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Entre la Martinique et le Bénin, un océan de projets

A Ouidah au Bénin, la Porte du non-retour commémore la déportation de millions de personnes vers les Antilles et l’Amérique latine dans le cadre de la traite d’esclaves noirs en provenance d’Afrique. © jbdodane

Réunies par un passé douloureux et un récent jumelage, les villes des Anses d’Arlet et d’Ouidah (au Bénin) construisent ensemble des ponts au-dessus de l’Atlantique : elles travaillent autour de projets communs dans le domaine culturel et touristique (entre autres). Comlan Pacôme Alomakpe, récemment rentré au Bénin après dix mois en Martinique, revient avec nous sur sa mission.

Si l’Atlantique sépare la commune des Anses d’Arlet, en Martinique, de celle d’Ouidah, sur la côte du Bénin, les deux collectivités travaillent main dans la main depuis plusieurs années. En 2019, un jumelage a ainsi été mis en place entre les deux villes, rappelant les liens forts qui unissent les Antilles et l’Afrique de l’Ouest au travers d’un passé marqué par la pénible histoire de l’esclavage. Aujourd’hui, les Anses d’Arlet et Ouidah mettent leur énergie en commun autour de partenariats sur les plans touristique, environnemental, culturel, ou social, tandis que les associations de pêcheurs des deux cités développent également des collaborations.

C’est dans ce contexte que des volontaires de solidarité internationale (VSI) martiniquais sont déployés au Bénin, tandis que leurs homologues béninois viennent sur cette île des Caraïbes, conformément au principe de réciprocité dans le volontariat international d’échange et de solidarité. Comlan Pacôme Alomakpe faisait partie de ces derniers : rentré au Bénin à la mi-décembre, nous avons fait un bilan avec lui du déroulement de sa mission dans les Antilles, où il était chargé du développement de plusieurs activités liées à la valorisation du patrimoine, à l’éducation, au tourisme et à la pêche.

Concrètement, quelles activités as-tu pu mettre en œuvre dans le cadre de ta mission ?

J’ai eu le plaisir d’organiser des échanges thématiques entre acteurs socio-économiques martiniquais et béninois concernés par une même thématique, qui ont pu se rencontrer en visio-conférence et échanger sur leurs pratiques respectives. Dans le même esprit, des artistes béninois et martiniquais ainsi que des marins pêcheurs des deux territoires ont eu le plaisir d’échanger avec leurs homologues outre-Atlantique. 

Les deux villes ont en commun un passé en lien avec l’esclavage : comment cela se matérialise-t-il ?

Plusieurs projets sont en cours. Le premier est celui de la Porte du retour, un site mémorial qui serait à l’image de la Porte du non-retour de Ouidah, érigée en 1995 avec des matériaux durables (béton et bronze) et une intervention artistique relevée. Ces deux sites vont se connecter pour valoriser la mémoire de la traite des Noirs et renforcer les liens de fraternité et de solidarité entre les communautés de Ouidah et celles des Antilles.

J’ai également collaboré à l’organisation des Journées de la Mémoire et de la Réconciliation en mai 2024. Cette initiative cherche à renforcer les relations entre le Bénin et la Martinique, où la communauté afrodescendante est importante, en offrant un cadre propice à la consolidation de ce lien culturel. Elle met l’accent sur le partage et les réminiscences des héritages africains au sein des territoires afrodescendants, tout en promouvant des valeurs de paix et de cohésion entre les peuples. Durant une semaine, des artistes et des scientifiques des deux territoires ont pu se rencontrer et célébrer le 22 mai, journée de l’abolition de l’esclavage en Martinique. Nous avons ainsi organisé un spectacle appelé « Racine et Réconciliation » dont des représentations ont été données dans plusieurs communes martiniquaises (Le François, Sainte Anne, Basse Pointe, Saint Esprit et Saint Pierre).

"Valoriser la mémoire de la traite des Noirs et renforcer les liens de fraternité et de solidarité entre les communautés d'Ouidah et des Antilles"

Avec ta formation dans le domaine du tourisme et de la gestion du patrimoine culturel, ce volontariat répondait-il à tes attentes ?

Effectivement, j’ai choisi de m’engager car le volontariat est une opportunité unique pour collaborer et rencontrer des personnes dans mon domaine d’expertise. J’ai ressenti le besoin de mettre à l’épreuve mes connaissances et de m’ouvrir à d’autres horizons. C’était l’occasion d’acquérir de nouvelles connaissances ainsi que de nouvelles compétences. La Martinique étant une réserve de biosphère inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco. J’ai été attiré par l’ébullition artistique et culturelle de l’île. De ce point de vue-là, toutes mes attentes ont été comblées.

En revanche, j’aurais aimé pouvoir rester plus longtemps. De nombreux projets ont été mis en place et pour lesquels des demandes de financement ont été formulées. Nous sommes au début d’un long processus auquel je ne pourrai malheureusement pas continuer d’apporter physiquement et en présentiel, ma modeste contribution. Une mission d’un an, c’est court, c’est un délai qui ne permet pas d’assister à la concrétisation des initiatives qui sont à l’étape embryonnaires. Il aurait pertinent que la mission soit renouvelée pour un an de plus.

D’un point de vue personnel, cette expérience a-t-elle également été l’occasion de découvrir la vie en Martinique ?

Oui, mon immersion m’a même offert une expérience dans l’art culinaire, avec l’apprentissage de la cuisine martiniquaise et la découverte des liens culturels entre les traditions culinaires du Bénin et celles de la Martinique. À travers cette expérience, j’ai le sentiment que je suis en train de reconstruire mon humanité, de redécouvrir ce qui nous lie en tant qu’êtres humains. Ce séjour m’a d’ailleurs inspiré pour le prochain livre que je suis en train d’écrire !

Bio express

Comlan Pacôme Alomakpe est titulaire d’un master 2 en Gestion du patrimoine culturel et d’un autre en Tourisme et patrimoine culturel, obtenus à Cotonou au Bénin. Il a réalisé une mission de VSI en tant que coordonnateur technique de la coopération décentralisée entre Les Anses d'Arlet et Ouidah. Il est par ailleurs vice-président du think tank Génération des vigilants,un laboratoire d'idées qui réfléchit, propose et agit en vue du bien-être des citoyens et du développement intégré.
Comlan Pacôme Alomakpe
Volontaire de solidarité internationale

© jbdodane

Les volontaires passent les fêtes en mission

 Elsa, volontaire de solidarité internationale au Ghana. © DR

Partir en volontariat international d’échange et de solidarité (V.I.E.S), c’est parfois s’engager (très) loin de chez soi. Nombreux sont les volontaires qui restent dans leur pays de mission au moment des fêtes de fin d’année, pour les passer en pleine immersion. Petit tour du monde du Noël des volontaires avec Krishma en Inde, Clémence au Congo, Elsa au Ghana et Maéva au Togo…

C’est comment de passer les fêtes loin de chez soi ?

