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Des étudiants en médecine font naître une volière en Amazonie péruvienne

 © @CREA y Projet Colibrí

Six étudiants en médecine de Lille, membres de l’association La Goutte d’Eau, ont monté de A à Z un projet de solidarité internationale au Pérou. Après deux ans de préparation, leur « Projet Colibri » a vu le jour à Iquitos, au cœur de la forêt amazonienne, avec la création d’une volière de réhabilitation pour oiseaux sauvages, construite avec leurs homologues péruviens.

Ils sont en deuxième année à l’Université de médecine à Lille, n’ont aucune formation en construction ni en protection de l’environnement, mais une même conviction : celle que leur parcours universitaire pouvait aussi rimer avec engagement solidaire. Membres de l’association étudiante La Goutte d’Eau, qui propose chaque année à des étudiants de monter des projets de solidarité en France ou à l’étranger, six futurs soignants ont été sélectionnés pour lancer un chantier international. Leur mission ? Imaginer, financer et concrétiser un projet à impact. Ce sera au Pérou, dans la forêt amazonienne, avec la création d’une volière de réhabilitation pour oiseaux sauvages. Le Projet Colibri est né.

 © @CREA y Projet Colibrí

Sa singularité ? Un cycle de deux ans : « On est parti de rien et on a tout dû construire de A à Z : trouver un partenaire local, autofinancer le projet, chercher des bourses, coordonner la logistique… », raconte Wandrille Spriet, 19 ans, qui a monté le projet avec ses cinq comparses*. Le groupe contacte alors France Volontaires au Pérou, qui les oriente vers le Centro de Rescate Amazónico (CREA), un centre spécialisé dans le soin et la réhabilitation d’animaux sauvages. Très vite, le lien est établi. CREA propose alors un projet concret : construire une volière de réinsertion pour oiseaux rescapés du trafic illégal. Les six futurs volontaires sont conquis.

Volontariat international étudiant : un projet de solidarité né à la fac de médecine

Le chantier est ambitieux : une volière destinée à accueillir 21 espèces d’oiseaux amazoniens victimes de braconnage, de trafic ou de captivité illégale. Ces oiseaux, remis aux soins de CREA par les autorités locales, doivent retrouver un espace leur permettant de se remuscler, se nourrir et évoluer dans un environnement proche de leur habitat naturel. « On savait qu’il y avait à faire. On avait envoyé les fonds en février pour que des professionnels construisent la structure, parce qu’évidemment, on n’a pas de formation dans le domaine », précise Wandrille. « Nous, on devait faire l’aménagement intérieur : planter des arbres, installer des perchoirs, recréer une ambiance de forêt ».

Sur place, les six Lillois rejoignent un groupe de sept étudiants de l’Université nationale de l’Amazonie péruvienne, avec qui ils collaborent au quotidien. La dynamique est immédiate. Les jeunes Français découvrent Iquitos, ville située aux portes de l’Amazonie, à mille lieues des circuits touristiques. « Les locaux sont extrêmement accueillants. On ne croise pas souvent de Français là-bas. Ils nous ont montré où faire nos courses, comment se déplacer. L’accueil était top », sourit Wandrille.

 © @CREA y Projet Colibrí

Après deux ans de préparation, le chantier dure deux semaines, à la fin du mois de juin 2025. Quinze jours intenses où se conjuguent efforts physiques, choc culturel et émerveillement. Les membres du groupe, qui ne se connaissaient pas au départ, réalisent à quel point ces vingt-quatre mois de préparation ont soudé leur cohésion. « L’avantage du projet en deux ans, c’est qu’on a le temps de se connaître et de prévoir. On savait exactement comment ça allait se passer, même au niveau de la nourriture, des allergies… », raconte Wandrille. À leur retour en France, les jeunes prennent la mesure de l’impact de cette expérience : « Ça met une claque. Rien que le fait de pouvoir mettre la brosse à dents sous le robinet prend une autre valeur. »

Protection de la biodiversité amazonienne : une expérience humaine et écologique marquante

Le Projet Colibri, au-delà de son utilité écologique – offrir une seconde chance à des oiseaux sauvages – a aussi ouvert la voie à d’autres vocations. Wandrille, encore étudiant, se projette déjà : « Une fois que j’aurai mon diplôme de médecin, j’aimerais bien repartir, cette fois dans le domaine médical. » Mieux encore, CREA et La Goutte d’Eau ont convenu de reconduire le partenariat. Une nouvelle équipe de six étudiants prendra la relève en 2026, pour faire vivre cette volière et peut-être en imaginer d’autres.

* Virgile Bertin, Agathe Coze, Justine Juanchich, Maeva Landsheere et Léna Strus

Regardez le reportage sur le projet Colibri (en espagnol)

Le CREA, un sanctuaire pour la faune amazonienne

Le Centre de Rescate Amazónico (CREA), à Iquitos, œuvre depuis plus de dix ans pour la conservation de la faune sauvage. Emblème de son action, le lamantin amazonien est passé du statut d’espèce méconnue à celui de symbole de protection de la biodiversité. Résultat : le trafic de lamantins dans la ville a été réduit à zéro. En tout, 70 lamantins ont été sauvés, dont 33 relâchés dans des réserves naturelles. Le CREA prend aussi soin de tortues, oiseaux, caïmans ou paresseux. Il mène des actions d’éducation (200 000 personnes sensibilisées) et développe un écotourisme responsable. Il a été sélectionné pour accueillir un VSI dans le cadre du projet V-Amazonie de France Volontaires.

Les partenaires d’un chantier de volontariat exemplaire

Le Projet Colibri a été rendu possible grâce à la synergie de plusieurs acteurs :

La Goutte d’Eau, association de l’Université de Médecine de Lille, initiatrice du projet.
France Volontaires – Espace Volontariats Pérou, qui a assuré l’orientation, la mise en relation et le suivi.
CREA – Centro de Rescate Amazónico, structure péruvienne d’accueil et partenaire opérationnel.
L’Université nationale de l’Amazonie Péruvienne (UNAP), dont sept étudiants ont collaboré au chantier.
Le FONJEP, via le dispositif JSI-VVVSI, qui a attribué une bourse de 10 000 euros au projet, avec l’appui de l’Ambassade de France au Pérou.

Six différences entre le Volontariat international d’échange et de solidarité (VIES) et le Volontariat en entreprise (VIE) 

© Jason Goodman / Unsplash

Le sigle peut prêter à confusion : V.I.E.S, VIE… Pourtant, ces deux formes d’engagement à l’international n’ont ni les mêmes objectifs, ni les mêmes publics, ni les mêmes modalités.

Alors que le Volontariat en entreprise (VIE) s’inscrit dans une logique de développement économique et commercial des entreprises françaises à l’étranger, le Volontariat international d’échange et de solidarité (V.I.E.S) place la coopération, la solidarité et l’intérêt général au cœur des missions. Décryptage en six points pour y voir plus clair !

1. L’objectif : développement commercial ou solidarité internationale ?

Le VIE est un dispositif de l’État français géré par Business France, qui permet à une entreprise ou à une administration française de confier une mission à l’étranger à un ou une jeune de 18 à 28 ans. L’objectif est clair : appuyer l’internationalisation des entreprises françaises, développer des marchés ou encore faire rayonner le savoir-faire français.

Le V.I.E.S, quant à lui, regroupe différents dispositifs de volontariat centrés sur la solidarité internationale, comme le Volontariat de solidarité internationale (VSI), le Service civique à l’international, le Volontariat d’échange et de compétences (VEC), etc. Ici, pas de logique commerciale, mais une mission d’intérêt général construite avec les partenaires du pays d’accueil, pour renforcer les capacités locales, agir sur des enjeux sociaux, environnementaux, culturels ou éducatifs.

2. Le statut : salarié ou volontaire ?

Les volontaires en VIE ont un statut juridique bien spécifique, celui de « volontaire international en entreprise ». Ce ne sont pas des salariés, mais ils perçoivent une indemnité forfaitaire, sont rattachés à une entreprise (ou une administration dans le cas du VIA), et bénéficient d’un encadrement professionnel très proche du monde de l’entreprise.

Dans le cadre du V.I.E.S, le statut dépend du dispositif. Les volontaires en VSI, par exemple, ne sont ni salariés ni stagiaires : ils ont un statut propre, défini par la loi de 2005, et reçoivent une indemnité pour vivre décemment dans le pays d’accueil et se consacrer ainsi pleinement à la mission. Les volontaires en Service Civique ont, eux aussi, un statut dédié, et sont engagés dans des missions éducatives, sociales ou environnementales.

