les compétences acquises et les méthodes déployées dans un contexte souvent éloigné de sa zone de confort, avec peu de moyens mais des objectifs à atteindre. Plus qu’une simple chronologie, ce journal permet de mesurer les évolutions profondes, de suivre la manière dont le regard sur le monde se transforme au fil des mois, et d’exercer une réflexion sur son parcours.

Préparer le retour et valoriser son expérience de volontariat

Ce même carnet devient un appui précieux au moment du retour. Si le « choc culturel » à l’arrivée est bien identifié, celui du retour reste souvent sous-estimé, alors qu’il s’agit d’une étape déterminante. Myriam en sait quelque chose : après trois années de mission, il a fallu réapprendre à trouver sa place, se réinsérer dans le marché de l’emploi et faire reconnaître la valeur de l’expérience acquise. Malgré un master en information et communication et trois ans de terrain à l’international, la recherche d’un poste s’est révélée plus complexe que prévu. Entre le manque de reconnaissance de certains recruteurs et les évolutions du secteur depuis son départ, elle a dû revoir ses ambitions et élargir ses perspectives. Un événement familial l’a finalement ramenée en Guadeloupe, où elle s’est formée au métier de conseillère en insertion, spécialisée dans l’accompagnement à la formation et la levée des freins périphériques.

Les difficultés professionnelles surmontées, d’autres, plus personnelles, ont pris le relais. Myriam parle volontiers de ce « déphasage culturel » ou, plus simplement, du « choc du retour » : la nécessité d’accepter que, même si l’on retrouve son territoire, rien n’est tout à fait comme avant. Le système de valeurs évolue, les priorités changent. Retrouver sa place suppose de la patience, d’accepter le temps d’adaptation nécessaire et de rester attentif aux moments de flottement ou de découragement qui peuvent en découler.

« Avoir la liberté de partir est un luxe. Un séjour à l’étranger doit être alimenté par une profonde réflexion, une conscience de soi et de ce que cela implique en termes d’organisation personnelle. »

Aujourd’hui, Myriam ne se voit plus repartir. Elle garde un lien fort avec la Guinée et a envisagé d’y retourner, mais la vie quotidienne, les engagements pris et les contraintes financières ont eu raison du projet. Sa certitude est désormais inverse à celle qu’elle avait au moment de partir : sa place est ici. Elle dit aimer la diversité de son travail et y voir une continuité avec son désir initial de transmettre et de partager la joie de vivre. Forte de son parcours, elle insiste : un départ à l’international se prépare et se mûrit. Les motivations doivent être claires, réfléchies, et ne pas relever d’un simple besoin de changement. « Avoir la liberté de partir est un luxe, souligne-t-elle. Un séjour à l’étranger doit être alimenté par une profonde réflexion, une conscience de soi et de ce que cela implique en termes d’organisation personnelle. »

La question n’est pas tant de savoir s’il faut partir ou rester, conclut-elle, mais de comprendre pourquoi l’on souhaite partir.

Volontaires du progrès : l’esprit pionnier

Né en 1963 dans le sillage du Corps de la paix américain de John F. Kennedy, le statut de « volontaire du progrès » est lancé par le général de Gaulle et son ministre de la Coopération, Raymond Triboulet. Objectif : offrir à de jeunes Français la possibilité de partir soutenir des projets de développement aux quatre coins du monde. Reconnu et cofinancé par l’État, ce dispositif a marqué toute une génération d’engagés, sur des missions longues et exigeantes. En 2009, l’Association française des volontaires du progrès (AFVP) devient France Volontaires, pivot de la coordination et de la promotion du volontariat.

Myriam, lors de la formation au départ courant juillet. © France Volontaires

Bio express

Diplômée en info-communication à l’université de Villetaneuse, Myriam Malo est responsable pédagogique au sein d’un centre de formation des apprentis en Guadeloupe.  Elle a été correspondante de France Volontaires en Guadeloupe pendant six ans, de 2010 à 2016. Elle a également effectué des déplacements en Haïti à la rencontre de volontaires et a accompagné des associations d’éducation populaire telles que les centre d’entraînement aux méthodes d’éducation active (CEMÉA). Engagée dans l’association Kilti Kontré, en 2020, à la suite de la crise du Covid, elle a contribué à la mise en place de la web radio Radyo Kotkarayib.

Dans le bois de Vincennes, des jeunes du monde entier cultivent leur engagement écologique

 Séance d’observation de la faune et de la flore dans l’arboretum du bois de Vincennes © France Volontaires

Ils viennent d’Italie, d’Espagne ou de République tchèque, ont entre 15 et 18 ans, mais partagent déjà une conscience aiguë des enjeux environnementaux. Pendant deux semaines, ces jeunes volontaires ont participé à un chantier international au cœur de l’école du Breuil, pour apprendre, transmettre… et vivre ensemble.

Ce matin-là, le soleil filtre à travers les feuillages du bois de Vincennes. Une quinzaine de jeunes volontaires, sac sur le dos et carnet à la main, s’enfoncent dans les allées paisibles de l’arboretum de Paris, accompagnés de Pierrot, leur guide du jour. Spécialiste de botanique et enseignant à l’école du Breuil pendant l’année, il anime un atelier de découverte de la flore et de l’avifaune locale, dans le cadre du chantier international porté par l’association Études et Chantiers Île-de-France, membre du réseau Cotravaux.

 À la découverte des bienfaits cachés de l’ortie. © France Volontaires

« Regardez ces feuilles d’ortie : on peut les ramasser à la main et même les manger », lance Pierrot en français avant de traduire en anglais. Amusé, il scrute le regard des jeunes qui semblent douter de ses paroles. Puis, d’un geste sûr, il froisse la plante entre ses doigts, sans sourciller. « Le secret, c’est de plier l’ortie dans le bon sens pour neutraliser les poils urticants », explique-t-il. Quelques volontaires s’approchent, intrigués. Un Espagnol tente l’expérience, prudemment, avant de croquer une feuille avec un rire nerveux. « It tastes like spinach! », s’exclame-t-il. Autour de lui, les appréhensions tombent. L’atelier se transforme en dégustation improvisée de ce que Pierrot appelle « la mauvaise herbe la plus nutritive d’Europe, avec 6 à 8 grammes de protéine pour 100 grammes ».

Chantier international : quand des jeunes volontaires s’engagent pour l’environnement

À ses côtés, des regards curieux se penchent, des téléphones capturent, des questions fusent dans un anglais parfois balbutiant mais parfois plus sûr. Une volontaire note soigneusement les noms latins, pendant qu’un jeune romain récupère une feuille pour son herbier personnel.

Depuis plus de 30 ans, les chantiers de jeunes bénévoles permettent à des adolescents et jeunes adultes du monde entier de s’engager dans des projets utiles, concrets et solidaires. À Paris, c’est sur les terres verdoyantes de l’école du Breuil que cela se passe cette année. Une oasis de biodiversité où les participants contribuent à l’entretien des jardins, à la valorisation de la faune et de la flore, et à des animations de sensibilisation à l’environnement.

 © France Volontaires

L’idée : mêler action collective et apprentissage. « On n’est pas là pour faire du jardinage décoratif, mais plus pour comprendre comment fonctionne un écosystème urbain », précise Pierrot, qui anime également des ateliers sur les plantes comestibles ou la reconnaissance des chants d’oiseaux.

L’ambiance est studieuse mais détendue. Ce matin, le groupe observe les arbres remarquables du parc, et lève les yeux au ciel pour repérer quelques oiseaux remarquables. Outre des corneilles et autres passereaux communs, les jeunes voient un héron s’envoler lourdement quand ils approchent d’un étang.

« Je ne pensais pas qu’on pouvait trouver une telle diversité au cœur de Paris », s’étonne une jeune volontaire espagnole de 16 ans. « Chez moi, la végétation est beaucoup plus sèche. Ici, c’est un autre monde. »

Le chantier ne se limite pas à l’observation : les jeunes participent aussi à des travaux concrets. L’an dernier, les volontaires avaient réalisé des relevés de faune et de flore pour enrichir les données de l’école et initier les visiteuses et visiteurs aux sciences participatives. Cette année, l’objectif est de fabriquer un mur de nichoirs adaptés aux espèces locales, afin de favoriser la biodiversité et d’encourager l’observation des oiseaux.

Au fil des jours, chacun trouve sa place, selon ses compétences. Encadrés par deux animateurs, les jeunes évoluent en petits groupes. Les échanges sont facilités par l’anglais, et des affinités se créent petit à petit.