« Je prévois les cadeaux à l’avance, je veille à bien appeler mes proches, je leur demande de m’envoyer des photos des décorations à la maison, de ma ville. J’ai quand même cette impression de rater un moment important avec eux : le fait de célébrer ensemble la fin d’une année et le début d’une autre, mais je reste proche sans l’être physiquement. »
Krishma, volontaire de solidarité internationale (VSI) chez France Volontaires en Inde

« J’ai toujours passé Noël dans le froid près du poêle avec un chocolat chaud, donc j’ai du mal à imaginer que c’est bientôt Noël. C’est donc pour moi un plaisir de découvrir une nouvelle façon de célébrer cette fête avec les religieuses et les religieux et les autres volontaires qui m’entourent »
Clémence, VSI chez ASLAV, au Congo

« J’aurais pu rentrer en France mais j’ai décidé de rester au Ghana. Je suis contente de pouvoir vivre une nouvelle expérience. De plus, j’ai pas mal d’amis qui sont aussi ici pour les fêtes : nous allons donc organiser un dîner de Noël entre nous, cuisiner un repas français, boire du bon vin et s’offrir des cadeaux. »
Elsa, VSI chez France Volontaires Ghana

« C’est mon 29ème Noël, mais le premier sans ma famille. Je suis curieuse à l’idée de vivre cette fête traditionnelle et un peu magique, loin du froid et des miens. Je serai avec ma famille d’accueil ! Celle que je me suis faite au Togo. Donc une fête 100% togolaise à priori. »
Maéva, VSI chez France Volontaires Togo

Des différences entre la France et ton pays d’accueil ?

« En Inde, on voit aussi de belles décorations dans les rues : il y a des sapins, des lumières, des guirlandes. J’ai eu l’occasion de visiter des marchés de Noël aussi, sans vin chaud, mais tout aussi chaleureux et créatifs ! Mais avec la plage, cette chaleur et les palmiers, on oublierait presque qu’on est au mois de décembre.
J’ai célébré les fêtes au Népal et en Pologne, lorsque je travaillais avec une ONG américaine. J’ai l’impression que l’ambiance que le gens créent reste assez similaire quel que soit le lieu : un côté chaleureux, magique, convivial. En Pologne, j’ai le souvenir d’avoir passé du temps à faire des puzzles près de la cheminée avec d’autres volontaires ou encore d’avoir cuisiné des biscuits en forme de sapin. Au Népal, notre dîner de Noel était composé de plats du monde et nous dansions sur des musiques népalaises.»
Krishma

« En France nous misons beaucoup sur la décoration, les cadeaux, sur la notion de faire plaisir à l’autre, alors qu’au Congo je ressens moins ce besoin de décorer mais plus la nécessité de renforcer les liens familiaux »
Clémence

« Les célébrations se font généralement en extérieur, autour d’un barbecue, dans les jardins, sur la plage… C’est un moment convivial où les familles se retrouvent (la diaspora revient), un peu comme en France. En revanche, la tradition des cadeaux est plus rare. Disons que c’est beaucoup moins «marketing» qu’en France. C’est également beaucoup plus religieux car le Ghana est chrétien : quasiment toutes les familles vont à la messe le 25 décembre, et la religion occupe l’espace public, encore plus que d’habitude. 
Ce qui me surprend aussi, c’est que les gens chantent et dansent dans les rues : il y a un véritable esprit communautaire qui se manifeste par des rassemblements spontanés. Cela contraste avec le Noël plus calme et intime que l’on trouve en France. »
Elsa

« Voir un énorme Père Noël gonflable emmitouflé dans son costume rouge, sous 35°C, comme décoration devant un grand supermarché du centre-ville, ça me fait sourire. Ici, l’approche de Noël est une période où se mêle la joie et la frustration. La joie en cette période festive et de partage, la frustration du fait du manque de moyen et ce que ça engendre. C’est également une période de forte activité pour les associations qui se mobilisent pour récolter des fonds, afin d’offrir un Noël aux enfants qui n’y ont pas accès. La solidarité se ressent très fortement en cette période. »
Maéva

"Les fêtes sont une période de forte activité pour les associations qui se mobilisent pour récolter des fonds, afin d’offrir un Noël aux enfants qui n’y ont pas accès."

Maéva, au Togo

Un truc qui te manque ?

« Je suis assez nostalgique des dîners de famille, des musiques et films de Noël, des marathons Harry Potter avec mon frère, du sentiment d’avoir froid lors des balades au lac près de chez moi. Je pense que mes proches ressentent encore plus un manque du fait de mon absence. »
Krishma

« Le fait de ne pas avoir pu acheter un sapin et le décorer, par manque de moyens. Et le pain d’épices et la tarte flambée me manquent beaucoup !»
Clémence

« Ma famille tout d’abord ! Noël chez moi est un moment assez intime, juste avec ma famille proche. Et toujours très festif. La nourriture aussi. J’aime bien les plats ghanéens, mais le repas de Noël français reste quand même assez exceptionnel. On va cuisiner français avec mes potes, mais c’est sûr que ça ne sera pas pareil. »
Elsa

« Ma famille. Mes amis. Ils sont mon équilibre, donc pour des moments forts comme celui-ci, le manque se fait toujours ressentir. Du reste, je suis plutôt curieuse de découvrir l’ambiance d’un Noël familial à la togolaise plutôt que dans l’anticipation nostalgique d’un Noël à la française. »
Maéva

Des souhaits pour l’année qui arrive ?

« Le fait d’être en mission en Inde pour deux ans, est très important pour moi. J’ai des origines dans le Nord de l’Inde, le Punjab, mais je vis dans une partie de l’Inde que je connais moins, le Tamil Nadu. J’ai soif d’apprendre à connaître cette région. Et j’ai aussi vraiment envie de prendre part aux projets de France Volontaires en Inde, de proposer des idées, de rencontrer des partenaires et les volontaires, d’avoir une belle dynamique avec les équipes ici. »
Krishma

« Partir en mission dans le pays en visitant nos différents centres de santé qui sont éparpillés un peu partout dans la République du Congo. Et profiter des paysages qui sont magnifiques. »
Clémence

« Continuer à m’investir à fond dans ma mission. Nous avons plein de beaux projets à venir en 2025 au Ghana et j’ai hâte de les voir se concrétiser. Sur un plan plus personnel, j’espère que mon intégration se poursuivra aussi bien. J’ai hâte de découvrir encore plus la culture locale, de rencontrer de nouvelles personnes, et de voyager à travers le pays et la région. »
Elsa

« Pouvoir mettre en place quelques nouveautés en termes de communication. J’ai de la chance d’avoir un manager qui laisse libre place à l’imagination, à la créativité, avec un droit à l’erreur pour apprendre. Donc nous allons tester de nouvelles choses. Je dois aussi me préparer à l’après mission, et définir une stratégie de retour en France temporaire, aussi bien sur le plan professionnel que personnel. Cette mission au Togo a changé ma vie sur ces deux aspects, et 2025 sera une année pleine de nouveautés. »
Maéva

Au Sénégal, une base de la Grande Muraille verte pour soutenir un développement durable

Le sergent Ahmadou Badji, responsable de la politique forestière de la base de la GMV à Widou, en discussion avec des femmes de la communauté.  © Marion Quintin / France Volontaires

Le village de Widou abrite l’une des principales bases de la Grande Muraille verte (GMV), ce mur végétal qui doit à terme traverser l’Afrique pour restaurer les écosystèmes sahéliens. Objectif : transformer les terres arides en un terreau fertile pour les populations. France Volontaires Sénégal s’est rendue sur place pour rencontrer les acteurs du projet.