© France Volontaires

3. L’âge : une barrière dans le VIE, une ouverture dans le V.I.E.S

Autre différence de taille : l’âge. Le Volontariat international en entreprise (VIE) est strictement réservé aux jeunes de 18 à 28 ans, sans dérogation possible. Passé cet âge, il n’est plus possible d’y prétendre.

Si certains dispositifs du V.I.E.S sont également soumis à une limite d’âge, comme le Service Civique international limité à 25 ans et 30 ans pour les jeunes en situation de handicap le Volontariat de solidarité internationale (VSI) est quant à lui ouvert à toutes et tous à partir de 18 ans mais sans limite supérieure. Un véritable atout pour les personnes en reconversion, en transition de carrière ou retraitées, qui souhaitent mettre leurs compétences au service de l’intérêt général et de projets solidaires. Le Volontariat d’échange et de compétences (VEC), ou le volontariat seniors permettent également de s’engager dans des missions quel que soit le moment de sa vie.

4. La durée et le profil des missions : des écarts notables

Un VIE peut durer de 6 à 24 mois. Il est majoritairement occupé par des jeunes diplômés de niveau Bac+5, dans des secteurs comme le commerce, la finance, l’ingénierie ou encore le marketing international. La mission s’intègre souvent dans un parcours professionnel structuré, et peut déboucher sur une embauche dans l’entreprise.

Les missions de V.I.E.S sont très variées : appui à des projets éducatifs, développement local, agriculture durable, préservation de la biodiversité, inclusion sociale, etc. Certaines requièrent des compétences spécifiques, d’autres sont accessibles sans qualification particulière, notamment dans le cadre du Service Civique ou des chantiers de solidarité. La durée des missions va de quelques semaines à plusieurs années selon les dispositifs.

5. L’ancrage local : un partenariat avec les acteurs locaux

C’est l’un des grands principes du V.I.E.S : les missions sont co-construites avec les partenaires des pays bénéficiaires de l’aide publique au développement (APD) de la France, souvent des associations ou des collectivités locales, pour répondre à des besoins identifiés sur le terrain. Cette logique de partenariat équitable est au cœur du volontariat de solidarité, qui vise à renforcer les capacités locales plutôt qu’à imposer des solutions extérieures.

Dans le cadre du VIE, l’ancrage local est plus dépendant de la stratégie de l’entreprise ou de l’administration qui accueille le ou la volontaire. L’objectif premier reste l’activité de la structure française, et l’attractivité économique de la France à l’international, même si certaines missions peuvent avoir un impact bénéfique sur le tissu économique local.

6. La finalité : s'engager ou se projeter professionnellement ? se projeter professionnellement ?

Faire un VIE, c’est souvent envisager une carrière dans l’entreprise ou dans le secteur privé. C’est une expérience professionnelle valorisée sur un CV, dans un cadre sécurisé, avec des perspectives d’embauche.

Le V.I.E.S, lui, permet avant tout de s’engager dans une démarche citoyenne, de découvrir des réalités différentes, de contribuer à des projets porteurs de sens. Cela n’exclut pas un parcours professionnalisant : beaucoup d’anciens volontaires mettent à profit leur mission pour trouver un emploi dans le domaine de la solidarité internationale, de la coopération ou à la transition écologique et sociale.

Deux formes de volontariat, deux logiques différentes

mais un même point commun : partir à l’étranger, vivre une expérience forte et élargir ses horizons.
À vous de choisir celle qui vous correspond le mieux !

– Cliquez ici pour en savoir plus sur les dispositifs du V.I.E.S
– Cliquez ici pour explorer les offres de VIE 

© France Volontaires

À Boffa, la pêche artisanale face au défi de la préservation 

© Lola Ortega

La petite ville de Boffa, en Guinée, fait l’objet d’un ambitieux programme de modernisation : le projet de développement durable de la pêche Artisanale (P2DPA), mené par Charente-Maritime Coopération et la préfecture locale, s’attaque à la précarité de la filière halieutique. Sur le terrain, des volontaires comme Lola Ortega accompagnent les pêcheurs dans un contexte fragilisé par l’intrusion croissante de l’industrie minière.

Boffa, quatre heures de piste cahoteuse au nord de Conakry, s’étire sur les rives de la rivière Katala, au cœur d’un vaste estuaire bordé de mangroves. Ici, la pêche artisanale est une affaire de survie autant que de tradition. Mais dans les années 2010, la filière  a souffert d’un manque criant d’infrastructures : absence de digue pour faciliter le débarquement, pas d’adduction d’eau ni de latrines sur le port, aucun système de conservation réfrigéré, et des équipements de séchage ou de navigation largement inadaptés aux besoins.

C’est dans ce contexte qu’en 2019, la coopération décentralisée entre le Département de la Charente-Maritime (via Charentre-Maritime Coopération) et la ville de Boffa – active depuis 1992 – permet de se doter d’un nouvel outil : le projet de développement durable de la pêche artisanale (P2DPA), cofinancé à hauteur de 1,58 million d’euros, dont un million via l’Agence française de développement (AFD).

Une digue entre deux mondes

Quelques années plus tard, les infrastructures sont là, avec, entre autres, le port de Boffa flambant neuf et un débarcadère équipé d’une digue à Walia, un village situé à proximité de Boffa. « C’est essentiel pour les populations insulaires, qui devaient auparavant attendre la marée basse ou haute pour accoster. Maintenant, tout est plus fluide », explique Lola Ortega, volontaire de solidarité internationale (VSI) envoyée par Charente-Maritime Coopération entre janvier 2023 et juin 2024.

La jeune diplômée en économie du développement a rejoint le projet en fin de cycle, avec une mission de terrain : former, sensibiliser, structurer. « On a beaucoup travaillé sur la cogestion du port avec les pêcheurs et les femmes transformatrices. Un comité local a été mis en place pour gérer les conflits, organiser les taxes, représenter toutes les parties. C’est eux qui tiennent la barre maintenant. »

Grâce à ce projet, les acteurs de la filière pêche ont pu bénéficier de formations en gestion durable de la ressource halieutique et concernant les bonnes pratiques sanitaires. © Lola Ortega

Le P2DPA ne s’est pas contenté de verser du béton. Avec l’appui d’experts de Charente Maritime Coopération, il a organisé des formations sur l’hygiène, la gestion des infrastructures, la réglementation de la pêche et même l’alphabétisation des femmes. Un effort global, qui touche toutes les étapes de la filière : des armateurs qui possèdent les pirogues aux femmes qui fument et vendent le poisson dans les villages.

De la barque au marché, toute une chaîne à repenser

Nicolas Dubois, directeur du port de la Cotinière, sur l’île d’Oléron, a quant à lui participé aux séances de formation organisées à Boffa en janvier 2023 : « Apporter son expertise à l’international dans mon secteur de la pêche est un grand enrichissement personnel, cela m’a permis de projeter le modèle économique artisanal récent de la Cotinière, et de montrer aux bénéficiaires de la formation que les modèles coopératifs, les services facturés acceptés par les oléronais pêcheurs, acheteurs, ont permis une croissance et une dynamique fortes à la Cotinière ».

Mais dans l’ombre des filets tendus et des comités de cogestion, une autre réalité menace. Depuis deux ans, les eaux de Boffa ne sont plus aussi poissonneuses : l’exploitation de minerais s’est en effet intensifiée ces dernières années. Des barges gigantesques draguent les fonds, parfois sans se soucier des zones de pêche traditionnelles. Résultat : les ressources halieutiques s’effondrent, l’économie locale tangue. « C’est toute une chaîne qui est impactée. Les femmes ne peuvent plus sécher du poisson qu’elles n’ont pas. Les familles perdent leur seul revenu. C’est grave, et pourtant, peu de gens en parlent », alerte la VSI : « L’extraction en mer pollue, détruit les fonds marins. Les pêcheurs reviennent les mains vides. Certains n’osent même plus sortir leurs barques. »

"On a travaillé sur la cogestion du port avec les pêcheurs et les femmes transformatrices. Un comité local a été mis en place pour gérer les conflits, organiser les taxes, représenter toutes les parties."