Une expérience immersive pour des volontaires venus du monde entier

Ici, pas d’hôtel ni de résidence étudiante : les jeunes campent directement sur le site, sur une vaste pelouse mise à disposition par l’école. Tentes, douches, cuisine collective… une organisation rudimentaire mais joyeuse, propice aux liens. « On cuisine tous ensemble, à tour de rôle. D’ailleurs il faut qu’on réfléchisse au menu du soir avec l’équipe de cuistot du jour », anticipe Ludovica, animatrice du chantier.

Les soirées sont ponctuées de jeux, de discussions sur l’écologie, ou de simples moments à se reposer. Et dans ce quotidien collectif, les apprentissages vont bien au-delà de la botanique. « Ce chantier, c’est une école de la nature, mais aussi de la vie en commun », résume Ludovica. « Ils sont encore mineurs, donc certains sont parfois timides, voire en retrait, mais ils repartent deux semaines plus tard avec des souvenirs, des amitiés, et une conscience élargie du monde. »

Des chantiers internationaux, pour quoi faire ?

Ce chantier s’inscrit dans un réseau plus large de projets de volontariat international, soutenus notamment par l’association Cotravaux, membre de France Volontaires. Chaque été, des centaines de jeunes participent à ces chantiers en France et à l’étranger, dans des domaines aussi variés que le patrimoine, l’environnement, la solidarité ou la culture. Une façon, aussi, de poser les bases d’un engagement citoyen, dans un cadre peu formel et ouvert sur le monde.

« La vie communautaire est au centre de la mission »

Charlotte (à droite), lors d’une des animations d’activité à l’Arche de Clermont-Ferrand. © Arche de Clermont-Ferrand

À Clermont-Ferrand, Charlotte Kinao, 27 ans, est volontaire togolaise au sein de L’Arche, une communauté qui accueille des adultes en situation de handicap mental. Pendant un an et demi, elle a partagé leur quotidien, entre soins, activités et vie de maison. Un engagement de proximité, inscrit dans le cadre du volontariat international, qui illustre à la fois les enjeux de l’inclusion et la contribution des jeunes de pays partenaires aux solidarités en France.

En France, près de 12 millions de personnes vivent avec un handicap, soit environ 18 % de la population*. Parmi elles, plus de 700 000* sont en situation de handicap mental ou psychique. Ces personnes restent encore trop souvent à l’écart de la vie sociale et professionnelle. Pour y remédier, la stratégie nationale 2023-2027* pour les personnes en situation de handicap entend renforcer leur inclusion dans tous les domaines de la vie, de l’école à l’emploi, en passant par le logement et la citoyenneté.

Le monde associatif joue un rôle essentiel dans cette dynamique, notamment à travers des structures comme les communautés de l’Arche, qui proposent une vie communautaire partagée entre personnes avec et sans handicap mental. Les volontaires en mission de solidarité internationale (VSI) apportent un aide concrète dans ce contexte. C’est le cas d’Essotolom Charlotte Kinao, jeune Togolaise de 27 ans, accueillie par la Délégation catholique pour la coopération (DCC) et envoyée par l’Agence nationale du volontariat au Togo (ANVT), qui revient avec nous sur un an et demi de vie partagée au sein de l’Arche de Clermont-Ferrand.

Peux-tu nous dire ce qui t’a amenée jusqu’à cette mission en France ?

Au Togo, je me suis toujours activement investie dans des initiatives communautaires, en particulier auprès de jeunes, de femmes et de personnes en situation de handicap. J’ai par exemple coordonné le projet Girls 4 Peace Initiative, un projet de l’Association internationale des femmes et jeunes leaders, promouvant la paix, la résolution des conflits, la médiation et le dialogue interreligieux auprès des jeunes filles. J’ai également été volontaire de compétence de l’ANVT auprès de France Volontaires sur le dispositif de l’aéroport.

Mon engagement au sein de France Volontaires, de l’AIFJL, mais aussi du Réseau des ONG Internationales au Togo (RONGITO) et d’autres réseaux associatifs témoigne de ma capacité à allier action de terrain, communication et leadership collaboratif.

Pourquoi as-tu choisi de t’engager dans une mission de volontariat à l’étranger ?

Orpheline très jeune, j’ai grandi dans une situation de grande vulnérabilité. Cette expérience personnelle m’a profondément marquée, en me faisant prendre conscience de la fragilité de certaines vies, mais aussi de combien de fois l’aide, qu’elle soit humaine, sociale ou juridique, peut transformer une vie. J’ai choisi de m’engager comme volontaire parce que je crois profondément en la valeur de l’entraide, du service et de l’impact humain. Pour moi, le volontariat est bien plus qu’un simple engagement ponctuel : c’est une manière d’agir concrètement pour répondre aux besoins des autres, de me rendre utile et de contribuer à des transformations durables, à échelle humaine.

Cet engagement m’a permis d’aller à la rencontre de personnes très différentes de moi, de sortir de ma zone de confort et de mieux comprendre les réalités sociales, qu’elles soient au Togo ou ici en France. À L’Arche, par exemple, accompagner des personnes en situation de handicap mental m’a appris l’humilité, l’écoute, la patience et la force du lien humain.

Je vois le volontariat comme une école de la vie, mais aussi comme un tremplin vers mon projet professionnel : piloter des projets de développement et d’inclusion sociale, en mettant l’humain au cœur de chaque action.

© Communauté de l’Arche de Clermont-Ferrand.

À quoi ressemble ton quotidien à L’Arche de Clermont-Ferrand ?

Au sein de L’Arche de Clermont-Ferrand, je suis engagée comme volontaire de solidarité internationale depuis janvier 2024. Ma mission principale consiste à accompagner au quotidien des personnes en situation de handicap mental vivant en communauté. C’est une mission à la fois humaine, relationnelle et concrète.

Je participe à la vie partagée dans la maisonnée : cela inclut l’aide dans les gestes de la vie quotidienne (douche, repas, déplacements, loisirs), mais surtout la création d’un lien de confiance et de bienveillance avec les personnes accueillies. Aussi, j’accompagne et anime des activités d’intérieur (dessin, cuisine, jeux de société, peinture, coloriage) et d’extérieur (piscine, shopping, prendre un café, participer à leurs activités hebdomadaires) pour ces personnes. Ma mission est également de veiller à l’engagement et au bien-être des personnes accompagnées lors des activités.

En parallèle, je collabore avec les membres de l’équipe éducative et les volontaires pour réfléchir à des projets de groupe et des projets personnalisés, dans un esprit de respect mutuel, de joie et de partage. C’est une expérience très riche, qui me permet de développer mes compétences humaines, mais aussi ma capacité d’adaptation, de travail en équipe et d’écoute profonde.

"Vivre à L’Arche m’a rappelé combien les gestes simples – écouter, célébrer, partager – peuvent avoir un impact immense sur le cœur des gens."

Quel est le moment le plus fort que tu as vécu depuis le début de ta mission ?

À L’Arche, tous les moments, qu’ils soient petits ou grands, sont exceptionnels. J’y ai vécu de très grands moments, pleins d’émotions et de reconnaissance. Un simple « Merci pour le repas » ou le fait de voir un visage s’illuminer après une activité ; ce constituent des récompenses et je ne pense pas les oublier de sitôt.

Vivre à L’Arche m’a rappelé combien les gestes simples – écouter, célébrer, partager – peuvent avoir un impact immense sur le cœur des gens. C’est la force de la vie communautaire, du lien humain sincère et du sentiment d’appartenance, qui sont au centre de la mission de L’Arche. Mon passage là-bas est un souvenir que je garde précieusement, car il résume ce que j’étais venue chercher : une expérience humaine vraie, fondée sur la joie et le respect de chacun.

Qu’est-ce qui a été le plus difficile à gérer dans ton engagement à L’Arche ?

Ma plus grande difficulté a été l’adaptation aux besoins spécifiques de chaque personne accompagnée, surtout au début. En effet, j’ai participé à l’ouverture des nouveaux locaux au centre-ville de Clermont-Ferrand, à Monanges. Avec la nouvelle maisonnée, il y a eu de nouvelles personnes accueillies à L’Arche, et celles-ci n’avaient pas l’habitude de la vie en communauté que L’Arche propose. Ainsi, chaque nouveau résident a sa propre manière de communiquer, ses habitudes, ses sensibilités, et il a fallu beaucoup d’observation, de patience et d’écoute pour apprendre à interagir avec respect et efficacité.