Dans le nord-ouest du Sénégal, à quelques encablures de la frontière avec la Mauritanie, se trouve le village de Widou, où le temps semble s’être arrêté au milieu d’un désert de sable dominé par une chaleur intense. Ici comme dans d’autres zones du Sahel, les conditions de vie sont marquées par la rareté des ressources naturelles et la difficulté à exploiter les sols.

Pourtant, grâce au projet de la GMV, initiative qui traverse le continent d’ouest en est de Dakar à Djibouti, un espoir renaît. Le projet se traduit concrètement par un corridor de reboisement et se veut un bouclier contre la désertification, tout en offrant des solutions économiques durables aux populations locales. Le village de Widou abrite l’une des principales bases de la Grande Muraille verte au Sénégal.

Une parcelle en phase de reboisement dans le village de Widou, au nord-ouest du pays.  © Marion Quintin / France Volontaires

L’installation des parcelles de reboisement a débuté il y a quelques années déjà dans la région. Mais au-delà des plantations, il a fallu convaincre les habitants de l’importance du projet. Un long travail de sensibilisation a été mené pour encourager l’implication des communautés locales. Les autorités et les associations ont donc œuvré pour que chacun prenne conscience de la valeur écologique et économique de ces arbres.

Le soump, un arbre résistant dans le désert

À Widou, l’un des symboles de cette reforestation est le balanites aegyptiaca, un arbre local plus communément appelé « soump » au Sénégal (dattier du désert), connu pour sa résistance à la sécheresse. Ce dernier fournit une ressource précieuse : son huile est utilisée pour la cuisson et il peut servir à la fabrication de savons, de sirop, de soins pour les cheveux, de nourriture pour les poissons et même comme biocharbon. Ces dérivés permettent non seulement de diversifier les sources de revenus pour les familles, mais aussi de promouvoir des pratiques agricoles durables qui respectent l’environnement.

Le sergent Ahmadou Badji est chef du triage forestier et responsable de la politique forestière dans la zone: « Nous proposons aux particuliers de reboiser leurs terrains en leur fournissant des arbres et en les accompagnant tout au long du processus de plantation », explique-t-il. En plus de ses responsabilités forestières, il coordonne toutes les actions autour de la base opérationnelle de la Grande Muraille verte.

"Nous proposons aux particuliers de reboiser leurs terrains en leur fournissant des arbres et en les accompagnant tout au long du processus de plantation"

Ahmadou Badji, chef du triage forestier et responsable de la politique forestière de la base de la GMV à WIdou

L’arrivée de volontaires est un élément clé de la réussite de ce projet. Ces derniers jouent en effet un rôle essentiel en soutenant les initiatives locales et en apportant des compétences et de la visibilité au projet. Joël Ewolo, volontaire de solidarité internationale (VSI), a été envoyé sur place par France Volontaires pour soutenir le projet de la GMV avec pour mission de participer à la promotion des produits forestiers autres que le bois (gibier, fruits, graines…).

Son rôle est déterminant, notamment dans la valorisation des produits dérivés du soump. Originaire du Cameroun, il fait partie de la cohorte des volontaires « sud-sud » qui a choisi le volontariat afin de contribuer à quelque chose de concret et utile sur son continent.

Des femmes au cœur du projet de la Grande Muraille verte

Dès son arrivée, Joël a su s’intégrer pleinement au projet en s’impliquant à 100 % dans ses activités. Il a vécu au plus près des populations touchées par la désertification et s’est assuré que le projet ait un impact positif sur les habitants. Selon lui, « il faut vivre ici pour comprendre ». Cette expérience a été un véritable modèle de résilience, un processus où le présent prépare l’avenir des générations futures. « Il est important de faire de la sensibilisation car en agissant correctement aujourd’hui, les efforts auront un impact significatif et durable » plaide-t-il.

Grâce à son expérience, Joël a appris à comprendre et à appréhender les défis spécifiques des différentes populations locales. Pour lui, le plus grand enseignement de ce projet a été la résilience. Bien que la barrière de la langue, l’éducation différente et les croyances variées aient été parfois des obstacles, il a été accueilli comme un membre à part entière de la communauté.

Le serent Badji (avec la casquette), Joël (les bras croisés devant un soump), Oumy et Goumal, deux femmes impliquées dans la communauté. © Marion Quintin / France Volontaires

Oumy, une bénéficiaire active du projet, témoigne de l’impact positif que ce dernier a eu sur sa vie. « C’est une chance d’avoir accès à cette aide et de participer aux formations. Le changement est visible, non seulement sur la terre, mais aussi dans les mentalités et les pratiques des habitants de Widou », explique-t-elle. Pour elle, l’accompagnement autour de la GMV est bien plus qu’une simple aide matérielle : il s’agit d’un levier de changement durable pour la communauté.

Cependant, au début, tout n’a pas été facile. Goumal raconte ainsi comment elle a commencé à participer au projet sans en parler à son époux, sceptique quant à son utilité. « Les agents et le sergent Badji m’ont soutenue dans mon projet de commerce et ont même parlé avec mon mari. Grâce à leur accompagnement, j’ai pu accéder à toutes les ressources nécessaires pour développer mon activité », témoigne-t-elle.

"Il est important de faire de la sensibilisation car en agissant correctement aujourd’hui, les efforts auront un impact significatif et durable "

Joël Ewolo, volontaire de solidarité internationale (VSI) dans le cadre de la GMV

Le soutien des équipes locales a été un facteur déterminant pour surmonter les obstacles sociaux et culturels. Ce projet de reboisement, au-delà de la dimension écologique, a permis à des femmes comme Oumy et Goumal de prendre en main leur avenir économique, tout en contribuant à la régénération de la terre. Le sergent Badji souligne d’ailleurs l’importance des volontaires féminines dans les échanges. « Cela a favorisé le dialogue avec les femmes de la communauté, et cela a constitué une véritable aide pour organiser les tâches et soutenir le développement du projet », précise-t-il.