Dans les derniers mois du projet, une partie des fonds restants a été réaffectée à des actions d’urgence: sensibilisation à la diversification des revenus, mise en place de microprojets alternatifs. «Ce n’était pas prévu dans le plan initial, mais on ne pouvait pas fermer les yeux. Il faut une suite, une réponse politique à cette destruction silencieuse », insiste Lola Ortega.

Le projet P2DPA s’est terminé officiellement en 2024, mais ses héritiers, eux, sont bien là : un port structuré, un comité en place, des professionnels formés. Reste à savoir si ces acquis survivront au rouleau compresseur de l’extraction minière. À Boffa, comme ailleurs, la mer reste un bien commun précieux, et les acteurs locaux, soutenus par des projets engagés, montrent déjà la voie d’une gestion durable et solidaire.

Le projet P2DPA en chiffres

  • 1 583 000 €
    C’est le budget total du projet P2DPA sur trois ans, dont un million financé par l’AFD via le dispositif FICOL. Un montant qui a permis de financer à la fois les infrastructures (port, marché, débarcadère) et les formations des acteurs de la filière pêche.
  • 6 000 bénéficiaires directs
    Estimation du nombre de personnes ayant directement profité des infrastructures sanitaires et d’accès à l’eau créées à Boffa, notamment autour du port, du marché et du débarcadère de Walia.
  • 3 infrastructures majeures
    Le port de Boffa a été réhabilité, un marché moderne construit en centre-ville et un débarcadère aménagé à Walia avec une digue permettant d’accoster à toute heure, facilitant les échanges entre les îles et le continent.
  • 1 comité local de cogestion
    Créé pour garantir une gestion participative du port, ce comité rassemble pêcheurs, femmes transformatrices et autorités locales. Il gère les taxes, les conflits, et assure la pérennité des actions après le retrait du projet.

 © Lola Ortega

De Nice à Boffa, un engagement global pour les océans

La troisième Conférence des Nations unies sur l’Océan (UNOC 3), qui s’est tenue à Nice en juin 2025 et à laquelle France Volontaires a activement participé, a rassemblé plus de 170 pays pour renforcer la protection des océans face aux menaces croissantes. Parmi les avancées, la ratification du Traité sur la haute mer et un engagement fort contre la pollution plastique ont marqué cette rencontre. Ces initiatives internationales rejoignent les projets locaux comme celui de Boffa, en Guinée, où la coopération entre la Charente-Maritime et la communauté locale modernise la pêche artisanale. Cette alliance entre actions globales et efforts de terrain est essentielle pour préserver durablement nos océans.

Bio express

Lola Ortega est diplômée d’un master en Conception et Ingénierie de projets de développement à l’Université de Bordeaux. Elle s’est très tôt engagée dans des projets mêlant environnement, gouvernance locale et solidarité internationale. Après un premier stage à l’Association des Enseignants des Sciences de la Vie et de la Terre Maroc (AESVT), elle enchaîne avec un Service civique chez Initiative Développement puis en tant que VSI, en Guinée, où elle pilote le projet de développement durable de la pêche artisanale avec Charente-Maritime Coopération. Elle coordonne aujourd’hui des projets environnementaux et de résilience communautaire portés par l’AESVT Maroc.
Lola Ortega
Volontaire de solidarité internationale

 © Photo : Bandjan Doumbouya

 © Lola Ortega

L’eau, trésor de Luang Prabang : une coopération décentralisée face aux défis climatiques 

© Colin Roe / Unsplash

Entre montagnes et patrimoine classé, Luang Prabang, au Laos, fait face à des défis environnementaux croissants. Sécheresses prolongées, tensions sur les ressources, pression urbaine : dans ce décor fragile, deux projets portés par des ONG, la Région Centre-Val de Loire et les autorités sanitaires laotiennes dessinent une réponse collective aux enjeux de l’eau. Vincent Capron, volontaire de solidarité internationale, accompagne ces actions sur le terrain.

Il faut parfois remonter à la source — au sens propre — pour comprendre les enjeux de l’accès à l’eau dans la province montagneuse de Luang Prabang, au nord du Laos. Depuis 2019, l’association Confluence, en partenariat avec la Région Centre-Val de Loire et avec l’aide du département de la santé de la Province, y déploie le programme DearWater. Construit en deux phases, ce projet vise à améliorer durablement l’accès à l’eau potable dans des villages reculés, en s’appuyant sur une démarche participative.

Des réseaux d’eau au cœur des villages

« C’est un projet de construction de réseaux d’eau potable, mais pas seulement », explique Vincent Capron, volontaire de solidarité internationale (VSI) détaché auprès de la région. « Les communautés rurales sont impliquées pendant presque un an, du diagnostic jusqu’à la formation d’un comité de gestion. » Une gouvernance locale de l’eau s’organise autour des sources, souvent situées en forêt, et dont la préservation devient essentielle.

Le contexte géographique — zones montagneuses, villages dispersés — rend l’intervention des services publics difficile. Ce sont donc les communautés qui, avec l’appui de l’ONG franco-laotienne Confluence, construisent les réseaux, apprennent à les entretenir, mais surtout, s’interrogent collectivement sur leur gestion. « Chaque foyer paie désormais pour son accès à l’eau, ce qui est assez neuf au Laos. Il faut alors accompagner l’acceptation de ce changement. Ce sont les villageois qui nous disent ce qu’ils attendent de ce nouveau service. »

La phase 1 de DearWater, menée entre 2019 et 2022, a permis la construction de douze réseaux, permettant un accès sécurisé à l’eau à près de 5 000 habitants. La phase 2, en cours depuis 2023, entend étendre cette démarche à d’autres zones rurales, en accentuant la dimension de capitalisation et de résilience climatique. Car l’urgence est là.

A Luang Prabang, au centre du Laos, une quinzaine de mares urbaines, vestiges d’un ancien système hydraulique traditionnel, font l’objet d’une réhabilitation. © CJ / Unsplash

« Le changement climatique assèche les sources, c’est visible ici : les saisons des pluies sont plus capricieuses, les saisons sèches plus longues. Les communautés, très autonomes, le perçoivent très bien. » À cette variabilité naturelle s’ajoutent des pratiques agricoles gourmandes en eau, comme la culture de l’hévéa encouragée par la demande chinoise. « Ce n’est pas toujours compatible avec un accès durable à l’eau potable », alerte Vincent.

Dans la ville classée, la mémoire des mares

À quelques kilomètres des montagnes, le cœur historique de Luang Prabang — inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO — abrite lui aussi des enjeux hydriques moins visibles mais tout aussi cruciaux. Au sein même de la ville, une quinzaine de mares urbaines, vestiges d’un ancien système hydraulique traditionnel, dépérissent lentement. L’association française GRET, active au Laos depuis plus de quinze ans, tente aujourd’hui de les sauver.

Le projet, soutenu par la Région Centre-Val de Loire dans le cadre de la coopération décentralisée, entend réhabiliter ces plans d’eau, menacés par l’abandon, la pollution, et l’emprise foncière galopante. « Ces mares sont exceptionnelles. Le GRET travaille à les préserver pour leur rôle écologique, mais aussi patrimonial et social », raconte Vincent. L’eau y joue un rôle d’amortisseur thermique, de régulateur naturel et de réservoir pour la biodiversité urbaine.

« Le changement climatique assèche les sources, c’est visible ici : les saisons des pluies sont plus capricieuses, les saisons sèches plus longues. Les communautés, le perçoivent très bien. »

Entre 2021 et 2024, six mares pilotes ont fait l’objet de diagnostics participatifs, de travaux de désenvasement, de plantations de végétation locale et d’actions de sensibilisation auprès des riverains. Le projet veut faire école : à travers des fiches techniques, des outils pédagogiques et une plateforme de suivi, il s’agit aussi de diffuser ces bonnes pratiques à d’autres villes du Laos confrontées aux mêmes défis.

« Mon rôle, ce n’est pas d’exécuter les projets, mais de suivre ce qui se fait, de tirer des leçons, de faire circuler l’info entre les acteurs. C’est aussi montrer que ce qui marche ici peut inspirer ailleurs. » Au fil des mois, Vincent documente, coordonne, rend compte.

Coopérer pour durer

Une mémoire du projet se constitue, d’autant plus précieuse que ce partenariat est appelé à durer. La coopération décentralisée entre la Région Centre-Val de Loire et la province de Luang Prabang remonte d’ailleurs à 2005. Elle s’est étoffée au fil des années, mêlant patrimoine, santé, éducation… et désormais écologie. C’est dans cette logique que les projets DearWater et Ban Man’eau (dérivé du nom d’une des mares réhabilitées) s’inscrivent, avec une ambition commune : répondre localement à des enjeux globaux.