Il m’est arrivé de me sentir démunie face à certaines réactions ou situations émotionnelles fortes. Mais avec l’accompagnement de l’équipe, les formations internes et surtout le lien de confiance qui s’est construit avec les résidents, j’ai pu dépasser cette difficulté. Aujourd’hui, je considère ces moments comme une opportunité de croissance personnelle : elle m’a permis de développer une vraie intelligence relationnelle et de mieux comprendre la richesse de la différence.

© Communauté de l’Arche de Clermont-Ferrand.

Qu’est-ce que cette expérience t’a appris sur toi-même, et qu’as-tu pu transmettre aux autres ?

Durant mon expérience à L’Arche, j’ai beaucoup appris sur le vivre-ensemble, la valeur de la présence humaine et l’importance de la patience et de l’écoute active. J’ai découvert que l’accompagnement ne repose pas seulement sur des compétences techniques, mais surtout sur la qualité du lien qu’on crée avec les personnes. J’ai aussi appris à mieux me connaître, à gérer mes émotions, et à travailler dans un cadre collectif interculturel et exigeant.

Ce que j’ai transmis, c’est ma bonne humeur, ma disponibilité et mon énergie positive au quotidien. J’ai aussi partagé des compétences organisationnelles dans la mise en place d’activités et j’ai contribué à créer un climat de confiance et de respect mutuel, où chacun se sentait écouté et valorisé.

"Ma mission à L’Arche a profondément transformé ma vision du volontariat et du travail. Elle m’a montré que travailler, ce n’est pas seulement accomplir des tâches, mais aussi créer du lien, apporter du sens et évoluer humainement"

Ta vision de l’engagement a-t-elle changé depuis que tu es volontaire ?

Ma mission à L’Arche a profondément transformé ma vision du volontariat et du travail. Elle m’a montré que travailler, ce n’est pas seulement accomplir des tâches, mais aussi créer du lien, apporter du sens et évoluer humainement. Le volontariat m’a appris que la vraie richesse d’un engagement, ce sont les relations humaines sincères, la solidarité au quotidien et la capacité à se rendre présent, simplement.

Cela m’a également donné une nouvelle perspective sur le travail : je souhaite désormais m’orienter vers des projets qui ont une utilité sociale et un impact durable. Je recherche un environnement professionnel où les valeurs comptent autant que les résultats, et où l’on travaille non pas pour les autres, mais avec eux. En ce sens, le volontariat a renforcé mon envie de m’engager dans un parcours à la croisée de l’humain, de la gestion de projet et du développement durable.

Quels sont tes projets après cette mission ?

Ma mission m’a apporté une maturité personnelle et professionnelle qui a profondément façonné ma vision du métier de juriste. Être au plus près des réalités humaines m’a permis de mieux comprendre l’impact concret du droit dans la vie des individus et des structures, et de développer des qualités indispensables à la pratique juridique : sens de l’écoute, gestion des situations sensibles, rigueur dans l’application des règles et capacité d’adaptation.

Cette expérience a encore plus renforcé ma volonté de m’engager dans un environnement où le droit est au service de l’humain, de la structure et de la performance. C’est dans cette continuité que je souhaite évoluer aujourd’hui dans un master de droit des personnes vulnérables, et je souhaite, en parallèle de mes études, mettre mes compétences juridiques au service d’une organisation structurée et exigeante, où je pourrai continuer à apprendre, à contribuer et à évoluer.

* Sources : INSEE, Haute Autorité de Santé (HAS), Fédération nationale des associations gestionnaires au service des personnes handicapées (FEHAP), et Stratégie nationale 2023-2027 pour les personnes en situation de handicap portée par le ministère des Solidarités.

Le volontariat international et le handicap

De nombreux volontaires internationaux s’engagent auprès de structures accueillant des personnes en situation de handicap. En 2023, France Volontaires recensait près de 200 missions dans le domaine de la santé, dont certaines impliquant directement ou indirectement des actions pour l’inclusion des personnes en situation de handicap, en France comme à l’étranger, dans le cadre d’un volontariat de solidarité internationale. Ces missions permettent de croiser les regards, d’enrichir les pratiques, et de promouvoir une solidarité concrète et réciproque. Elles s’inscrivent dans les priorités portées par l’ONU et l’Agenda 2030, notamment l’objectif n°10 sur la réduction des inégalités.

Bio express

Essotolom Charlotte Kinao, est engagée dans les domaines des droits de l’Homme, de l’autonomisation de la femme, de la solidarité, du développement durable et de l'inclusion sociale depuis 2019. Originaire du Togo, elle est titulaire d’une licence fondamentale en droit privé des affaires. Volontaire de solidarité internationale à L’Arche de Clermont-Ferrand, elle accompagne au quotidien des personnes en situation de handicap mental, en favorisant leur autonomie et leur bien-être à travers des activités inclusives.
Essotolom Charlotte Kinao
Volontaire de solidarité internationale

La structure d'accueil

Implantée entre Chamalières et le centre-ville de Clermont-Ferrand, L’Arche est une communauté de vie partagée entre personnes avec et sans handicap mental. Fondée en 2014 à l’initiative de familles locales, elle rassemble aujourd’hui une soixantaine de personnes autour d’un projet fondé sur la relation, la bienveillance et la réciprocité. La communauté est composée de plusieurs maisons de vie, d’un atelier de jour et d’un café solidaire – le Café des sourires – installé dans l’ancien groupe scolaire Monanges. Chaque jour, les membres partagent des activités de travail, de création, des repas et des temps de lien dans un esprit d’inclusion.

Bien dans sa mission : un accompagnement psychique tout au long du volontariat

 © Emma Simpson / Unsplash

Alors que la santé mentale a été proclamée Grande cause nationale 2025, les acteurs de la solidarité internationale s’adaptent aux réalités psychiques des jeunes (et moins jeunes) qui partent en mission. France Volontaires met en place un accompagnement spécifique, dès la préparation au départ.

En 2025, la santé mentale a été érigée en Grande Cause nationale, faisant d’elle un enjeu de société à part entière. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon l’Assurance maladie, un Français sur quatre sera confronté à un trouble psychique au cours de sa vie, et près de 23 % estiment ne pas prendre suffisamment soin de leur santé mentale, une tendance encore plus marquée chez les jeunes de 18 à 24 ans. Le monde du travail n’est pas épargné, avec un salarié sur quatre se déclarant en mauvaise santé mentale. Dans ce contexte, le volontariat international, avec ses bouleversements culturels, ses éloignements familiaux et ses ruptures de repères, constitue un terrain particulièrement sensible.

Santé mentale des jeunes : un défi dans les missions de solidarité internationale

Face à ces constats, France Volontaires a choisi de mettre le bien-être de ses volontaires au cœur de sa stratégie d’accompagnement. « Nous avons décidé de mettre en place un module de formation sur ces questions lors des stages de préparation au départ », explique Elena Popescu, chargée de mission formations et développement d’outils pédagogiques chez France Volontaires. Objectif : renforcer les capacités des organisations d’accueil participantes dans le domaine du mentorat, en mettant l’accent sur  le harcèlement et les violences sexuelles et les questions de genre.

« On essaie de leur expliquer ce qu’est le bien-être en mission, le « continuum de la santé mentale » … tout au long de de sa vie on vacille entre des moments où tout va bien et d’autres où l’on est confronté à la maladie ou au deuil » complète Caroline Bouclet, référente psychosociale au sein de l’organisation.

« Nous avons décidé de mettre en place un module de formation sur ces questions lors des stages de préparation au départ »

Elena Popescu, chargée de mission formations et développement d’outils pédagogiques chez France Volontaires

Les volontaires sont alors invités à identifier leurs points de stress, à se projeter dans leur futur environnement et à identifier les points qui pourraient potentiellement être un facteur d’inquiétude une fois sur le terrain. Sur place, ils ne sont pas laissés seuls pour autant : en cas de difficulté, un réseau de référents, de responsables nationaux et, au besoin, de psychologues est mobilisé. Caroline Bouclet, depuis le siège de France Volontaires, peut alors assurer une « première écoute active » pour proposer, selon les cas, des groupes de pairs, des relais associatifs ou un accompagnement psychologique personnalisé.