À Widou, comme dans bien d’autres villages du Sahel, la mission de la Grande Muraille verte est bien plus qu’un simple projet de reboisement. Elle représente un espoir de renaissance pour des communautés confrontées à la désertification, tout en offrant des solutions concrètes sur le long terme. Grâce à l’implication des volontaires, des bénéficiaires et des autorités locales, la Grande Muraille verte est devenue un symbole de la lutte pour la préservation de l’environnement et du développement durable.

 © Marion Quintin / France Volontaires

Le programme Volontaires pour la Grande Muraille verte

Lancée il y a quatorze ans, la Grande Muraille verte est un projet panafricain dans plusieurs pays du Sahel, de l’Afrique du Nord et de la Corne de l’Afrique dont le but est de lutter contre la désertification et le changement climatique. Projet avant tout forestier à l’origine, l’approche est désormais plus globale, intégrant le territoire et ses composantes environnementales, sociales et économiques. Le programme Volontaires pour la Grande Muraille verte a pour but de soutenir cette initiative en envoyant des volontaires français ou de pays partenaires sur place.

En Équateur, une fondation vient en aide aux enfants des communautés andines

La région de Saraguro, dans les Andes équatoriennes, accueille la maison de la jeunesse de la Fondation Mashi Pierre. © Victor Sauca / Unsplash

Perché sur les pentes de la cordillère des Andes, le petit village de Saraguro accueille la Fondation Mashi Pierre, qui gère une maison de la jeunesse pour les communautés locales. Avec l’aide de volontaires qui se mobilisent pour assurer, entre autres, des cours de langue et animer une bibliothèque mobile.

Le lundi 23 décembre dernier a marqué la fin de la campagne de collecte de fin d’année menée durant deux semaines par la fondation Mashi Pierre auprès des particuliers et des commerçants de Saraguro. L’objectif était de permettre de distribuer des cadeaux de Noël aux enfants défavorisés de la région, l’une des nombreuses activités menées par cette association créée il y a une quinzaine d’années pour venir en aide aux jeunes de ce petit village situé dans le sud de l’Equateur, à quelque 2500 mètres d’altitude.

Au-delà d’initiatives ponctuelles comme cette collecte solidaire, la structure, dédiée à l’éducation des enfants des communautés indigènes, mène deux projets majeurs : des cours d’anglais et un projet innovant de bibliothèque mobile destiné à desservir les écoles des populations locales, dans un environnement géographique qui ne facilite pas les déplacements. Ces initiatives ont pour but de favoriser l’accès à l’éducation et d’élargir les horizons des jeunes, tout en respectant les spécificités culturelles de la région. 

Susciter l’apprentissage des langues par le jeu

C’est ici que Vanessa Martins a décidé de s’engager en tant que volontaire de solidarité internationale (VSI) pour une mission de deux ans, qu’elle a débutée il y a un peu plus de quatre mois, envoyée par la Guilde. Depuis toujours, la jeune femme rêvait de partir en Amérique latine. Pas seulement pour voyager. L’option du volontariat a immédiatement résonné en elle comme un moyen de vivre une expérience immersive et enrichissante, tout en apportant une contribution réelle à la communauté.

En tant que coordinatrice, les missions de Vanessa sont multiples : elle donne des cours d’anglais à une classe de douze enfants âgés de 5 à 11 ans et anime des ateliers autour de la lecture. « L’une des méthodes les plus efficaces pour capter l’attention des enfants est l’enseignement par le jeu : une approche ludique facilite l’apprentissage et suscite l’intérêt des jeunes élèves » explique-t-elle.

Vanessa, VSI au sein de la fondation Mashi Pierre avec les enfants de Saraguro et les membres des communautés locales. © DR

Elle participe par ailleurs activement à la gestion administrative de la fondation, dont l’équipe locale est composée de quatre personnes : un unique salarié et trois volontaires (une VSI donc, et deux volontaires en service civique).

Un trophée pour récompenser le travail de la fondation

Cette mission permet à Vanessa de développer de nombreuses compétences, tant sur le plan personnel que dans le cadre de ses activités : « J’ai dû apprendre la patience, car tout prend plus de temps dans ce contexte, et j’ai également dû m’adapter à un rythme de travail bien différent de celui que je connaissais auparavant. Sur le plan technique, j’ai enrichi mes compétences en informatique et en comptabilité, des domaines dans qui n’étaient pas ma spécialité, mais qui sont cruciaux dans la gestion de la fondation »

Parmi les souvenirs les plus marquants de Vanessa, il y a cette première visite dans une école, où le directeur a remis un trophée à la Fondation Mashi Pierre pour récompenser son travail. Ce geste symbolique l’a profondément touchée, car il a été pour elle un puissant rappel de l’impact des actions de la fondation sur les communautés locales. L’accueil chaleureux et la reconnaissance des enseignants et des élèves ont renforcé son sentiment que son engagement avait un véritable sens et qu’elle n’était pas venue pour rien : « C’est pour moi une opportunité unique de redécouvrir le monde à travers une autre perspective, celle de la solidarité et de l’engagement. Chaque moment de la mission est précieux, offrant une expérience qui va au-delà du simple travail humanitaire : c’est une véritable aventure humaine ».

La Fondation Mashi-Pierre ne dispose que d’un unique salarié, et compte donc particulièrement sur la présence de volontaires internationaux d’échange et de solidarité (V.I.E.S) pour mettre en œuvre l’ensemble de ses actions.
En 2020, nous relations sur notre site le témoignage de Charlotte Lecloux, qui évoquait sa mission à la fondation: “Vivre à Saraguro m’a fait remettre en question ma propre culture et ma propre éducation (parce que beaucoup de choses marchent différemment ici). Être plongée dans la culture indigène, c’est un monde complètement différent. La culture est incroyable avec les rituels, les croyances, la langue quechua, les fêtes, la musique, la nourriture… Tout a été surprenant, et dès les premiers jours”, expliquait-elle alors.

Bio express

Vanessa Martins a exploré plusieurs domaines avant de s’engager dans son volontariat de solidarité internationale en Équateur. Initialement formée en mathématiques, en espagnol et en affaires européennes, elle a également travaillé dans le secteur du transport, avant de se former en tant que coach de vie. Un Erasmus en Espagne, un pays qu’elle affectionne particulièrement, a renforcé son désir de découvrir l’Amérique latine. Elle a été envoyée sur place par la Guilde.
Vanessa Martins
Volontaire de solidarité internationale

La structure d'accueil

La Fondation Mashi Pierre gère une maison de la jeunesse (casa de juventud) à Saraguro, petite ville de la Cordillière des Andes à majorité indigène. Elle organise des ateliers et des activités culturelles et éducatives : soutien scolaire, atelier informatique, cuisine, cinéma, danse, fabrication de petits objets, animation d’une bibliothèque/ludothèque… Suite à un besoin grandissant et une forte demande, elle développe actuellement des cours d’anglais dans les écoles indigènes (enfants 6-12 ans) des communautés du canton de Saraguro, avec l’objectif de faire vivre ensemble des jeunes et des enfants métis et indigènes dont les communautés forment des entités parfois distinctes sur le terrain.
La Fondation Mashi-Pierre

« Une vague porteuse d’espoir » pour les jeunes surfeuses sénégalaises

© Julien Laborda

Sur la plage de Yoff (Sénégal), l’association Malika Surf propose aux jeunes de la région d’apprendre à dompter les remous de l’Atlantique. Mais parce que ce sport n’est pas réservé qu’aux hommes, Malika Surf a donné naissance il y a quatre ans à Surfkids Shredding Sénégal, une fondation qui permet aux jeunes femmes de développer également leur pratique. Nous avons rencontré Julien Laborda, engagé en tant que service civique sur ce projet.