« Ce travail permet de réfléchir à comment être acteur de ce débat public sur l’usage de l’eau », estime Vincent Capron. Et la Région Centre a, dans ce dialogue, sa carte à jouer. « Avec ses marais à Bourges ou dans la Brenne, la collectivité dispose d’une expertise, et dans le même temps, elle apprend aussi beaucoup ici. On est dans un échange, pas dans un transfert de modèle. »

De la source forestière au plan d’eau urbain, une même question traverse les projets : comment préserver l’environnement en conciliant usage, développement, et durabilité ? La réponse, à Luang Prabang, s’écrit à plusieurs mains — celles des ONG, des collectivités, des volontaires, et surtout des habitants eux-mêmes. « Il faut partir de ce que les gens savent déjà. C’est eux qui vivent les impacts du dérèglement. Le rôle du projet, c’est de les aider à structurer une réponse collective. »

À Luang Prabang, cette coopération illustre comment les territoires, en croisant leurs expériences, peuvent construire des réponses durables aux grands enjeux de notre siècle.

Bio express

Vincent Capron est diplômé de Sciences Po Rennes, où il s’est spécialisé en action internationale des collectivités territoriales. Il a effectué plusieurs stages dans des ONG et en collectivité, notamment à l’Assemblée des départements de France, où il a contribué à un atlas des actions internationales. En 2024, il s’engage comme volontaire de solidarité internationale au Laos. Il est alors chargé de l’appui au suivi et à la valorisation de deux projets environnementaux portés par des ONG et la Région Centre-Val de Loire dans la province de Luang Prabang.
Vincent Capron
Volontaire de solidarité internationale

Quand la Région Sud et le Costa Rica unissent leurs forces pour protéger les océans

© Frames for ypur heart Unsplash

Depuis plusieurs années, la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur tisse une collaboration singulière avec le Costa Rica autour d’un enjeu commun : la préservation des aires marines protégées. Un chantier aussi vital que fragile, auquel a contribué Gaël Alsiret, volontaire de solidarité internationale, témoin et acteur de cette coopération inédite qui est revenu de mission il y a quelques semaines.

San José, capitale nichée au cœur du Costa Rica, n’a rien d’une cité balnéaire. Pourtant, c’est bien là que Gaël Alsiret a posé ses valises pour une mission d’un an en tant que volontaire de solidarité internationale. À 29 ans, ce diplômé en géographie et relations internationales, passé par l’IRIS Sup’ et l’ambassade de France au Costa Rica, s’est vu confier une tâche à la croisée des politiques publiques et de la diplomatie environnementale : initier un projet de coopération sur la protection des aires marines protégées entre la Région Sud et le Costa Rica : « Pendant un an, j’ai été en charge de la gestion et du suivi de projets entre la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur et le Costa Rica, dans le domaine de l’environnement. J’ai amorcé un projet sur la protection des aires marines protégées » se remémore-t-il.

Une mer sous pression

L’enjeu est majeur. À l’heure où les océans subissent de plein fouet les effets du dérèglement climatique, les aires marines protégées apparaissent comme l’un des derniers remparts face à l’effondrement de la biodiversité. Elles couvrent environ 8 % des espaces maritimes mondiaux, bien loin de l’objectif de 30 % fixé par les instances internationales à l’horizon 2030. Plus qu’un outil de conservation, ces zones sont aussi des laboratoires d’adaptation au changement climatique, des refuges pour la faune marine, et des espaces d’expérimentation pour une gestion plus durable des ressources halieutiques.

Parmi les enjeux des aires marines protégées au Costa Rica : assurer la préservation des tortues de mer, menacées de chasse et de braconnage. © Pedro Novales / Unsplash

C’est justement cette vision partagée de la protection marine qui a rapproché la Région Sud et le Costa Rica. Dès 2021, un partenariat a été noué à travers le projet Duodiversité, orchestré notamment par le Parc national de Port-Cros. Sur le terrain, la mission de Gaël s’est concentrée sur la côte caraïbe du Costa Rica, au Parc national de Cahuita, couvrant une vaste aire protégée cogérée par l’État et les communautés autochtones locales, en plus de la zone terrestre. Une configuration rare qui appelle une gouvernance subtile. « On a pu échanger avec des communautés natives. L’aire marine protégée est cogérée : une entrée est sous la responsabilité du gouvernement, l’autre sous celle de la population locale. L’objectif était d’impliquer davantage ces communautés. »

Au fil de sa mission, Gaël a identifié des fragilités multiples : tourisme de masse, pêche intensive, espèces invasives, pollution agricole. Sans oublier les menaces silencieuses qui rongent les écosystèmes coralliens, comme le blanchissement des coraux ou la disparition progressive de certaines espèces emblématiques. « On est dans une zone où la population vit de la pêche. Il faut concilier l’économique et l’écologique. Les espèces invasives, le braconnage de la tortue, le blanchissement des coraux… ce sont des dangers bien réels », regrette-t-il.

L’écologie comme terrain d’échange

Si le Costa Rica est souvent érigé en modèle écologique, la réalité est plus contrastée. Certes, la politique de reforestation et d’agroforesterie est pionnière, mais d’autres pratiques viennent ternir le tableau. L’usage intensif de pesticides, les carences dans le traitement des déchets, et une sensibilisation encore inégale freinent les ambitions environnementales. Gaël confirme : « Le Costa Rica mène une vraie politique de reforestation. Mais c’est aussi le pays qui utilise le plus de pesticides au mètre carré. Cette pollution chimique se propage des champs à la mer. »

En novembre 2022, une délégation du Parc national du Corcovado, du Costa Rica, a été accueillie sur le territoire du Parc national de Port-Cros. © Bertrand Bordie / Unsplash 

Dans ce contexte, la coopération entre la Région Sud et le Costa Rica se veut réciproque. Il ne s’agit pas d’imposer un modèle mais bien de favoriser l’échange d’expériences, l’apprentissage mutuel. La création d’une chaire de recherche conjointe entre l’université du Costa Rica et l’Université Côte d’Azur en est une illustration concrète. Délégations, scientifiques, institutions gouvernementales : tous les acteurs sont invités à croiser leurs savoirs pour renforcer la résilience des littoraux. « Ce n’est pas un transfert à sens unique. La Région Sud s’inspire aussi de ce qui se fait au Costa Rica. La création d’une chaire entre les deux universités, c’est une façon d’ancrer cette collaboration dans la durée », plaide l’ancien volontaire.

Gaël a vécu cette année comme un temps de bascule. Hébergé à l’université du Costa Rica, impliqué dans les préparatifs du sommet “Immersed in Change” préparatoire à la troisième  Conférence de l’ONU sur les océans (qui aura lieu du 9 au 13 juin 2025), il a vu se cristalliser une diplomatie de terrain, humble et patiente, où chaque lien tissé compte : « L’événement réunissait chercheurs, institutions et gouvernements autour des enjeux marins. Ces échanges permettent de donner de la visibilité à notre action commune », se souvient-il.

Sensibiliser, relier, ancrer

La mission n’est pas terminée. Les projets sont soutenus via la FICOL (Facilité de financement des collectivités territoriales françaises par l’Agence française de développement) et la volonté politique ne faiblit pas. La suite s’écrit déjà dans les interactions à venir : voyages d’études, coopérations universitaires, mais aussi mise en relation d’associations locales de la région Sud avec leurs homologues costariciennes pour la protection des tortues ou la sensibilisation des jeunes générations.

« L’aire marine protégée est cogérée : une entrée est sous la responsabilité du gouvernement, l’autre sous celle de la population locale. L’objectif estd’impliquer davantage ces communautés. »

Et c’est peut-être là que réside le cœur du projet : dans cette idée simple mais exigeante que la protection des océans ne peut se faire sans les habitants, sans les acteurs du territoire. Pas de solution hors-sol, mais une intelligence collective à construire, entre deux rives, au plus près des récifs : «Il y a une conscience environnementale chez certains acteurs, mais beaucoup de populations locales estiment que ce sont des problématiques occidentales. Notre défi, cest aussi de rendre ces enjeux concrets, vitaux, pour toutes et tous », plaide Gaël, qui a rejoint l’Université Paris-Saclay, où il poursuit son engagement dans la coopération internationale.