« On a envie de sensibiliser mais sans leur faire peur », insiste Elena Popescu. « Le message, c’est que la santé mentale n’est pas de l’anormalité. Faites-vous aider quand il y a besoin, ne restez pas seul. Venez vers nous, on est là pour ça ! »

Le difficile retour d’un volontaire

Ce cadre d’accompagnement, à la fois préventif et bienveillant, prend tout son sens lorsqu’on écoute les volontaires eux-mêmes. Le parcours de Romain, de retour après deux ans de mission à Vanuatu, illustre avec justesse les bouleversements intérieurs auxquels peuvent être confrontés les jeunes en mobilité, mais aussi les ressources qu’ils apprennent à mobiliser. Dans son rapport de fin de mission, il écrit ainsi : « Mon retour en France après cette expérience d’expatriation suscite chez moi un certain nombre d’appréhensions et de préoccupations profondes. […] Je redoute de devoir réapprendre à vivre en phase avec la réalité française, comme si je devais m’y insérer à nouveau après en avoir été éloigné.»

Pour Romain, la rupture est à la fois affective, sociale et professionnelle : « Cela implique de faire le deuil de cette expérience unique, mais aussi de dire au revoir aux personnes que j’ai rencontrées, celles avec lesquelles j’ai noué des liens forts et qui ont laissé une empreinte indélébile dans mon parcours personnel. »

Et pourtant, l’expérience n’est pas qu’une épreuve. Elle devient même un révélateur :
« J’ai compris que, quel que soit le contexte, il est possible de se réinventer. […] Lors de moments de stress ou d’angoisse, j’ai appris à me recentrer, à puiser dans mes ressources intérieures pour garder mon calme et trouver des solutions. »

 © Christophe Lemercie / Unsplash

Des outils pédagogiques pour mieux vivre sa mission à l’international

Le suivi des volontaires ne s’arrête pas à la fin de la mission. Des entretiens de retour, des stages post-mission et l’analyse des rapports – comme celui de Romain – permettent d’identifier des troubles parfois passés sous silence pendant la mission. Pour les situations les plus sensibles, un accompagnement psychologique est proposé, dans la continuité du dispositif mis en place sur le terrain.

Les mots de Romain résonnent alors comme un appel à considérer la mission de volontariat pour ce qu’elle est aussi : une aventure intérieure. « L’éloignement constitue une rupture avec nos repères traditionnels et nous pousse à évoluer dans une nouvelle “bulle” de vie. » Un isolement que France Volontaires s’efforce de ne pas laisser s’installer dans le silence.

Des étudiants en médecine font naître une volière en Amazonie péruvienne

 © @CREA y Projet Colibrí

Six étudiants en médecine de Lille, membres de l’association La Goutte d’Eau, ont monté de A à Z un projet de solidarité internationale au Pérou. Après deux ans de préparation, leur « Projet Colibri » a vu le jour à Iquitos, au cœur de la forêt amazonienne, avec la création d’une volière de réhabilitation pour oiseaux sauvages, construite avec leurs homologues péruviens.

Ils sont en deuxième année à l’Université de médecine à Lille, n’ont aucune formation en construction ni en protection de l’environnement, mais une même conviction : celle que leur parcours universitaire pouvait aussi rimer avec engagement solidaire. Membres de l’association étudiante La Goutte d’Eau, qui propose chaque année à des étudiants de monter des projets de solidarité en France ou à l’étranger, six futurs soignants ont été sélectionnés pour lancer un chantier international. Leur mission ? Imaginer, financer et concrétiser un projet à impact. Ce sera au Pérou, dans la forêt amazonienne, avec la création d’une volière de réhabilitation pour oiseaux sauvages. Le Projet Colibri est né.

 © @CREA y Projet Colibrí

Sa singularité ? Un cycle de deux ans : « On est parti de rien et on a tout dû construire de A à Z : trouver un partenaire local, autofinancer le projet, chercher des bourses, coordonner la logistique… », raconte Wandrille Spriet, 19 ans, qui a monté le projet avec ses cinq comparses*. Le groupe contacte alors France Volontaires au Pérou, qui les oriente vers le Centro de Rescate Amazónico (CREA), un centre spécialisé dans le soin et la réhabilitation d’animaux sauvages. Très vite, le lien est établi. CREA propose alors un projet concret : construire une volière de réinsertion pour oiseaux rescapés du trafic illégal. Les six futurs volontaires sont conquis.

Volontariat international étudiant : un projet de solidarité né à la fac de médecine

Le chantier est ambitieux : une volière destinée à accueillir 21 espèces d’oiseaux amazoniens victimes de braconnage, de trafic ou de captivité illégale. Ces oiseaux, remis aux soins de CREA par les autorités locales, doivent retrouver un espace leur permettant de se remuscler, se nourrir et évoluer dans un environnement proche de leur habitat naturel. « On savait qu’il y avait à faire. On avait envoyé les fonds en février pour que des professionnels construisent la structure, parce qu’évidemment, on n’a pas de formation dans le domaine », précise Wandrille. « Nous, on devait faire l’aménagement intérieur : planter des arbres, installer des perchoirs, recréer une ambiance de forêt ».

Sur place, les six Lillois rejoignent un groupe de sept étudiants de l’Université nationale de l’Amazonie péruvienne, avec qui ils collaborent au quotidien. La dynamique est immédiate. Les jeunes Français découvrent Iquitos, ville située aux portes de l’Amazonie, à mille lieues des circuits touristiques. « Les locaux sont extrêmement accueillants. On ne croise pas souvent de Français là-bas. Ils nous ont montré où faire nos courses, comment se déplacer. L’accueil était top », sourit Wandrille.

 © @CREA y Projet Colibrí

Après deux ans de préparation, le chantier dure deux semaines, à la fin du mois de juin 2025. Quinze jours intenses où se conjuguent efforts physiques, choc culturel et émerveillement. Les membres du groupe, qui ne se connaissaient pas au départ, réalisent à quel point ces vingt-quatre mois de préparation ont soudé leur cohésion. « L’avantage du projet en deux ans, c’est qu’on a le temps de se connaître et de prévoir. On savait exactement comment ça allait se passer, même au niveau de la nourriture, des allergies… », raconte Wandrille. À leur retour en France, les jeunes prennent la mesure de l’impact de cette expérience : « Ça met une claque. Rien que le fait de pouvoir mettre la brosse à dents sous le robinet prend une autre valeur. »

Protection de la biodiversité amazonienne : une expérience humaine et écologique marquante

Le Projet Colibri, au-delà de son utilité écologique – offrir une seconde chance à des oiseaux sauvages – a aussi ouvert la voie à d’autres vocations. Wandrille, encore étudiant, se projette déjà : « Une fois que j’aurai mon diplôme de médecin, j’aimerais bien repartir, cette fois dans le domaine médical. » Mieux encore, CREA et La Goutte d’Eau ont convenu de reconduire le partenariat. Une nouvelle équipe de six étudiants prendra la relève en 2026, pour faire vivre cette volière et peut-être en imaginer d’autres.

* Virgile Bertin, Agathe Coze, Justine Juanchich, Maeva Landsheere et Léna Strus

Regardez le reportage sur le projet Colibri (en espagnol)

Le CREA, un sanctuaire pour la faune amazonienne

Le Centre de Rescate Amazónico (CREA), à Iquitos, œuvre depuis plus de dix ans pour la conservation de la faune sauvage. Emblème de son action, le lamantin amazonien est passé du statut d’espèce méconnue à celui de symbole de protection de la biodiversité. Résultat : le trafic de lamantins dans la ville a été réduit à zéro. En tout, 70 lamantins ont été sauvés, dont 33 relâchés dans des réserves naturelles. Le CREA prend aussi soin de tortues, oiseaux, caïmans ou paresseux. Il mène des actions d’éducation (200 000 personnes sensibilisées) et développe un écotourisme responsable. Il a été sélectionné pour accueillir un VSI dans le cadre du projet V-Amazonie de France Volontaires.

Les partenaires d’un chantier de volontariat exemplaire

Le Projet Colibri a été rendu possible grâce à la synergie de plusieurs acteurs :

La Goutte d’Eau, association de l’Université de Médecine de Lille, initiatrice du projet.
France Volontaires – Espace Volontariats Pérou, qui a assuré l’orientation, la mise en relation et le suivi.
CREA – Centro de Rescate Amazónico, structure péruvienne d’accueil et partenaire opérationnel.
L’Université nationale de l’Amazonie Péruvienne (UNAP), dont sept étudiants ont collaboré au chantier.
Le FONJEP, via le dispositif JSI-VVVSI, qui a attribué une bourse de 10 000 euros au projet, avec l’appui de l’Ambassade de France au Pérou.