« Quand j’ai décidé de créer ce surf camp en 2010, j’ai reçu l’aide de très bons amis : quelqu’un m’a offert quelques combinaisons, une planche, un leash ou une combinaison en lycra. Personnellement, je crois que c’est comme un cercle : si quelqu’un me donne quelque chose, je dois donner quelque chose à quelqu’un d’autre en retour », explique Marta, créatrice avec son époux Aziz du Malika Surf Camp de Yoff, dans les faubourgs de Dakar. Cela n’aurait pu être qu’une déclaration d’intention, mais la passionnée ne s’est effectivement pas arrêtée là. En 2020 est ainsi né Surfkids Shredding Sénégal, un programme, soutenu par l’Agence française de développement, dont l’objectif est de permettre à un maximum de jeunes de bénéficier de l’apprentissage du surf, mais également de pousser les filles à pratiquer ce sport.

Il y a quelques mois, Julien Laborda, envoyé par La Guildes’est engagé dans une mission de service civique international pour mettre en œuvre ce programme. Les 2 et 3 octobre derniers, lors des Journées du volontariat français (JVF) organisées par France Volontaires à Saint-Louis, il a présenté le projet « Une vague porteuse d’espoir ». Porté par Surfkids Shredding Sénégal et accompagné financièrement par l’ambassade de France au Sénégal, celui-ci entend encourager les jeunes filles à explorer ce sport comme vecteur de confiance, favoriser leur émancipation à travers des formations professionnelles et lutter contre les stéréotypes de genre.

Pourquoi avoir choisi de t’engager au sein du programme Surfkids Shredding Senegal ?

Le programme m’a tout de suite attiré. J’ai toujours aimé l’océan et lorsque j’ai vu la mission de Malika Surf, j’ai trouvé que cela avait du sens. Utiliser le sport, et en particulier le surf, comme levier pour l’émancipation des filles me parlait énormément. Ce projet m’a permis de combiner mon intérêt pour le sport et mon désir de contribuer à une cause sociale, notamment en matière d’égalité de genre et d’inclusion.

Peux-tu nous en dire plus sur le projet "Une vague porteuse d’espoir" ?

Le but du projet est de faciliter l’émancipation de jeunes filles à travers la pratique du surf, tout en créant une véritable communauté solidaire et engagée. Nous voulons former vingt jeunes filles des villages de Yoff et Ngor, leur offrir les outils nécessaires pour qu’elles deviennent des leaders dans leur communauté. C’est pourquoi nous organisons des rencontres avec des athlètes féminines qui ont réussi dans des sports comme le surf. Ces femmes, qui ont su s’imposer, servent de modèles et montrent aux jeunes filles qu’elles aussi peuvent réussir et s’épanouir dans des environnements traditionnellement dominés par les hommes. Ces rencontres sont particulièrement importantes, car elles permettent aux jeunes filles de se projeter et de se voir comme des leaders dans leur propre communauté.

Julien Laborda sur la plage de Yoff. © DR

Le surf peut donc aussi jouer un rôle dans leur développement professionnel…

Oui, en plus de la pratique sportive, nous nous engageons à les soutenir dans leur développement personnel et professionnel. L’un de nos objectifs majeurs est de former trois jeunes filles aux métiers du surf pour qu’elles deviennent coach, juge de compétition ou maître-nageur. Cela leur permettrait de montrer que des femmes peuvent occuper des rôles influents dans lesquels elles ne s’étaient pas forcément projetées.

Au-delà, nous aimerions aussi atteindre 50 % de filles au sein de l’association, pour garantir une véritable égalité de participation et de représentation dans toutes les activités proposées. Le surf, avec ses hauts et ses bas, son environnement changeant, est une sorte de métaphore de la vie. Nous voulons montrer aux jeunes filles qu’elles peuvent, tout comme dans ce sport, s’adapter, évoluer et surmonter les obstacles qu’elles rencontrent.

."Le surf (...) est une sorte de métaphore de la vie. Nous voulons montrer aux jeunes filles qu’elles peuvent, tout comme dans ce sport, s’adapter, évoluer et surmonter les obstacles qu’elles rencontrent."

Au-delà du sport, la fondation entend-elle jouer un rôle social pour les jeunes femmes sénégalaises ?

Effectivement, le projet repose également sur des activités de sensibilisation. Nous organisons par exemple des cercles de parole où les filles peuvent discuter de sujets essentiels comme la santé reproductive et l’hygiène menstruelle. Ce sont des thèmes parfois négligés dans certaines communautés, mais qui sont essentiels pour le bien-être et l’autonomie des filles. 

As-tu observé des changements dans la communauté grâce à cette mission ?

En fait, c’est assez frappant. Je ne vois pas de regard négatif de la part des garçons vis-à-vis du fait que les filles pratiquent le surf. Au contraire, ils ont tendance à les encourager à se lancer. J’ai également remarqué un véritable effet boule de neige : les jeunes qui participent au programme incitent leurs frères et sœurs à rejoindre l’association. Cela crée une dynamique familiale.

Le surf aide donc à changer les mentalités ?

Oui, et d’ailleurs à ce sujet, il y a une histoire qui m’a particulièrement marqué. C’est celle d’un jeune de quinze ans qui a perdu sa mère et dont le père est parti migrer par voie maritime. Il s’est retrouvé seul avec sa sœur et sa grand-mère. Ce garçon avait un mauvais comportement au départ, mais grâce au surf, il a trouvé un cadre et il est devenu très impliqué. Je l’accompagne en lui donnant des cours de français. On l’encourage, et c’est gratifiant de voir qu’il progresse. J’ai l’impression parfois d’avoir un rôle de grand frère pour lui, et ça me touche de pouvoir contribuer à l’aider à trouver son chemin.

En 2026, le Sénégal accueille les Jeux Olympiques de la jeunesse : cela constitue-t-il un objectif ?