S’il a quitté San José, il reste convaincu de l’utilité de ce type de partenariat entre collectivités. «La coopération entre la Région Sud et le Costa Rica montre que les échanges entre territoires peuvent faire avancer concrètement la protection de lenvironnement. Cest un travail de long terme, mais il est nécessaire.» Une dynamique puissante et structurante, qui s’appuie sur la continuité des relations, l’implication locale et le croisement des expertises. De quoi poser les bases d’une solidarité climatique à l’échelle internationale.

Playa Grande, dans la province de Guanacaste au Costa Rica. ©  Luis Diego Aguilar  / Unsplash 

Bio express

Gaël Alsiret est titulaire d’une maîtrise en géographie et développement obtenue à Sorbonne Université, ainsi que d’un master en relations internationales à l’IRIS Sup’. Après des stages au ministère des Affaires étrangères et à l’ambassade de France au Costa Rica, il a travaillé un an et demi dans la coopération internationale au Québec. De 2024 à 2025, il a été volontaire de solidarité internationale au Costa Rica, en appui à un projet environnemental entre la Région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur et les autorités locales.
Gaël Alsiret
Volontaire de solidarité internationale

‘Bienvenue en France’ : un label pour ouvrir les portes aux jeunes de la Caraïbe

L’université des Antilles en Guadeloupe © Université des Antilles

En Guadeloupe, Diana Lopez Vazquez, juriste mexicaine de 28 ans, s’est engagée pour une mission d’un an au sein de l’Université des Antilles afin d’améliorer l’accueil des étudiants internationaux et accompagner l’établissement vers le label « Bienvenue en France ». Un exemple concret de coopération régionale dans le cadre du programme européen Interreg.

Depuis le début de l’année, plusieurs missions de volontariat de solidarité internationale ont été déployées aux Caraïbes grâce à un cofinancement de l’Union européenne. Objectif : renforcer les liens de coopération régionale et favoriser l’intégration des populations locales dans des projets d’intérêt général. En Guadeloupe, Diana Lopez Vazquez, une volontaire mexicaine de 28 ans, contribue à améliorer l’accueil des étudiants internationaux à l’Université des Antilles, avec pour objectif l’obtention du label « Bienvenue en France » attribué par Campus France. Rencontre avec une juriste passionnée par les échanges interculturels.

Pouvez-vous revenir sur votre parcours avant cette mission de volontariat ?

Je suis avocate de formation. J’ai fait mes études de droit au Mexique et commencé à travailler dans un cabinet d’avocates. Puis, j’ai décidé de poursuivre un master à Sciences Po Paris, avec une spécialisation en droit et action humanitaire. J’ai terminé mes études en juillet dernier et j’ai commencé à m’interroger sur la suite de mon parcours. C’était comme un effet papillon : un collègue, ancien étudiant à Sciences Po, m’a parlé de son expérience de volontariat de solidarité internationale. Il m’a mentionné cette mission à l’Université des Antilles, et cela m’a immédiatement interpellée.

Qu’est-ce qui vous a motivée à candidater à ce volontariat en particulier ?

D’un point de vue personnel, le volontariat fait partie de ma culture familiale. Mes parents se sont rencontrés alors que mon père réalisait une mission de volontariat, et, depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours participé à des actions bénévoles pour aider ma communauté. Après mes études, j’ai estimé que c’était le bon moment pour m’engager sur une durée plus longue.

Diana Lopez Vazquez, interviewée dans l’émission Guadeloupe Soir sur la chaîne Guadeloupe 1 fin mars. © DR

En quoi consiste précisément votre mission ?

Je suis intégrée à la direction des relations internationales de l’Université des Antilles, sur le campus de Guadeloupe. Ma mission principale est de contribuer à l’obtention du label « Bienvenue en France » de Campus France, qui valorise la qualité de l’accueil des étudiants internationaux dans les établissements d’enseignement supérieur. Cela implique de nombreux aspects : accueil, intégration, organisation d’événements…

Êtes-vous en lien avec d’autres volontaires ?

Oui, j’ai un homologue en Martinique, car l’Université des Antilles est une structure multisites, avec cinq campus : trois en Guadeloupe et deux en Martinique. Ensemble, nous identifions les problématiques sociales rencontrées par les étudiants internationaux. Beaucoup viennent des Caraïbes (Sainte-Lucie, Haïti, République dominicaine…) mais aussi d’Afrique (Bénin, Burkina Faso..), et d’Europe via le programme Erasmus, notamment d’Allemagne ou d’Autriche. Pour ces étudiants non français, il est essentiel de les accompagner dans les démarches administratives, les demandes de visa, la recherche de logement, etc.

."Cette expérience me permet de mieux comprendre à quel point les jeunesses des Caraïbes sont connectées."

Cette diversité rend-elle la mission plus difficile ?

Oui et non. Chaque étudiant est unique, avec son propre parcours et ses propres besoins. Cela nous oblige à personnaliser notre accompagnement. On organise aussi des événements pour faciliter leur intégration et animer la vie du campus. Par exemple, cette semaine, nous avons célébré la fin du semestre avec un moment créatif et convivial, permettant aux étudiants de partager leurs expériences.

Comment se passe votre adaptation linguistique et culturelle en Guadeloupe ?

Je parle espagnol, ma langue maternelle, ainsi que l’anglais et le français, qui est ma troisième langue. Ma mission se déroule principalement en français, ce qui est une excellente opportunité pour progresser. Parfois, je parle aussi anglais ou espagnol selon les situations. Ce que je trouve enrichissant ici, c’est la coexistence de plusieurs langues, notamment le créole en plus du français. Et surtout, les Guadeloupéens sont très accueillants, ce qui facilite mon intégration.

Avez-vous déjà des projets pour la suite ?

Pas encore de plan précis. Je pense qu’il faut garder une certaine flexibilité dans la vie, car tout ne se passe jamais comme prévu. A priori, je me vois continuer dans le domaine des relations internationales, au service des jeunes ou des communautés. Cela pourrait être dans un environnement francophone ou hispanophone, je garde les deux options ouvertes.

Quel impact cette mission a-t-elle eu sur votre vision de la région ?

Cette expérience me permet de mieux comprendre à quel point les jeunesses des Caraïbes sont connectées. Finalement, les Antilles sont très proches du Mexique, géographiquement et culturellement. Il y a de vraies possibilités de coopération entre ces deux régions. Cela résonne particulièrement avec mon histoire familiale, car la famille de mon père est originaire des Caraïbes mexicaines. Alors que le Mexique est traditionnellement tourné vers le Nord, vers les États-Unis, cette mission me donne envie de contribuer à bâtir des ponts entre jeunes caribéens.

Thielo, flow wolof et vibes urbaines

Abdoulaye Gomis, aka Thielo, lors de son concert à la Sen’ Urban Fest le 6 décembre 2024, sur la scène de Canal 93. © France Volontaires

Pendant un an, Abdoulaye Gomis, alias Thielo, jeune artiste sénégalais, est passé des studios de Dakar aux coulisses de Canal 93, la salle de spectacle de Bobigny. En mission de volontariat de solidarité internationale, il a assuré la technique sonore des lieux tout en menant en parallèle un projet artistique personnel mêlant rap en wolof et influences jazz et afrobeat. On l’a suivi pendant toute la durée de sa mission, qui a pris la forme d’un tremplin scénique.

Chaque année, Canal 93, structure culturelle emblématique de Bobigny, propose une riche programmation aux habitants de la préfecture de la Seine-Saint-Denis et des alentours. En juin 2024, Abdoulaye Gomis, plus connu sous son nom de scène Thielo, débarquait de Dakar avec, dans ses valises, bien plus qu’un savoir-faire technique : un univers musical riche, des textes intimes et engagés, et une soif d’apprendre.

Pendant un an, il a jonglé entre consoles de mixage et carnets de rimes, rencontres humaines et répétitions intensives. En tant que volontaire de solidarité internationale, il était chargé de la gestion du son lors des spectacles et des cours de musique, s’occupant de la partie technique sous la responsabilité de son tuteur Matthieu.
Récit en trois actes de cette immersion artistique et citoyenne.