Six différences entre le Volontariat international d’échange et de solidarité (VIES) et le Volontariat en entreprise (VIE) 

© Jason Goodman / Unsplash

Le sigle peut prêter à confusion : V.I.E.S, VIE… Pourtant, ces deux formes d’engagement à l’international n’ont ni les mêmes objectifs, ni les mêmes publics, ni les mêmes modalités.

Alors que le Volontariat en entreprise (VIE) s’inscrit dans une logique de développement économique et commercial des entreprises françaises à l’étranger, le Volontariat international d’échange et de solidarité (V.I.E.S) place la coopération, la solidarité et l’intérêt général au cœur des missions. Décryptage en six points pour y voir plus clair !

1. L’objectif : développement commercial ou solidarité internationale ?

Le VIE est un dispositif de l’État français géré par Business France, qui permet à une entreprise ou à une administration française de confier une mission à l’étranger à un ou une jeune de 18 à 28 ans. L’objectif est clair : appuyer l’internationalisation des entreprises françaises, développer des marchés ou encore faire rayonner le savoir-faire français.

Le V.I.E.S, quant à lui, regroupe différents dispositifs de volontariat centrés sur la solidarité internationale, comme le Volontariat de solidarité internationale (VSI), le Service civique à l’international, le Volontariat d’échange et de compétences (VEC), etc. Ici, pas de logique commerciale, mais une mission d’intérêt général construite avec les partenaires du pays d’accueil, pour renforcer les capacités locales, agir sur des enjeux sociaux, environnementaux, culturels ou éducatifs.

2. Le statut : salarié ou volontaire ?

Les volontaires en VIE ont un statut juridique bien spécifique, celui de « volontaire international en entreprise ». Ce ne sont pas des salariés, mais ils perçoivent une indemnité forfaitaire, sont rattachés à une entreprise (ou une administration dans le cas du VIA), et bénéficient d’un encadrement professionnel très proche du monde de l’entreprise.

Dans le cadre du V.I.E.S, le statut dépend du dispositif. Les volontaires en VSI, par exemple, ne sont ni salariés ni stagiaires : ils ont un statut propre, défini par la loi de 2005, et reçoivent une indemnité pour vivre décemment dans le pays d’accueil et se consacrer ainsi pleinement à la mission. Les volontaires en Service Civique ont, eux aussi, un statut dédié, et sont engagés dans des missions éducatives, sociales ou environnementales.

© France Volontaires

3. L’âge : une barrière dans le VIE, une ouverture dans le V.I.E.S

Autre différence de taille : l’âge. Le Volontariat international en entreprise (VIE) est strictement réservé aux jeunes de 18 à 28 ans, sans dérogation possible. Passé cet âge, il n’est plus possible d’y prétendre.

Si certains dispositifs du V.I.E.S sont également soumis à une limite d’âge, comme le Service Civique international limité à 25 ans et 30 ans pour les jeunes en situation de handicap le Volontariat de solidarité internationale (VSI) est quant à lui ouvert à toutes et tous à partir de 18 ans mais sans limite supérieure. Un véritable atout pour les personnes en reconversion, en transition de carrière ou retraitées, qui souhaitent mettre leurs compétences au service de l’intérêt général et de projets solidaires. Le Volontariat d’échange et de compétences (VEC), ou le volontariat seniors permettent également de s’engager dans des missions quel que soit le moment de sa vie.

4. La durée et le profil des missions : des écarts notables

Un VIE peut durer de 6 à 24 mois. Il est majoritairement occupé par des jeunes diplômés de niveau Bac+5, dans des secteurs comme le commerce, la finance, l’ingénierie ou encore le marketing international. La mission s’intègre souvent dans un parcours professionnel structuré, et peut déboucher sur une embauche dans l’entreprise.

Les missions de V.I.E.S sont très variées : appui à des projets éducatifs, développement local, agriculture durable, préservation de la biodiversité, inclusion sociale, etc. Certaines requièrent des compétences spécifiques, d’autres sont accessibles sans qualification particulière, notamment dans le cadre du Service Civique ou des chantiers de solidarité. La durée des missions va de quelques semaines à plusieurs années selon les dispositifs.

5. L’ancrage local : un partenariat avec les acteurs locaux

C’est l’un des grands principes du V.I.E.S : les missions sont co-construites avec les partenaires des pays bénéficiaires de l’aide publique au développement (APD) de la France, souvent des associations ou des collectivités locales, pour répondre à des besoins identifiés sur le terrain. Cette logique de partenariat équitable est au cœur du volontariat de solidarité, qui vise à renforcer les capacités locales plutôt qu’à imposer des solutions extérieures.

Dans le cadre du VIE, l’ancrage local est plus dépendant de la stratégie de l’entreprise ou de l’administration qui accueille le ou la volontaire. L’objectif premier reste l’activité de la structure française, et l’attractivité économique de la France à l’international, même si certaines missions peuvent avoir un impact bénéfique sur le tissu économique local.

6. La finalité : s'engager se projeter professionnellement ?

Faire un VIE, c’est souvent envisager une carrière dans l’entreprise ou dans le secteur privé. C’est une expérience professionnelle valorisée sur un CV, dans un cadre sécurisé, avec des perspectives d’embauche.

Le V.I.E.S, lui, permet avant tout de s’engager dans une démarche citoyenne, de découvrir des réalités différentes, de contribuer à des projets porteurs de sens. Cela n’exclut pas un parcours professionnalisant : beaucoup d’anciens volontaires mettent à profit leur mission pour trouver un emploi dans le domaine de la solidarité internationale, de la coopération ou à la transition écologique et sociale.

Deux formes de volontariat, deux logiques différentes

mais un même point commun : partir à l’étranger, vivre une expérience forte et élargir ses horizons.
À vous de choisir celle qui vous correspond le mieux !

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© France Volontaires

À Boffa, la pêche artisanale face au défi de la préservation 

© Lola Ortega

La petite ville de Boffa, en Guinée, fait l’objet d’un ambitieux programme de modernisation : le projet de développement durable de la pêche Artisanale (P2DPA), mené par Charente-Maritime Coopération et la préfecture locale, s’attaque à la précarité de la filière halieutique. Sur le terrain, des volontaires comme Lola Ortega accompagnent les pêcheurs dans un contexte fragilisé par l’intrusion croissante de l’industrie minière.

Boffa, quatre heures de piste cahoteuse au nord de Conakry, s’étire sur les rives de la rivière Katala, au cœur d’un vaste estuaire bordé de mangroves. Ici, la pêche artisanale est une affaire de survie autant que de tradition. Mais dans les années 2010, la filière  a souffert d’un manque criant d’infrastructures : absence de digue pour faciliter le débarquement, pas d’adduction d’eau ni de latrines sur le port, aucun système de conservation réfrigéré, et des équipements de séchage ou de navigation largement inadaptés aux besoins.

C’est dans ce contexte qu’en 2019, la coopération décentralisée entre le Département de la Charente-Maritime (via Charentre-Maritime Coopération) et la ville de Boffa – active depuis 1992 – permet de se doter d’un nouvel outil : le projet de développement durable de la pêche artisanale (P2DPA), cofinancé à hauteur de 1,58 million d’euros, dont un million via l’Agence française de développement (AFD).

Une digue entre deux mondes

Quelques années plus tard, les infrastructures sont là, avec, entre autres, le port de Boffa flambant neuf et un débarcadère équipé d’une digue à Walia, un village situé à proximité de Boffa. « C’est essentiel pour les populations insulaires, qui devaient auparavant attendre la marée basse ou haute pour accoster. Maintenant, tout est plus fluide », explique Lola Ortega, volontaire de solidarité internationale (VSI) envoyée par Charente-Maritime Coopération entre janvier 2023 et juin 2024.

La jeune diplômée en économie du développement a rejoint le projet en fin de cycle, avec une mission de terrain : former, sensibiliser, structurer. « On a beaucoup travaillé sur la cogestion du port avec les pêcheurs et les femmes transformatrices. Un comité local a été mis en place pour gérer les conflits, organiser les taxes, représenter toutes les parties. C’est eux qui tiennent la barre maintenant. »

Grâce à ce projet, les acteurs de la filière pêche ont pu bénéficier de formations en gestion durable de la ressource halieutique et concernant les bonnes pratiques sanitaires. © Lola Ortega

Le P2DPA ne s’est pas contenté de verser du béton. Avec l’appui d’experts de Charente Maritime Coopération, il a organisé des formations sur l’hygiène, la gestion des infrastructures, la réglementation de la pêche et même l’alphabétisation des femmes. Un effort global, qui touche toutes les étapes de la filière : des armateurs qui possèdent les pirogues aux femmes qui fument et vendent le poisson dans les villages.

