© Terres en mêlées
À Dakar et Tananarive, Amélie Mimault et Marie Diomat partagent un même combat : promouvoir le rugby féminin comme outil d’émancipation et de lutte contre les inégalités. À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, elles racontent leur mission de volontariat international, leurs défis et l’impact du sport sur la condition féminine.
Le 8 mars célèbre la Journée internationale des droits des femmes, une occasion de rappeler que l’égalité entre les sexes est un combat quotidien. À travers le monde, de nombreuses initiatives visent à promouvoir le rôle des femmes dans des univers où elles restent encore trop souvent marginalisées. C’est le cas du sport, et en particulier du rugby, une activité qui reste encore majoritairement pratiquée par les hommes.
Amélie Mimault s’est engagée dans un volontariat de solidarité internationale auprès de la Maison du rugby au Sénégal, tandis que Marie Diomat est mobilisée en service civique par l’association Terres en Mêlées à Madagascar. Toutes deux ont choisi de s’engager sur le terrain pour bousculer les idées reçues et offrir aux jeunes filles un espace où elles peuvent s’exprimer librement.
Amélie Mimault, coordinatrice de projets à la Maison du rugby du Sénégal. © Marion Quintin / France Volontaires
Pourquoi as-tu choisi de t’engager dans le développement du rugby féminin ?
Amélie Mimault : Ce qui m’a attirée dans cette mission, au-delà de l’aspect sportif du rugby, c’est avant tout les valeurs qu’il véhicule, en particulier celles liées à la promotion du sport féminin. L’idée d’aider des jeunes filles à s’épanouir grâce à l’activité physique m’a profondément touchée.
De plus, j’avais cette envie d’aller au-delà de mon quotidien habituel et de découvrir un autre mode de vie. Le volontariat m’a offert cette opportunité d’apprendre, de m’engager dans des causes qui m’importent, tout en me permettant de contribuer à une cause plus grande. C’est aussi un moyen de repousser mes limites personnelles et professionnelles, dans un cadre différent de tout ce que j’avais connu jusque-là.
Marie Diomat : Ce qui m’a immédiatement attirée dans cette mission, c’est ma passion pour le sport, même si le rugby n’est pas ma discipline de prédilection. De plus, en tant que femme, je me sens pleinement en phase avec les valeurs de l’association. Si mon engagement peut contribuer à améliorer les conditions de vie des femmes à Madagascar, alors ma mission prend tout son sens !
"Les filles commencent à prendre confiance en elles, à se faire entendre et à se faire un cercle d’amies solidaires"
Amélie Mimault, volontaire de solidarité internationale
Concrètement, quel est ton rôle dans le projet ?
Amélie : Je suis responsable et coordinatrice de projets au sein de la Maison du rugby. C’est une mission polyvalente : j’organise des activités autour du rugby et de l’éducation, en mettant l’accent sur la participation des filles.
Le programme “Rugby Rising Play” vise à encourager la pratique du rugby chez les jeunes filles, mais au-delà du sport, il cherche à promouvoir des valeurs d’épanouissement et de solidarité féminine. Nous organisons des entraînements dans des écoles, mais aussi des ateliers sur des thèmes essentiels comme la santé, l’hygiène menstruelle, et la lutte contre les violences basées sur le genre. Le but est de créer un environnement sûr et inclusif pour les filles, et d’encourager leur autonomisation grâce au sport.
Marie : Je suis mobilisée dans le cadre du projet Ampi’zay de l’association Terres en Mêlées, qui travaille à la réduction des violences basées sur le genre dans les collèges de Madagascar. Grâce à mon expérience en animation sportive, je travaille en collaboration avec les éducateurs lors des interventions dans les établissements scolaires, où le rugby sert de vecteur pour l’éducation et le développement. Je participe à la réflexion et à l’animation d’ateliers, tant sportifs qu’éducatifs.
Terres en Mêlées a développé une approche éducative novatrice, le Rugby for Change. Cette initiative combine la pratique du rugby, la sensibilisation à des enjeux de développement et l’acquisition de compétences de vie. Ainsi, le rugby devient un véritable levier de transformation sociale. L’objectif n’est pas seulement de former de jeunes sportifs et sportives mais des citoyens.
Nous intervenons régulièrement dans les écoles pour transmettre des valeurs éducatives, en mettant l’accent sur la pratique du rugby en mixité. Cette approche vise à remettre en question les stéréotypes de genre et à favoriser l’égalité entre les filles et les garçons.
Marie Diomat, volontaire mobilisée auprès de l’association Terres en Mêlées , qui participe à la réduction des violences basées sur le genre dans les collèges de Madagascar © DR
Quels changements observes-tu chez les jeunes filles grâce à ce projet ?
Amélie : Le projet a déjà permis à de nombreuses filles de s’impliquer dans des activités sportives, mais aussi de changer leur vision du sport et de leur place dans la société. Les filles commencent à prendre confiance en elles, à se faire entendre et à se faire un cercle d’amies solidaires. C’est particulièrement significatif dans une culture où les femmes ont parfois du mal à trouver leur place dans certains espaces publics comme le sport.
Marie : Ce qui m’a le plus marquée, c’est de voir des jeunes filles avoir peur de pratiquer un sport considéré comme “violent” au début puis devenir de plus en plus confiante et être capables de jouer en mixité sans avoir peur du contact. C’est tout l’importance de montrer aux jeunes filles qu’elles peuvent jouer au même niveau que les garçons.
"Chaque action, aussi modeste soit-elle, a un impact dans la lutte pour les droits des femmes"
Marie Diomat, volontaire de solidarité internationale
Quel moment fort retiens-tu de ton volontariat ?
Amélie : Un moment particulièrement marquant a été ma rencontre avec un groupe de jeunes filles de 10 à 13 ans sur la plage de Yoff. On a discuté de leur vie, de leurs études et c’est là qu’une d’elles m’a expliqué qu’elle n’était plus scolarisée. C’était un choc de réaliser que, dans ce contexte, à 13 ans, certaines ne vont plus à l’école. Cela m’a fait prendre conscience de réalités auxquelles je n’avais jamais pensé et m’a motivée à poursuivre mon engagement.
Que représente la Journée internationale des droits des femmes pour toi ?
Marie : Je pense qu’il ne faut pas attendre une journée spécifique pour célébrer et défendre les droits des femmes, mais cette date reste tout de même importante. Elle symbolise des années de lutte pour une égalité qui, selon moi, n’est pas encore totalement atteinte.
Il est important de se rappeler que le changement ne se produit pas du jour au lendemain, mais que chaque action, aussi modeste soit-elle, a un impact dans cette lutte. Continuons d’avancer ensemble, en soutenant les femmes et en travaillant pour un avenir où l’égalité des sexes est une norme et non un combat.
© Marion Quintin / France Volontaires et Terres en Mêlées