Acte I – Septembre 2024 : Le son avant les mots

Il est là, concentré, discret, mais s’activant, un micro dans une main et des câbles dans l’autre pendant que les familles de Bobigny déambulent entre les salles de Canal 93 pour les traditionnelles portes ouvertes de septembre. En ce jour de rentrée artistique, les professeurs de musique présentent leurs instruments et méthodes aux enfants. Dans l’ombre mais essentiel à la réussite de l’événement, Abdoulaye veille à ce que micros, enceintes et retours fonctionnent sans accroc. La mission est claire : faire en sorte que les démonstrations musicales se déroulent dans les meilleures conditions techniques. Mais très vite, ce rôle de technicien se double d’un dialogue inattendu. « J’ai vu tous ces professeurs jouer, improviser, vibrer… ça m’a donné envie de faire quelque chose avec eux », confie-t-il dans un sourire.

Dans le cadre de sa mission, Thielo (au fond) assure les réglages techniques pour la journée portes ouvertes de Canal 93. Au premier plan, Britto Jude, professeur de clavier. © France Volontaires

Car Thielo n’est pas qu’un volontaire : il est rappeur. Déjà à Dakar, il écrivait des textes en wolof, sa langue natale. Peu à peu, les discussions en régie laissent place aux sessions de répétition. Le courant passe : avec quelques musiciens de Canal 93 – eux-mêmes enseignants à l’école de musique – un groupe se forme, hybride et curieux. Ensemble, ils entament les premiers essais d’un projet inédit mêlant rap sénégalais, groove jazz et instrumentation live. Le volontariat prend une tournure inattendue : celle d’une collaboration artistique à part entière.

Acte II – Décembre 2024 : La scène comme horizon

La salle est pleine à craquer. Ce soir-là, Canal 93 accueille une soirée dédiée aux musiques africaines. Dans les loges, Thielo ajuste sa tenue – un pantalon de survet’ et un hoodie assorti gris-argenté – et délaisse pour une fois son éternelle casquette pour arborer d’élégantes tresses tirées en arrière. Sur scène, ses complices accordent leurs instruments. Le jeune Sénégalais va donner son premier concert en France, accompagné de ses compères musiciens. Quand les lumières s’éteignent, c’est un autre visage d’Abdoulaye qui apparaît : souriant, habité, sûr de lui. Le public découvre un artiste à l’identité forte, aux textes ciselés, aux refrains entêtants. Il rappe en wolof, parfois en français, parfois en anglais, toujours avec cette intensité qui accroche les regards et émoustille les oreilles.

Sur les sons issus de sa mixtape FIT (Fight Imposer Tekki), il parle de son parcours, de ses doutes, de sa volonté de se battre et d’avancer. La fusion avec les musiciens fonctionne à merveille. À la guitare, Faris tisse des nappes jazz, tandis que Baptiste, le percussionniste, donne du souffle et que Britto, au clavier, soutient les envolées lyriques. Pour Thielo, cette soirée marque un tournant : il n’est plus seulement volontaire en coulisses, il est désormais artiste à part entière sur la scène de Canal 93.

Acte III – Mai 2025 : L’exigence du détail

Quelques jours avant la fin de mission – Thielo rentrera à Dakar au début du mois de juin – la scène de Canal 93 est baignée d’un calme studieux. Pas de public, pas d’applaudissements, juste quelques proches en public : c’est l’heure du « filage », cette ultime répétition en conditions réelles pour peaufiner les derniers détails d’un spectacle. Face à lui, Jasmine Remadna, chorégraphe et coach scénique, observe chacun de ses mouvements. Elle note, corrige, propose. « Tu peux t’autoriser à occuper l’espace », souffle-t-elle. Thielo écoute, recommence, se déplace, module sa voix. Entre deux conseils, il avale une ou deux gorgées d’eau, concentré sur les enchaînements.

Le filage dure toute la journée, entre réglages sonores, transitions musicales et postures à ajuster. L’objectif : rendre le spectacle cohérent, fluide, puissant visuellement. Pour Thielo, cette étape est un révélateur : il comprend l’importance du corps, du regard, du silence. Il apprend à respirer entre deux phrases, à capter l’attention sans forcément rapper. « Jasmine m’a aidé à me dépasser. Elle a transformé ma prestation en véritable performance », explique-t-il. Cette exigence nouvelle donne une dimension supplémentaire à son projet. En ce printemps 2025, l’aventure touche à sa fin, mais l’élan est lancé. Car Thielo n’a pas dit son dernier mot : sa scène, désormais, est sans frontières.

Bio express

Thielo a 26 ans. Habitué à fréquenter les événements culturels et musicaux de son quartier natal à Dakar, la musique fait partie de sa vie : il commence à rapper pour s’amuser en 2016. Grâce au soutien de son entourage, il sort un premier projet début 2024, une mixtape de huit titres. Sa mission de volontariat de solidarité internationale, qui a pu être mise en oeuvre dans le cadre du Fonds Équipe France (FEF-R), a été l’occasion pour lui de compléter sa formation technique, mais aussi d’expérimenter la scène en live avec des musiciens et de faire mûrir son projet artistique.
Abdoulaye Gomis, dit Thielo
Volontaire de solidarité internationale

La structure d'accueil

Canal 93 est une salle de musiques actuelles à Bobigny, dans la Seine-Saint-Denis. Le lieu accompagne la création musicale sous toutes ses formes. Au-delà des spectacles, Canal 93 accueille également quatre studios de répétition, un studio d’enregistrement et plusieurs espaces de travail dédiés. La structure soutient aussi bien les artistes émergents que confirmés, qu’ils soient amateurs ou professionnels. Le lieu est également un point de rencontre pour les habitants, les spectateurs et toutes les structures qui développent des projets en lien avec les musiques contemporaines et populaires.

Une pépinière pour sauver le « bambou africain »

© Ato Aikins /Unsplash

Plante emblématique des zones humides de l’ouest camerounais, le raphia vinifera — surnommé le « bambou africain » — structure les écosystèmes autant qu’il nourrit les traditions. Menacé par la déforestation et la surexploitation, il est aujourd’hui au cœur d’un projet de sauvegarde porté par l’association OCDD. Deux volontaires français, envoyés par Planète Urgence, se mobilisent pour sa survie..

Sur les terres verdoyantes de Bandrefam, petit village du Nord-Ouest du Cameroun, les tiges massives du raphia vinifera se dressent comme les piliers d’une cathédrale végétale. Le palmier géant aux larges feuilles n’est pas qu’un décor : il façonne l’habitat d’oiseaux, d’insectes et de mammifères, régule le cycle de l’eau, stabilise les sols, et, surtout, nourrit un lien séculaire entre les hommes et la forêt.

Planter 50 000 arbres d’ici 2026

Mais ce lien est fragile. Entre la déforestation galopante, les coupes non régulées et le dérèglement climatique, les populations de raphia sont en chute libre. Face à cette urgence, l’Organisation camerounaise pour le développement durable (OCDD), une ONG locale, a lancé un projet ambitieux de préservation de l’espèce. Parmi les divers projets mis en œuvre, une pépinière a ainsi vu le jour à Bandrefam.

Deux volontaires en service civique international, Anaïs Charpin et Benjamin Royer, ont rejoint les rangs de l’OCDD via l’ONG française Planète Urgence. Leur engagement s’inscrit à la fois dans la reforestation concrète et dans une stratégie plus large de sensibilisation et de structuration, conformément aux objectifs de l’Agenda 2030 des Nations Unies.

« Dans le cadre de ma mission je suis chargée de la communication, notamment l’animation des réseaux sociaux et la création de supports. J’aide à développer les partenariats, à sensibiliser dans les établissements scolaires sur les enjeux climatiques, à encadrer des bénévoles et à contribuer à un projet touristique. J’apporte également mon soutien à la pépinière lorsque je suis au village, dans le cadre du projet de reboisement et de sensibilisation autour du Raphia Vinifera », explique Anaïs, en mission depuis plusieurs mois. Elle a notamment initié un circuit écotouristique au cœur même de la pépinière. Objectif : éduquer les visiteurs tout en finançant le projet.

La pépinière n’est pas qu’une vitrine, mais un centre névralgique de résilience. « Le projet consiste à reboiser le Raphia Vinifera (bambou africain). Nous sommes déjà à 20 000 graines plantées et 5 000 autres plants de raphia sont prêts à être mis en terre dans leur emplacement définitif. Le but est de planter 50 000 arbres d’ici 2026 », poursuit-elle. À mesure que les semis grandissent, c’est tout un écosystème qui se reconstruit, petit à petit.