De la barque au marché, toute une chaîne à repenser

Nicolas Dubois, directeur du port de la Cotinière, sur l’île d’Oléron, a quant à lui participé aux séances de formation organisées à Boffa en janvier 2023 : « Apporter son expertise à l’international dans mon secteur de la pêche est un grand enrichissement personnel, cela m’a permis de projeter le modèle économique artisanal récent de la Cotinière, et de montrer aux bénéficiaires de la formation que les modèles coopératifs, les services facturés acceptés par les oléronais pêcheurs, acheteurs, ont permis une croissance et une dynamique fortes à la Cotinière ».

Mais dans l’ombre des filets tendus et des comités de cogestion, une autre réalité menace. Depuis deux ans, les eaux de Boffa ne sont plus aussi poissonneuses : l’exploitation de minerais s’est en effet intensifiée ces dernières années. Des barges gigantesques draguent les fonds, parfois sans se soucier des zones de pêche traditionnelles. Résultat : les ressources halieutiques s’effondrent, l’économie locale tangue. « C’est toute une chaîne qui est impactée. Les femmes ne peuvent plus sécher du poisson qu’elles n’ont pas. Les familles perdent leur seul revenu. C’est grave, et pourtant, peu de gens en parlent », alerte la VSI : « L’extraction en mer pollue, détruit les fonds marins. Les pêcheurs reviennent les mains vides. Certains n’osent même plus sortir leurs barques. »

"On a travaillé sur la cogestion du port avec les pêcheurs et les femmes transformatrices. Un comité local a été mis en place pour gérer les conflits, organiser les taxes, représenter toutes les parties."

Dans les derniers mois du projet, une partie des fonds restants a été réaffectée à des actions d’urgence: sensibilisation à la diversification des revenus, mise en place de microprojets alternatifs. «Ce n’était pas prévu dans le plan initial, mais on ne pouvait pas fermer les yeux. Il faut une suite, une réponse politique à cette destruction silencieuse », insiste Lola Ortega.

Le projet P2DPA s’est terminé officiellement en 2024, mais ses héritiers, eux, sont bien là : un port structuré, un comité en place, des professionnels formés. Reste à savoir si ces acquis survivront au rouleau compresseur de l’extraction minière. À Boffa, comme ailleurs, la mer reste un bien commun précieux, et les acteurs locaux, soutenus par des projets engagés, montrent déjà la voie d’une gestion durable et solidaire.

Le projet P2DPA en chiffres

  • 1 583 000 €
    C’est le budget total du projet P2DPA sur trois ans, dont un million financé par l’AFD via le dispositif FICOL. Un montant qui a permis de financer à la fois les infrastructures (port, marché, débarcadère) et les formations des acteurs de la filière pêche.
  • 6 000 bénéficiaires directs
    Estimation du nombre de personnes ayant directement profité des infrastructures sanitaires et d’accès à l’eau créées à Boffa, notamment autour du port, du marché et du débarcadère de Walia.
  • 3 infrastructures majeures
    Le port de Boffa a été réhabilité, un marché moderne construit en centre-ville et un débarcadère aménagé à Walia avec une digue permettant d’accoster à toute heure, facilitant les échanges entre les îles et le continent.
  • 1 comité local de cogestion
    Créé pour garantir une gestion participative du port, ce comité rassemble pêcheurs, femmes transformatrices et autorités locales. Il gère les taxes, les conflits, et assure la pérennité des actions après le retrait du projet.

 © Lola Ortega

De Nice à Boffa, un engagement global pour les océans

La troisième Conférence des Nations unies sur l’Océan (UNOC 3), qui s’est tenue à Nice en juin 2025 et à laquelle France Volontaires a activement participé, a rassemblé plus de 170 pays pour renforcer la protection des océans face aux menaces croissantes. Parmi les avancées, la ratification du Traité sur la haute mer et un engagement fort contre la pollution plastique ont marqué cette rencontre. Ces initiatives internationales rejoignent les projets locaux comme celui de Boffa, en Guinée, où la coopération entre la Charente-Maritime et la communauté locale modernise la pêche artisanale. Cette alliance entre actions globales et efforts de terrain est essentielle pour préserver durablement nos océans.

Bio express

Lola Ortega est diplômée d’un master en Conception et Ingénierie de projets de développement à l’Université de Bordeaux. Elle s’est très tôt engagée dans des projets mêlant environnement, gouvernance locale et solidarité internationale. Après un premier stage à l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre Maroc (AESVT), elle enchaîne avec un Service civique chez Initiative Développement puis en tant que VSI, en Guinée, où elle pilote le projet de développement durable de la pêche artisanale avec Charente-Maritime Coopération. Elle coordonne aujourd’hui des projets environnementaux et de résilience communautaire portés par l’AESVT Maroc.
Lola Ortega
Volontaire de solidarité internationale

 © Photo : Bandjan Doumbouya

 © Lola Ortega

L’eau, trésor de Luang Prabang : une coopération décentralisée face aux défis climatiques 

© Colin Roe / Unsplash

Entre montagnes et patrimoine classé, Luang Prabang, au Laos, fait face à des défis environnementaux croissants. Sécheresses prolongées, tensions sur les ressources, pression urbaine : dans ce décor fragile, deux projets portés par des ONG, la Région Centre-Val de Loire et les autorités sanitaires laotiennes dessinent une réponse collective aux enjeux de l’eau. Vincent Capron, volontaire de solidarité internationale, accompagne ces actions sur le terrain.

Il faut parfois remonter à la source — au sens propre — pour comprendre les enjeux de l’accès à l’eau dans la province montagneuse de Luang Prabang, au nord du Laos. Depuis 2019, l’association Confluence, en partenariat avec la Région Centre-Val de Loire et avec l’aide du département de la santé de la Province, y déploie le programme DearWater. Construit en deux phases, ce projet vise à améliorer durablement l’accès à l’eau potable dans des villages reculés, en s’appuyant sur une démarche participative.

Des réseaux d’eau au cœur des villages

« C’est un projet de construction de réseaux d’eau potable, mais pas seulement », explique Vincent Capron, volontaire de solidarité internationale (VSI) détaché auprès de la région. « Les communautés rurales sont impliquées pendant presque un an, du diagnostic jusqu’à la formation d’un comité de gestion. » Une gouvernance locale de l’eau s’organise autour des sources, souvent situées en forêt, et dont la préservation devient essentielle.

Le contexte géographique — zones montagneuses, villages dispersés — rend l’intervention des services publics difficile. Ce sont donc les communautés qui, avec l’appui de l’ONG franco-laotienne Confluence, construisent les réseaux, apprennent à les entretenir, mais surtout, s’interrogent collectivement sur leur gestion. « Chaque foyer paie désormais pour son accès à l’eau, ce qui est assez neuf au Laos. Il faut alors accompagner l’acceptation de ce changement. Ce sont les villageois qui nous disent ce qu’ils attendent de ce nouveau service. »

La phase 1 de DearWater, menée entre 2019 et 2022, a permis la construction de douze réseaux, permettant un accès sécurisé à l’eau à près de 5 000 habitants. La phase 2, en cours depuis 2023, entend étendre cette démarche à d’autres zones rurales, en accentuant la dimension de capitalisation et de résilience climatique. Car l’urgence est là.

A Luang Prabang, au centre du Laos, une quinzaine de mares urbaines, vestiges d’un ancien système hydraulique traditionnel, font l’objet d’une réhabilitation. © CJ / Unsplash

« Le changement climatique assèche les sources, c’est visible ici : les saisons des pluies sont plus capricieuses, les saisons sèches plus longues. Les communautés, très autonomes, le perçoivent très bien. » À cette variabilité naturelle s’ajoutent des pratiques agricoles gourmandes en eau, comme la culture de l’hévéa encouragée par la demande chinoise. « Ce n’est pas toujours compatible avec un accès durable à l’eau potable », alerte Vincent.

Dans la ville classée, la mémoire des mares

À quelques kilomètres des montagnes, le cœur historique de Luang Prabang — inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO — abrite lui aussi des enjeux hydriques moins visibles mais tout aussi cruciaux. Au sein même de la ville, une quinzaine de mares urbaines, vestiges d’un ancien système hydraulique traditionnel, dépérissent lentement. L’association française GRET, active au Laos depuis plus de quinze ans, tente aujourd’hui de les sauver.