Oui, à titre personnel, j’aimerais vraiment poursuivre mon engagement ici, notamment en tant que volontaire de solidarité internationale (VSI) à l’occasion de ce grand événement sportif. Après cela, je compte m’engager dans des projets de développement autour du sport dans ma ville d’origine, à Toulouse. J’aimerais y contribuer à long terme en développant des projets sportifs qui aident des jeunes qui ne trouvent pas forcément leur place dans la société.

Bio express

Julien Laborda est diplômé de l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) à Paris, où il a obtenu un master 2 de Manager de programmes internationaux, ainsi que de l'Institut préparatoire à l'administration générale (Ipag), où il a obtenu un master 2 d’Administration générale. Il est actuellement en mission à Dakar au sein de la fondation Surfkids Shredding Sénégal dans le cadre d'un Service civique international. À terme, il souhaite continuer à développer ses compétences dans la conduite de projets en utilisant le sport comme outil au service de la jeunesse et du développement.
Julien Laborda
Service civique interntional

Léa, dans la forêt de Bornéo pour lutter contre la déforestation

© Léa Besançon

En Indonésie, l’association Pokja Pesisir lutte pour préserver la faune et la flore d’une forêt mise en danger, entre autres, par l’édification de la nouvelle capitale du pays en plein milieu de la jungle. Cette petite structure compte sur l’implication d’une poignée de citoyens engagés… et sur l’aide de volontaires comme Léa Besançon, qui a passé deux semaines sur place cet été pour former les locaux au montage vidéo.

Le 17 août dernier, date anniversaire de l’indépendance de l’Indonésie, une nouvelle cité est officiellement sortie de terre en plein cœur de la jungle, sur l’île de Bornéo : Nusantara, la nouvelle capitale, a été inaugurée par les autorités du pays. À terme, la ville doit « remplacer » l’actuelle capitale Jakarta en accueillant les élus et les fonctionnaires indonésiens dans une ville construire de toutes pièces au milieu d’une vaste écosystème forestier. La petite association Pokja Pesisir, basée à Balikpapan (à environ une centaine de kilomètres de la nouvelle capitale, sur la côte), se bat pour préserver ce qui peut encore l’être d’un point de vue environnemental.

Avec peu de moyens, mais beaucoup d’énergie. Elle a ainsi fait appel à Planète Urgence, une ONG française qui se bat depuis des années contre la déforestation et qui a financé la mission de volontariat d’échanges et de compétences (VEC) de Léa Besançon. Chargée de communication et de projets digitaux, la jeune femme a apporté son expertise aux membres de l’association en les initiant au montage vidéo, afin de leur permettre de sensibiliser les habitants de la région aux enjeux environnementaux de leur île. Nous l’avons rencontrée.

Léa et des membres de l’association Pokja Pesisir, en tournage dans la mangrove de la région de Balikpapan, sur l’île de Bornéo  © Léa Besançon

Qu’est-ce qui vous a motivée à partir animer ces ateliers de montage vidéo en Indonésie ?

Je suis à l’aise dans le secteur de la communication : j’ai réalisé mon cursus universitaire dans ce domaine, et même si je ne suis pas vidéaste, je suis relativement polyvalente. L’idée était d’apporter mon aide à cette association en les formant pour qu’ils puissent réaliser par eux-mêmes des contenus pour les réseaux sociaux. Au final, ce VEC collait à mes compétences.

La question environnementale a-t-elle également été importante pour vous ?

Oui évidemment. C’est une association très engagée dans la protection de la faune de Balikpapan sur l’île de Bornéo, qui est confrontée à la surexploitation des ressources, à la destruction de la mangrove, et qui lutte à son échelle pour protéger son île. Les vidéos produites pour l’association aident précisément à sensibiliser à ces questions d’environnement, à communiquer avec les populations locales sur ces sujets. D’autant plus depuis la construction de la nouvelle capitale au milieu de la jungle, un projet qui se veut futuriste mais qui en fait nuit à l’environnement en détruisant l’habitat de la faune locale.

"J’ai compris avec les membres de l’association l’importance qu’avait cette formation pour eux, ils en attendaient beaucoup pour faire grandir leur structure"

Léa Besançon, en volontariat d’échanges et de compétences (VEC) en Indonésie

Comment se déroulait la formation ?

On a fait de la théorie, en établissant les story-boards des vidéos avant d’aller filmer des images sur le terrain, dans un deuxième temps, pour avoir du matériel à monter. Comme l’association n’a pas trop de moyen, on a travaillé sur Canva (NDLR : un outil de montage en ligne simple d’utilisation). Sur le travail de montage, on se réunissait, on analysait le pour et le contre, on échangeait nos avis. Je me suis sentie légitime car ils m’ont donné beaucoup de confiance. Ils étaient tous très investis, très réceptifs. Certains membres de l’association m’ont même demandé des « devoirs à la maison » pour pouvoir travailler chez eux et j’ai reçu des vidéos en dehors des heures de formation !

Quel bilan tirez-vous de ce volontariat ?

J’ai adoré cette expérience, c’est allé plus loin que mes attentes. En plus je ne connaissais pas le dispositif du volontariat d’échanges et de compétence, je ne connaissais que le service civique international (SCI), puisque j’en avais fait un en Tanzanie. Finalement, deux semaines, c’était limite trop court. Je suis finalement restée une semaine de plus, à titre personnel, pour visiter l’île avec des membres de l’association Pokja Pesisir. Ce VEC m’a permis de découvrir une autre facette de l’Indonésie que celle qu’on peut voir à la télé. J’ai compris avec les membres de l’association l’importance qu’avait cette formation pour eux, ils en attendaient beaucoup pour faire grandir leur structure. Cela m’a mis la pression, mais dans le bon sens du terme, et j’ai pris tout cela très au sérieux. Quelque part cela m’a donné une nouvelle corde à mon arc, en me donnant confiance sur ma capacité à former des gens.

 © Léa Besançon

Bio express

Léa Besançon a obtenu un master en communication digitale à Lyon, ainsi qu’un diplôme de journaliste lors de son année d’Erasmus à Valence, en Espagne. Elle a ensuite travaillé en alternance comme responsable de la communication et webmarketing au sein d’une entreprise. Elle a également un mastère en entrepreneuriat et management de l’innovation. Son VEC est sa deuxième expérience de volontariat après son service civique international dans l’association Life Time Projects en Tanzanie.
Léa Besançon
Volontaire d'échanges et de compétences

L'organisme d'envoi

Association du groupe SOS, Planète Urgence est une ONG de solidarité internationale et d’aide au développement créée en 2000 et reconnue d’utilité publique. À travers ses dispositifs de volontariat et de renforcement de compétences, ses actions de sensibilisation et ses projets de préservation des forêts, elle entend permettre à chacune et chacun d’être davantage acteur de son développement et de celui de sa communauté. Planète Urgence agit en direct via ses équipes de terrain dans les trois grands bassins forestiers tropicaux mondiaux – l’Amazonie, le bassin du Congo, le bassin du Bornéo Mékong – là où la déforestation est la plus vive, la biodiversité la plus exceptionnelle et les vulnérabilités humaines les plus fortes. Elle s’appuie également sur la mobilisation et l’engagement des citoyens, et notamment des salariés via le Congé solidaire, un dispositif qu’elle a elle-même imaginé.