Sensibiliser les populations locales à l’importance du raphia vinifera

Benjamin, quant à lui, crée une base de données sur le raphia vinifera : « J’ai monté une étude socio-économique pour recueillir des données de fonds sur la compréhension du raphia et le niveau de sensibilisation à sa destruction. J’ai aussi participé au développement de la pépinière à Bandrefam, qui permet la germination des graines de Raphia et ensuite leur stockage pour les planter définitivement lors de la saison des pluies ».

Mais tout n’est pas si simple lorsqu’on tente de changer les mentalités. « J’ai éprouvé des difficultés lors de mes interviews pour mon enquête. J’ai dû faire face à la méfiance de personnes qui ne comprenaient pas l’objectif du projet, ni la pertinence de mes questions. J’ai essuyé beaucoup de refus d’interviews », confie-t-il. Cette incompréhension illustre le fossé entre urgence écologique et réalité quotidienne, où la survie prime parfois sur la conservation.

© OCDD

Anaïs, elle, a dû affronter d’autres obstacles. « J’ai été confrontée aux différences linguistiques ; le vocabulaire diffère. Certains mots n’ont pas la même signification qu’en France, ce qui peut compliquer la communication. J’ai également appris à faire face à l’imprévu… J’ajouterai également qu’en tant que femme, j’ai régulièrement dû m’imposer pour être écoutée dans le milieu professionnel, ce qui n’est pas toujours évident. »

Et pourtant, la dynamique est en marche. Dans un monde où des espèces déclinent souvent dans l’indifférence, le raphia vinifera bénéficie à Bandrefam d’une attention soutenue. Grâce aux efforts conjoints de l’OCDD, des volontaires et des habitants, sa préservation progresse lentement mais sûrement. Le chemin reste long, mais les premières graines — au sens propre comme au figuré — ont été plantées.

Le raphia vinifera, qu'est ce que c'est ?

Le palmier- raphia est une plante de la famille des arecacées que l’on rencontre dans les milieux marécageux et le long des fleuves, les environs des sources, les marées plus ou moins permanents. C’est une plante dont le robuste tronc est recouvert sur sa base par des vieilles palmes. Il forme aussi des forêts galeries le long de certains grands fleuves et des lagunes. En l’absence des données officielles sur cette plante multifonctionnelle, il convient de noter que Les raphières non exploitées il y a plus d’une décennie, en raison de l’impact de l’exode rural, sont des associations végétales stables. Elles entretiennent l’humidité, enrichissent le sol et participent à la protection de la couche d’ozone. Par exemple, un palmier adulte absorbe environ 25 kg de dioxyde de carbone (CO2) par an. De plus, le palmier-raphia du fait de ses multiples usages génère d’importants revenus pour les habitants des villages. Il constitue une véritable providence pour ces populations car il est à la base de leur économie. (source : association OCDD)

Bio express

Anaïs Charpin est diplômée de l’École internationale du management responsable, elle est titulaire d’un Bachelor en coordination de projets de développement. Après, entre autres, une expérience au pair en Grande-Bretagne et un stage en animation de tiers-lieu en Auvergne, elle est depuis octobre 2024 en service civique international au Cameroun. En fin de mission, elle souhaite réaliser une alternance dans le domaine de l’économie sociale et solidaire (ESS) ou la responsabilité sociale des entreprises (RSE) afin de poursuivre son cursus en mastère ESS à Lyon.
Anaïs Charpin
Service civique international

Bio express

Benjamin Royer est titulaire d’une Licence de biodiversité avec option Biologie Écologie Évolution (BEE) à l’université de Tours. Il est depuis octobre 2024 en service civique international au Cameroun. A son retour de mission, il entend poursuivre son cursus universitaire dans le cadre d’un Master sur les Insectes afin de compléter cette expérience pratique en SCI avec les connaissances théoriques pour travailler en gestion de projet de protection de la biodiversité.
Benjamin Royer
Service civique international

À Abidjan, des marionnettes donnent une seconde chance aux jeunes de la ville

Un défilé de marionnettes géantes dans les rues d’Abidjan. © France Volontaires

Accueilli au sein de l’académie Ivoire Marionnettes jusqu’au mois de janvier dernier, Schadei Jean-Pierre, avait posé ses valises à Abidjan, en Côte d’Ivoire, pour une mission de coordination de projets culturels.  Il s’est pleinement investi dans le développement et la promotion d’initiatives artistiques locales.

Pendant un an, de janvier 2024 à janvier 2025, Schadei a arpenté les rues d’Abidjan avec la conviction profonde que l’art peut transformer des vies. À 24 ans, ce jeune Guadeloupéen a en effet rejoint la Côte d’Ivoire dans le cadre d’une mission de volontariat de solidarité internationale via le programme Territoires Volontaires de France Volontaires. Accueilli au sein de l’académie Ivoire Marionnettes, il a coordonné plusieurs projets culturels dans le cadre de son volontariat. Son terrain de jeu : les coulisses d’un théâtre pas comme les autres, où les marionnettes donnent la parole à ceux qu’on n’entend pas.

Accompagner par la culture les jeunes marginalisés

Son parcours est à son image : pluriel. Une double formation en école de commerce et en école d’informatique, une solide expérience associative comme professeur de mathématiques auprès de jeunes en difficulté, et une passion affirmée pour l’entrepreneuriat. Ce volontariat s’inscrit dans une quête de sens. « Je m’étais engagé car les missions d’Ivoire Marionnettes, axées sur l’intégration par l’éducation et la formation, me tenaient particulièrement à cœur. Dans cette structure, nous accompagnons des jeunes marginalisés dans le tissu culturel, social et économique ivoirien grâce à des formations artistiques variées : marionnettes, danse, couture, peinture, sculpture… » explique-t-il, rappelant en outre que le fait que la structure soit en Côte d’Ivoire a renforcé sa volonté de s’impliquer, en raison des liens historiques étroits entre son île, la Guadeloupe, et ce pays d’Afrique de l’Ouest.

Dans le cadre de ces missions, Schadei a participé activement à la recherche de financements, à la rédaction de projets culturels, et au développement de partenariats avec de grandes institutions comme l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), l’Agence française de développement (AFD), les Instituts français et les ambassades.
Mais au-delà des chiffres et des dossiers, c’est sur le terrain qu’il a vibré. Il garde ainsi en mémoire un souvenir marquant : «Le meilleur moment de ma mission a été le jour où Françoise Remarck, ministre de la Culture et de la Francophonie, est venue avec son équipe sur le site de l’association pour marquer publiquement l’agrément permettant à l’Académie Ivoire Marionnettes d’obtenir une certification de l’État et de devenir officiellement un centre de l’École de la deuxième chance ».  Une victoire collective, une reconnaissance institutionnelle, et une promesse pour l’avenir des jeunes formés.

"Cette expérience m’a permis d’explorer de nouvelles façons de travailler et de développer mes compétences en gestion de projet"

Schadei Jean-Pierre , volontaire de solidarité internationale

S’il n’y a pas de trophée à décrocher, Schadei mesure l’impact de son engagement à l’aune des transformations qu’il observe. « Sur le plan personnel, j’ai eu l’opportunité de découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture et de rencontrer des personnes formidables. Sur le plan professionnel, cette expérience m’a permis d’explorer de nouvelles façons de travailler et de développer mes compétences en gestion de projet », détaille-t-il.

Ni nostalgique, ni pressé de rentrer, il a décidé de prolonger son aventure sur le continent. «Je prévois de rester en Afrique de lOuest pendant quelques années. Cest une région que je nai pas encore fini de découvrir.» À ceux qui hésitent à s’engager à l’international, il adresse un conseil limpide : «Le volontariat est une expérience unique, à la fois enrichissante et transformative. Il permet de découvrir de nouvelles cultures, de rencontrer des personnes inspirantes et davoir un impact concret.»

Bio express

Originaire de Guadeloupe, Schadei Jean-Pierre est titulaire d’un diplôme universitaire en entrepreneuriat obtenu à l’IAE de Nantes en 2024. Il est également lauréat du statut d’étudiant-entrepreneur, délivré par la fondation Pépite France, qui l’a accompagné dans le cadre de la création de la société Twain, dont il est cofondateur. Depuis la fin de sa mission de volontariat, il est resté en Côte d’Ivoire où il a créé Kijan, une société spécialisée dans le conseil et l'accompagnement en recherche de financements pour les entreprises, les ONG ou les start-ups.
Schadei Jean-Pierre
Volontaire de solidarité internationale

La structure d'accueil

La Compagnie Ivoire Marionnettes présente une variété de spectacles ou créations et forme la jeunesse aux métiers de l’art de la marionnette. Basée en Côte d’Ivoire, elle existe depuis 2007. Son engagement artistique contribue depuis plus d’une décennie à la valorisation de la culture africaine à l’échelle mondiale en plus de soutenir la protection d’un environnement social durable.