Le projet, soutenu par la Région Centre-Val de Loire dans le cadre de la coopération décentralisée, entend réhabiliter ces plans d’eau, menacés par l’abandon, la pollution, et l’emprise foncière galopante. « Ces mares sont exceptionnelles. Le GRET travaille à les préserver pour leur rôle écologique, mais aussi patrimonial et social », raconte Vincent. L’eau y joue un rôle d’amortisseur thermique, de régulateur naturel et de réservoir pour la biodiversité urbaine.

« Le changement climatique assèche les sources, c’est visible ici : les saisons des pluies sont plus capricieuses, les saisons sèches plus longues. Les communautés, le perçoivent très bien. »

Entre 2021 et 2024, six mares pilotes ont fait l’objet de diagnostics participatifs, de travaux de désenvasement, de plantations de végétation locale et d’actions de sensibilisation auprès des riverains. Le projet veut faire école : à travers des fiches techniques, des outils pédagogiques et une plateforme de suivi, il s’agit aussi de diffuser ces bonnes pratiques à d’autres villes du Laos confrontées aux mêmes défis.

« Mon rôle, ce n’est pas d’exécuter les projets, mais de suivre ce qui se fait, de tirer des leçons, de faire circuler l’info entre les acteurs. C’est aussi montrer que ce qui marche ici peut inspirer ailleurs. » Au fil des mois, Vincent documente, coordonne, rend compte.

Coopérer pour durer

Une mémoire du projet se constitue, d’autant plus précieuse que ce partenariat est appelé à durer. La coopération décentralisée entre la Région Centre-Val de Loire et la province de Luang Prabang remonte d’ailleurs à 2005. Elle s’est étoffée au fil des années, mêlant patrimoine, santé, éducation… et désormais écologie. C’est dans cette logique que les projets DearWater et Wise s’inscrivent, avec une ambition commune : répondre localement à des enjeux globaux.

« Ce travail permet de réfléchir à comment être acteur de ce débat public sur l’usage de l’eau », estime Vincent Capron. Et la Région Centre a, dans ce dialogue, sa carte à jouer. « Avec ses marais à Bourges ou dans la Brenne, la collectivité dispose d’une expertise, et dans le même temps, elle apprend aussi beaucoup ici. On est dans un échange, pas dans un transfert de modèle. »

De la source forestière au plan d’eau urbain, une même question traverse les projets : comment préserver l’environnement en conciliant usage, développement, et durabilité ? La réponse, à Luang Prabang, s’écrit à plusieurs mains — celles des ONG, des collectivités, des volontaires, et surtout des habitants eux-mêmes. « Il faut partir de ce que les gens savent déjà. C’est eux qui vivent les impacts du dérèglement. Le rôle du projet, c’est de les aider à structurer une réponse collective. »

À Luang Prabang, cette coopération illustre comment les territoires, en croisant leurs expériences, peuvent construire des réponses durables aux grands enjeux de notre siècle.

Bio express

Vincent Capron est diplômé de l'Université Lyon 3 où il s'est spécialisé en gestion de programmes internationaux. Il a effectué plusieurs stages dans des ONG et en collectivité, notamment à l’Assemblée des départements de France, où il a contribué à un atlas des actions internationales. En 2024, il s’engage comme volontaire de solidarité internationale au Laos. Il est alors chargé de l’appui au suivi et à la valorisation de deux projets environnementaux portés par des ONG et la Région Centre-Val de Loire dans la province de Luang Prabang.
Vincent Capron
Volontaire de solidarité internationale

Quand la Région Sud et le Costa Rica unissent leurs forces pour protéger les océans

© Frames for ypur heart Unsplash

Depuis plusieurs années, la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur tisse une collaboration singulière avec le Costa Rica autour d’un enjeu commun : la préservation des aires marines protégées. Un chantier aussi vital que fragile, auquel a contribué Gaël Alsiret, volontaire de solidarité internationale, témoin et acteur de cette coopération inédite qui est revenu de mission il y a quelques semaines.

San José, capitale nichée au cœur du Costa Rica, n’a rien d’une cité balnéaire. Pourtant, c’est bien là que Gaël Alsiret a posé ses valises pour une mission d’un an en tant que volontaire de solidarité internationale. À 29 ans, ce diplômé en géographie et relations internationales, passé par l’IRIS Sup’ et l’ambassade de France au Costa Rica, s’est vu confier une tâche à la croisée des politiques publiques et de la diplomatie environnementale : initier un projet de coopération sur la protection des aires marines protégées entre la Région Sud et le Costa Rica : « Pendant un an, j’ai été en charge de la gestion et du suivi de projets entre la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur et le Costa Rica, dans le domaine de l’environnement. J’ai amorcé un projet sur la protection des aires marines protégées » se remémore-t-il.

Une mer sous pression

L’enjeu est majeur. À l’heure où les océans subissent de plein fouet les effets du dérèglement climatique, les aires marines protégées apparaissent comme l’un des derniers remparts face à l’effondrement de la biodiversité. Elles couvrent environ 8 % des espaces maritimes mondiaux, bien loin de l’objectif de 30 % fixé par les instances internationales à l’horizon 2030. Plus qu’un outil de conservation, ces zones sont aussi des laboratoires d’adaptation au changement climatique, des refuges pour la faune marine, et des espaces d’expérimentation pour une gestion plus durable des ressources halieutiques.

Parmi les enjeux des aires marines protégées au Costa Rica : assurer la préservation des tortues de mer, menacées de chasse et de braconnage. © Pedro Novales / Unsplash

C’est justement cette vision partagée de la protection marine qui a rapproché la Région Sud et le Costa Rica. Dès 2021, un partenariat a été noué à travers le projet Duodiversité, orchestré notamment par le Parc national de Port-Cros. Sur le terrain, la mission de Gaël s’est concentrée sur la côte caraïbe du Costa Rica, au Parc national de Cahuita, couvrant une vaste aire protégée cogérée par l’État et les communautés autochtones locales, en plus de la zone terrestre. Une configuration rare qui appelle une gouvernance subtile. « On a pu échanger avec des communautés natives. L’aire marine protégée est cogérée : une entrée est sous la responsabilité du gouvernement, l’autre sous celle de la population locale. L’objectif était d’impliquer davantage ces communautés. »

Au fil de sa mission, Gaël a identifié des fragilités multiples : tourisme de masse, pêche intensive, espèces invasives, pollution agricole. Sans oublier les menaces silencieuses qui rongent les écosystèmes coralliens, comme le blanchissement des coraux ou la disparition progressive de certaines espèces emblématiques. « On est dans une zone où la population vit de la pêche. Il faut concilier l’économique et l’écologique. Les espèces invasives, le braconnage de la tortue, le blanchissement des coraux… ce sont des dangers bien réels », regrette-t-il.

L’écologie comme terrain d’échange

Si le Costa Rica est souvent érigé en modèle écologique, la réalité est plus contrastée. Certes, la politique de reforestation et d’agroforesterie est pionnière, mais d’autres pratiques viennent ternir le tableau. L’usage intensif de pesticides, les carences dans le traitement des déchets, et une sensibilisation encore inégale freinent les ambitions environnementales. Gaël confirme : « Le Costa Rica mène une vraie politique de reforestation. Mais c’est aussi le pays qui utilise le plus de pesticides au mètre carré. Cette pollution chimique se propage des champs à la mer. »

En novembre 2022, une délégation du Parc national du Corcovado, du Costa Rica, a été accueillie sur le territoire du Parc national de Port-Cros. © Bertrand Bordie / Unsplash 

Dans ce contexte, la coopération entre la Région Sud et le Costa Rica se veut réciproque. Il ne s’agit pas d’imposer un modèle mais bien de favoriser l’échange d’expériences, l’apprentissage mutuel. La création d’une chaire de recherche conjointe entre l’université du Costa Rica et l’Université Côte d’Azur en est une illustration concrète. Délégations, scientifiques, institutions gouvernementales : tous les acteurs sont invités à croiser leurs savoirs pour renforcer la résilience des littoraux. « Ce n’est pas un transfert à sens unique. La Région Sud s’inspire aussi de ce qui se fait au Costa Rica. La création d’une chaire entre les deux universités, c’est une façon d’ancrer cette collaboration dans la durée », plaide l’ancien volontaire.