“Je n’avais pas conscience des inégalités de genre”

© Jerry-Gwenaël Azilinon​

Jeune béninois vivant au Sénégal, Jerry Azilinon est engagé depuis longtemps dans la vie citoyenne de son pays d’adoption. Au sein des diverses associations pour lesquelles il a collaboré, la question des droits des femmes a toujours tenu une place centrale. Depuis fin octobre, il s’est engagé comme volontaire chargé d’appui intelligence collective, genre et interculturalité à l’Agence française de développement à Marseille. À l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, il témoigne de son parcours et de ses engagements.

J'ai grandi dans une famille béninoise, entouré de figures féminines inspirantes.

« Je suis Béninois, j’ai longtemps vécu au Sénégal mais je garde un fort lien avec le Bénin. J’ai grandi dans une famille entouré de figures féminines inspirantes. Les premiers exemples de réussite sociale autour de moi, c’était l’une de mes tantes qui avait une carrière professionnelle flamboyante, qui s’est vite achetée une voiture, puis une maison : pour moi c’était une évidence que le succès se conjuguait au féminin.

Quand j’ai découvert les violences faites aux femmes, j’ai réalisé que je vivais dans une bulle : je n’avais pas conscience des inégalités salariales, des agressions, car je pensais (à tort) que ça n’existait pas dans mon entourage. Je pense que c’est ce qui m’a motivé à me sensibiliser aux questions de genre : le sentiment d’être déphasé, la curiosité de comprendre ce qui se passait.

Chez Social Change Factory, une association qui œuvre au quotidien pour l’émancipation, l’autonomisation, l’épanouissement et l’engagement des jeunes, j’ai participé à la mise en œuvre de plusieurs projets dans les domaines de l’éducation, de l’engagement citoyen et du genre. C’était le début de ma longue aventure avec le milieu du développement.  

Je fais activement partie de deux associations, Doyna (« ça suffit ! », en wolof), un mouvement qui milite pour les droits des femmes, l’orientation et la prise en charge de victime. Et Yeewi Association (« Libérez », en wolof) qui fait un focus sur la précarité menstruelle et la santé sexuelle et reproductive. Parmi les actions mises en œuvre, il y avait par exemple des tournées scolaires où nous faisions des ateliers avec les membres de la communauté éducative et les élèves pour leur parler de masculinité positive, de la précarité menstruelle, réfléchir à la réhabilitation des toilettes dans les établissements ou évaluer les besoins en matière de distribution de serviettes hygiéniques.

Je n’avais pas conscience des inégalités salariales, des agressions, car je pensais (à tort) que ça n’existait pas dans mon entourage.

J’ai aussi été salarié dans diverses entreprises, mais j’ai toujours été frustré, dans le cadre de mes fonctions, par le fait que je ne voyais pas l’impact concret de ce que je faisais, contrairement à mes missions au sein des ONG ou des associations dans lesquelles j’avais évolué. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de candidater pour ce volontariat international d’échange et de solidarité en France en tant que Chargé d’appui intelligence collective, genre et interculturalité auprès de l’Agence française de développement, ici à Marseille.

Sur les questions de genre, nous travaillons à développer différents parcours pour des publics tant internes, qu’externes (MOOC* avec des partenaires sur des sujets spécifiques tel que l’éducation, parcours/atelier de sensibilisation et de bonnes pratiques pour éviter et ou corriger les biais de genre, campagnes de communication diverses).

Les deux autres aspects de mon volontariat tournent autour des questions d’intelligence collective et d’interculturalité, deux autres domaines qui me sont chers et sur lesquels j’avais régulièrement travaillé auparavant.

Bref, il s’agit d’une belle mission dans laquelle je m’épanouis pleinement. »

*Acronyme pour « Massive Open Online Course », un type de formations en ligne qui regroupe des vidéos, du contenu texte, des forums, etc.

Bio express

Jerry-Gwenaël Azilinon est un jeune avec un vif intérêt pour les questions de genre et la lutte contre les violences faites aux femmes. Il est ambassadeur #HeforShe et coordonateur du mouvement «Doyna» qui sensibilise aux questions de genre et fournit une assistance aux victimes, entre autres. Il est aussi le SG de "Yeewi", une association qui lutte contre la précarité menstruelle et sensibilise à la santé sexuelle et reproductive. Il est par ailleurs entraîneur d'une équipe féminine de football, les Dakar Sacrées Queens, une manière de montrer que la lutte pour l'égalité entre les femmes et les hommes doit être menée sur tous les terrains. Il travaille également au quotidien sur des programmes d’éducation et d’engagement des jeunes ce qui lui a valu d’être nommé Commissaire Régionale adjoint au programme Jeune et au plan stratégique des Scouts de Dakar dont il est membre depuis 2004.
Jerry-Gwenaël Azilinon
Volontaire international en mission à l'AFD à Marseille

Avec La Cravate solidaire pour lutter contre les discriminations

© Jonnathan Tshibangu / Unsplash

Lutter contre les discriminations à l’embauche pour promouvoir l’égalité des chances : c’est l’objectif de La Cravate solidaire, une association basée à Bordeaux. Originaire de Sfax, en Tunisie, et membre de la section Hay-Habib des scouts tunisiens, Skander Hlel, 20 ans, a réalisé une mission de service civique de six mois à Bordeaux au sein de la structure.  

« L’habit ne fait pas le moine, mais y contribue » : tel est le slogan de La Cravate solidaire, ce réseau d’associations qui œuvre pour l’égalité des chances en luttant contre les discriminations à l’embauche, notamment celles liées à l’apparence physique. Pour cela, elle accompagne des personnes en (ré)insertion vers la réussite de leurs projets professionnels et collecte en entreprises et auprès de particuliers des tenues professionnelles pour homme et femme. Skander Hlel a été mobilisé auprès de la Cravate solidaire dans le cadre du programme Weccee de l’association Cool’eurs du Monde, qui offre à de jeunes volontaires venus de divers horizons l’opportunité de s’engager dans des actions de solidarité internationale à travers la mobilité. Il nous présente son témoignage.

Je souhaitais participer à un échange afin de pouvoir découvrir la culture française,

faire de nouvelles rencontres et renforcer mes capacités à communiquer en français. Je voulais également m’immerger dans la vie associative française, ayant déjà eu une brève expérience avec les Scouts de France auparavant. 