Sport et insertion : Visions Mêlées compte sur Manoa pour créer du collectif

Manoa a mis en place des séances d’entraînement pour monter une équipe de basket pour des jeunes de la banlieue bordelaise. © France Volontaires

À Pessac, dans la banlieue de Bordeaux, un entraînement de basket pas comme les autres a lieu chaque lundi. Aux commandes, Manoa, jeune Fidjien en service civique international, incarne la philosophie de l’association Visions Mêlées : croiser les parcours, bousculer les cases, et marquer des points dans la vie.

Au complexe sportif de Bellegrave, à Pessac (Gironde), ils sont une demi-douzaine, filles et garçons, à s’être donné rendez-vous sous le panier du terrain de basket en plein air. Un ciel d’encre flotte au-dessus des têtes. Il est 14h en ce lundi de mars, et la ville semble en veille. Mais sur l’asphalte, on commence à s’activer. En survêtements et baskets, pour certains avec un chasuble jaune canari sur le dos, on enchaîne les passes, les dribbles, les encouragements. Et au milieu d’eux, une voix résonne, qui mêle anglais des îles Pacifique et français balbutiant: « Vas-y, good job ! Encore ! Allez, encore un shoot ! » C’est Manoa, tout sourire, qui mène la séance.

 Sydney Djiropo (de dos), fondateur de l’association Visions Mêlées, en présence de l’équipe de basket pour laquelle Manoa assure les séances d’entraînement à Pessac, dans la banlieue bordelaise. © France Volontaires

Manoa vient des Fidji. Il a 22 ans, un rire franc, et une passion pour le basket qui a traversé les océans. Il est arrivé à Bordeaux il y a quelques semaines dans le cadre d’un service civique international de sept mois au sein de l’association Visions Mêlées, via Cool’eurs du monde. Ce lundi, c’est lui qui est aux commandes d’un atelier pas tout à fait comme les autres. Car ici, on ne vient pas seulement apprendre à shooter ou à défendre. On vient respirer. Reprendre confiance. Retrouver le goût du collectif.

Le sport comme langage universel

« Manoa, on ne lui a pas dit quoi faire. On l’a formé à la méthodologie de projets mais on lui a laissé de la place », explique Sydney Djiropo, fondateur de Visions Mêlées, qui observe la séance au bord du terrain. Cet ancien rugbyman semi-pro a monté son association il y a huit ans. L’idée, à l’origine, c’était d’aider les sportifs à préparer leur reconversion. Puis le projet a pris de l’ampleur : artistes précaires, étrangers, jeunes en décrochage… tous ceux que les dispositifs classiques peinent à atteindre trouvent chez Visions Mêlées un tremplin. « L’objectif, ce n’est pas de te demander ton CV. C’est de le construire avec toi », défend cet ex-ailier de l’Union Bordeaux-Bègles.

Sur le bitume, Manoa enchaîne les exercices. Échauffement, petits jeux, mise en situation. Un ballon passe de main en main, les rires éclatent, quelques regards d’abord timides s’ouvrent peu à peu. « On travaille avec des jeunes éloignés de l’emploi ou des étrangers en apprentissage du français, explique Sydney. Le sport, c’est un langage universel. Et le basket, c’est parfait pour ça. T’as besoin de l’autre. Tu ne peux pas jouer seul. »

"Ce qui fonctionne vraiment, avant tout, c’est la relation, l’écoute... Et c’est là que les volontaires comme Manoa ont un rôle déterminant. Ils sont sur le terrain, au contact. Ils apportent leur regard."

Sydney Djiropo, fondateur de l’association Visions Mêlées

C’est exactement ce que cherche Visions Mêlées : créer des passerelles. Pour Sydney, les ateliers sont autant de prétextes à la rencontre. « On mêle les publics. Ils font du sport ensemble, ils apprennent le français ensemble. C’est comme ça que les choses se passent. » Parfois aussi, ils apprennent la cuisine ensemble. Grâce à Food Ruck (un clin d’œil au ruck du rugby), un camion coloré qui sillonne les quartiers, mais pas pour vendre des frites ou des pizzas. À son bord, des jeunes en insertion, encadrés par des pros de la cuisine et de l’accompagnement social. Ici, on apprend à cuisiner, à gérer les commandes, à tenir une caisse. « C’est un outil pédagogique, mais aussi un vrai tremplin vers l’emploi », explique Sydney. « Grâce au Food Ruck, ils acquièrent des compétences concrètes, découvrent le travail en équipe, reprennent confiance. » Le camion se pose régulièrement dans les quartiers, où il offre des goûters gratuits aux gamins qui participent aux ateliers sportifs ou culturels proposés par Visions Mêlées ou ses partenaires. Une façon aussi d’aller à la rencontre des familles, des petits frères…

Un tremplin vers l’emploi

« Visions Mêlées, c’est une équipe de professionnels : il y a des éducateurs spécialisés, des juristes, des profs de FLE (français langue étrangère)… mais tu te rends compte que ce qui fonctionne vraiment, avant tout, c’est la relation, l’écoute, les petites choses concrètes. Et c’est là que les volontaires comme Manoa ont un rôle déterminant. Ils sont sur le terrain, au contact. Ils apportent leur regard », plaide Sydney.

Le soleil perce finalement entre les nuages. L’entraînement touche à sa fin. Les jeunes s’assoient quelques minutes, respirent fort, sourient. Manoa les remercie, prend quelques nouvelles, demande qui revient le lundi suivant. La plupart lèvent la main.

Avant de ranger les ballons, il lève les yeux vers le panier. « J’attends beaucoup de cette mission et du travail que je mène avec Visions Mêlées. Nous avons quelque chose de similaire chez moi, qui s’appelle Bula Hoops, un programme destiné aux jeunes enfants de 5 à 14 ans. Même si à Bordeaux, mon public cible est plus âgé – je ne savais pas qu’après 16 ans, il n’était plus obligatoire d’aller à l’école – j’espère que je serai en mesure de ramener tout ce que j’ai appris à faire aux Fidji. » Il sourit, et le panier au-dessus de lui, un peu cabossé, semble lui rendre son clin d’œil.

Quatre volontaires fidjiens en France grâce au FEF-R

Outre Manoa, déployé pour sept mois chez Visions Mêlées, trois autres volontaires fidjiens sont arrivés en France au mois de janvier dernier : Makarita Nakavulevu , en mission chez Drop de Béton (également dans l’agglomération bordelaise), Henry Hiramatsu, au sein de l’association Scoope à Saumur (Maine) et enfin Joshua Yee, mobilisé auprès du du coach de tennis de table de Hennebont (Morbihan).

Leur déploiement a été financé par le Fonds Équipe France (FEF)-R, l’un des outils de coopération bilatérale du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. Ce dispositif permet aux ambassades de soutenir des projets de coopération : dans le cas des Fidji, accompagner plusieurs axes stratégiques dans le domaine sportif comme l’accès aux infrastructures, le soutien à des politiques d’inclusion, ou de lutte contre les discriminations et de réinsertion par le sport.

L’arrivée des quatre volontaires s’inscrit dans le cadre du principe de réciprocité, qui permet à des jeunes de pays partenaires de réaliser en France des missions de solidarité internationale dans des structures à but non lucratif ou des collectivités locales.

Bio express

Manoa Keteca a 20 ans. Il est actuellement étudiant en économie à l'Université du Pacifique-Sud à Suva, la capitale des îles Fidji. Il réalise sa mission de solidarité internationale en réciprocité dans le cadre d'un Service civique international porté par l'association Cool'eurs du monde (membre de France Volontaires), du 13 janvier au 13 août 2025. Objectif : faciliter l'insertion sociale et professionnelle des personnes demandeuses d'asile, migrantes ou des jeunes éloignés de l’emploi par la pratique du sport, l'accès à des évènements culturels et l'accompagnement professionnel.
Manoa Keteca
Service Civique international