Gaël a vécu cette année comme un temps de bascule. Hébergé à l’université du Costa Rica, impliqué dans les préparatifs du sommet “Immersed in Change” préparatoire à la troisième  Conférence de l’ONU sur les océans (qui aura lieu du 9 au 13 juin 2025), il a vu se cristalliser une diplomatie de terrain, humble et patiente, où chaque lien tissé compte : « L’événement réunissait chercheurs, institutions et gouvernements autour des enjeux marins. Ces échanges permettent de donner de la visibilité à notre action commune », se souvient-il.

Sensibiliser, relier, ancrer

La mission n’est pas terminée. Les projets sont soutenus via la FICOL (Facilité de financement des collectivités territoriales françaises par l’Agence française de développement) et la volonté politique ne faiblit pas. La suite s’écrit déjà dans les interactions à venir : voyages d’études, coopérations universitaires, mais aussi mise en relation d’associations locales de la région Sud avec leurs homologues costariciennes pour la protection des tortues ou la sensibilisation des jeunes générations.

« L’aire marine protégée est cogérée : une entrée est sous la responsabilité du gouvernement, l’autre sous celle de la population locale. L’objectif estd’impliquer davantage ces communautés. »

Et c’est peut-être là que réside le cœur du projet : dans cette idée simple mais exigeante que la protection des océans ne peut se faire sans les habitants, sans les acteurs du territoire. Pas de solution hors-sol, mais une intelligence collective à construire, entre deux rives, au plus près des récifs : «Il y a une conscience environnementale chez certains acteurs, mais beaucoup de populations locales estiment que ce sont des problématiques occidentales. Notre défi, cest aussi de rendre ces enjeux concrets, vitaux, pour toutes et tous », plaide Gaël, qui a rejoint l’Université Paris-Saclay, où il poursuit son engagement dans la coopération internationale.

S’il a quitté San José, il reste convaincu de l’utilité de ce type de partenariat entre collectivités. «La coopération entre la Région Sud et le Costa Rica montre que les échanges entre territoires peuvent faire avancer concrètement la protection de lenvironnement. Cest un travail de long terme, mais il est nécessaire.» Une dynamique puissante et structurante, qui s’appuie sur la continuité des relations, l’implication locale et le croisement des expertises. De quoi poser les bases d’une solidarité climatique à l’échelle internationale.

Playa Grande, dans la province de Guanacaste au Costa Rica. ©  Luis Diego Aguilar  / Unsplash 

Bio express

Gaël Alsiret est titulaire d’une maîtrise en géographie et développement obtenue à Sorbonne Université, ainsi que d’un master en relations internationales à l’IRIS Sup’. Après des stages au ministère des Affaires étrangères et à l’ambassade de France au Costa Rica, il a travaillé un an et demi dans la coopération internationale au Québec. De 2024 à 2025, il a été volontaire de solidarité internationale au Costa Rica, en appui à un projet environnemental entre la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur et les autorités locales.
Gaël Alsiret
Volontaire de solidarité internationale

‘Bienvenue en France’ : un label pour ouvrir les portes aux jeunes de la Caraïbe

L’université des Antilles en Guadeloupe © Université des Antilles

En Guadeloupe, Diana Lopez Vazquez, juriste mexicaine de 28 ans, s’est engagée pour une mission d’un an au sein de l’Université des Antilles afin d’améliorer l’accueil des étudiants internationaux et accompagner l’établissement vers le label « Bienvenue en France ». Un exemple concret de coopération régionale dans le cadre du programme européen Interreg.

Depuis le début de l’année, plusieurs missions de volontariat de solidarité internationale ont été déployées aux Caraïbes grâce à un cofinancement de l’Union européenne. Objectif : renforcer les liens de coopération régionale et favoriser l’intégration des populations locales dans des projets d’intérêt général. En Guadeloupe, Diana Lopez Vazquez, une volontaire mexicaine de 28 ans, contribue à améliorer l’accueil des étudiants internationaux à l’Université des Antilles, avec pour objectif l’obtention du label « Bienvenue en France » attribué par Campus France. Rencontre avec une juriste passionnée par les échanges interculturels.

Pouvez-vous revenir sur votre parcours avant cette mission de volontariat ?

Je suis avocate de formation. J’ai fait mes études de droit au Mexique et commencé à travailler dans un cabinet d’avocates. Puis, j’ai décidé de poursuivre un master à Sciences Po Paris, avec une spécialisation en droit et action humanitaire. J’ai terminé mes études en juillet dernier et j’ai commencé à m’interroger sur la suite de mon parcours. C’était comme un effet papillon : un collègue, ancien étudiant à Sciences Po, m’a parlé de son expérience de volontariat de solidarité internationale. Il m’a mentionné cette mission à l’Université des Antilles, et cela m’a immédiatement interpellée.

Qu’est-ce qui vous a motivée à candidater à ce volontariat en particulier ?

D’un point de vue personnel, le volontariat fait partie de ma culture familiale. Mes parents se sont rencontrés alors que mon père réalisait une mission de volontariat, et, depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours participé à des actions bénévoles pour aider ma communauté. Après mes études, j’ai estimé que c’était le bon moment pour m’engager sur une durée plus longue.

Diana Lopez Vazquez, interviewée dans l’émission Guadeloupe Soir sur la chaîne Guadeloupe 1 fin mars. © DR

En quoi consiste précisément votre mission ?

Je suis intégrée à la direction des relations internationales de l’Université des Antilles, sur le campus de Guadeloupe. Ma mission principale est de contribuer à l’obtention du label « Bienvenue en France » de Campus France, qui valorise la qualité de l’accueil des étudiants internationaux dans les établissements d’enseignement supérieur. Cela implique de nombreux aspects : accueil, intégration, organisation d’événements…

Êtes-vous en lien avec d’autres volontaires ?

Oui, j’ai un homologue en Martinique, car l’Université des Antilles est une structure multisites, avec cinq campus : trois en Guadeloupe et deux en Martinique. Ensemble, nous identifions les problématiques sociales rencontrées par les étudiants internationaux. Beaucoup viennent des Caraïbes (Sainte-Lucie, Haïti, République dominicaine…) mais aussi d’Afrique (Bénin, Burkina Faso..), et d’Europe via le programme Erasmus, notamment d’Allemagne ou d’Autriche. Pour ces étudiants non français, il est essentiel de les accompagner dans les démarches administratives, les demandes de visa, la recherche de logement, etc.

."Cette expérience me permet de mieux comprendre à quel point les jeunesses des Caraïbes sont connectées."

Cette diversité rend-elle la mission plus difficile ?

Oui et non. Chaque étudiant est unique, avec son propre parcours et ses propres besoins. Cela nous oblige à personnaliser notre accompagnement. On organise aussi des événements pour faciliter leur intégration et animer la vie du campus. Par exemple, cette semaine, nous avons célébré la fin du semestre avec un moment créatif et convivial, permettant aux étudiants de partager leurs expériences.

Comment se passe votre adaptation linguistique et culturelle en Guadeloupe ?

Je parle espagnol, ma langue maternelle, ainsi que l’anglais et le français, qui est ma troisième langue. Ma mission se déroule principalement en français, ce qui est une excellente opportunité pour progresser. Parfois, je parle aussi anglais ou espagnol selon les situations. Ce que je trouve enrichissant ici, c’est la coexistence de plusieurs langues, notamment le créole en plus du français. Et surtout, les Guadeloupéens sont très accueillants, ce qui facilite mon intégration.

Avez-vous déjà des projets pour la suite ?

Pas encore de plan précis. Je pense qu’il faut garder une certaine flexibilité dans la vie, car tout ne se passe jamais comme prévu. A priori, je me vois continuer dans le domaine des relations internationales, au service des jeunes ou des communautés. Cela pourrait être dans un environnement francophone ou hispanophone, je garde les deux options ouvertes.

Quel impact cette mission a-t-elle eu sur votre vision de la région ?

Cette expérience me permet de mieux comprendre à quel point les jeunesses des Caraïbes sont connectées. Finalement, les Antilles sont très proches du Mexique, géographiquement et culturellement. Il y a de vraies possibilités de coopération entre ces deux régions. Cela résonne particulièrement avec mon histoire familiale, car la famille de mon père est originaire des Caraïbes mexicaines. Alors que le Mexique est traditionnellement tourné vers le Nord, vers les États-Unis, cette mission me donne envie de contribuer à bâtir des ponts entre jeunes caribéens.