Au cours de ma mission, j’ai exercé des responsabilités assez variées. La Cravate Solidaire travaille en étroite collaboration avec France Travail, elle est régulièrement contactée pour organiser des ateliers de préparation aux entretiens d’embauche dans différentes villes. J’étais de sortie un jour par semaine pour participer au coaching en image, à l’organisation d’entretiens blancs et à la préparation des CV professionnels.  Les autres jours étaient consacrés à d’autres activités, comme la préparation d’un atelier ou du tri de vêtements pour les bénéficiaires.

Cela a constitué une superbe expérience. J’ai apprécié les échanges que nous avons pu avoir et la solidarité qui s’est instaurée entre nous. Chacun était curieux d’apprendre et de découvrir la culture et les traditions des autres. Aujourd’hui, j’ai l’impression de mieux comprendre certains pays, et je suis ravi d’avoir gardé des liens d’amitié avec des personnes dans plusieurs régions du monde. 

Ma mission a également été l’occasion de rejoindre la section des Scouts laïcs de Pessac, à côté de Bordeaux. J’ai suivi une formation avec eux, puis j’ai commencé à participer aux activités en tant que chef scout. J’ai animé divers jeux, des séances de danse, et pris part à plusieurs week-ends de camping, comme je le faisais en Tunisie.

Cette expérience de vie à Bordeaux a été exceptionnelle. Chaque jeudi, dans le foyer où j’étais hébergé, nous organisions une activité de cuisine collective où chacun préparait des plats de son pays d’origine (Maroc, Sénégal, France etc.). J’ai fait découvrir la cuisine tunisienne à mes colocataires en préparant un ojja merguez, un plat dont ils se souviennent encore, surtout à cause de la harissa !

Ma mission a également été l’occasion d’améliorer mon français. Je n’étais pas très à l’aise avec la langue, ce qui rendait mes échanges téléphoniques avec les candidats parfois difficiles. J’avais pour tâche de les orienter, mais j’ai rapidement été confronté à un manque de confiance de leur part, en raison de mon niveau de langue. J’en ai alors discuté avec mon tuteur, qui a fait preuve de compréhension et m’a proposé de nouvelles activités pour m’aider à surmonter ces difficultés. 

Le programme Weccee, qu'est-ce que c'est ?

Le programme Weccee est un programme de volontariat international en réciprocité, à destination des jeunes de 18 à 25 ans, mis en place depuis 2014 par Cool’eurs du Monde : les jeunes en binôme (un jeune français part à l’étranger et un jeune est accueilli en France) s’engagent à mener un micro-projet d’éducation à la citoyenneté et à la solidarité internationale (ECSI) dans le champ des Objectifs de développement durable (ODD). Celui-ci vient en complément de leur mission de volontariat et vise à créer une dynamique autour des ODD dans les territoires concernés.

Bio express

Skander Ben Hlel est membre des Scouts depuis 2014, ce qui lui a permis de participer à des formations dans le cadre du programme Jeunes des 2 Rives, avec lequel il a pu partir au Maroc pour renforcer ses connaissances sur les Objectifs de développement durables (ODD). En mission de service civique entre janvier et juillet 2024, il est depuis octobre 2024 en mission de volontariat en France via le dispositif du Corps Européen de Solidarité. Il s’est envolé pour onze mois à Nantes avec l’association Parcours le Monde Grand-Ouest.
Skander Ben Hlel
Volontaire en service civique

« Encourager les femmes des villages reculés à se rendre à l’hôpital »

La clinique mobile se rend dans les villages reculés pour apporter des soins aux patientes. © DR

Au Togo, Constance Prouvost a trouvé une mission de chargée de projets au sein de l’hôpital de l’Ordre de Malte à Elavagnon, à environ 250 kilomètres au Nord de la capitale (Lomé). Envoyée par la Délégation Catholique pour la Coopération, elle participe à un programme de lutte contre la mortalité materno-infantile. À 24 ans, c’est pour elle une opportunité de consolider son CV via une expérience professionnalisante après des études dans le domaine de la solidarité internationale.  

Tu es en mission dans un hôpital au centre du Togo : peux-tu nous expliquer en quoi cela consiste ?

Je suis assistante financière et administrative ainsi que chargée de projet pour l’hôpital de l’Ordre de Malte d’Elavagnon. À ce titre, mes missions sont très variées.

Il y a d’abord les missions administratives et financières, donc, qui me permettent de comprendre en profondeur la gestion d’une structure médicale et d’ainsi analyser les besoins des équipes. L’objectif étant que le patient soit toujours accueilli le mieux possible et que sa prise en charge soit la plus adaptée au contexte local.

En tant que chargé de projets, tu as aussi pour mission le suivi d’un programme de réduction de la mortalité materno-infantile : peux-tu nous en dire plus ?

Effectivement, l’hôpital gère un projet qui a pour objectif principal de réduire la mortalité materno-infantile pour les femmes et les enfants de l’Est-Mono (dans la région des plateaux, limitrophe du Bénin, NDLR). Mes missions dans le projet sont de coordonner les différentes équipes nécessaires, de concevoir avec elle de nouvelles activités, de mesurer l’impact des actions, et bien sûr de rendre compte au siège.

L’objectif est d’encourager les femmes et les enfants des villages reculés à se rendre à l’hôpital pour un meilleur suivi de grossesse et pédiatrique. Parmi les actions que l’on mène, je peux par exemple citer l’organisation et la gestion de la clinique mobile qui offre des consultations prénatales et pédiatriques dans les villages les plus reculés, ou encore la mise en place d’un service d’urgences materno-infantiles, afin de repérer au plus vite les cas urgents dans les villages grâce à des ambulances.

Plus globalement, mon rôle est donc d’assurer le suivi des équipes et de concevoir avec elles les nouvelles stratégies à mettre en place pour aider les communautés à accéder aux soins. L’hôpital inaugurera un pôle mère-enfant en 2025 avec un nouveau bloc opératoire et une unité de néonatalogie. Ce pôle permettra une prise en charge efficace et qualitative pour les mères et les enfants.

"N’appartenant à aucune ethnie ou n'ayant pas d'attaches particulières, il m'est plus facile de prendre des décisions justes qui favorisent l'équité entre les personnes"

Ce sont de forts enjeux en termes de santé publique : quelles difficultés as-tu rencontrées dans le cadre de tes missions ?

Nous sommes confrontés à de nombreux défis : le manque de moyens, les difficultés pour l’ambulance et la clinique mobile de se rendre dans les villages les plus reculés, les grands prématurés à prendre en charge ou l’augmentation de la pauvreté dû aux changements climatiques. Nos équipes se battent tous les jours pour rendre l’accès aux soins plus facile pour les communautés. Dans ce contexte, voir les femmes enceintes des villages se rendre à l’hôpital après les sensibilisations que nous réalisons est une belle réussite de la part du personnel !

D’un point de vue plus personnel, étant de nature extravertie, ma plus grande difficulté en début de mission a été l’isolement qu’impose la vie en brousse, et la nuit qui tombe très tôt. Mais les moments d’isolement ont quand même du bon : ils m’ont permis de développer des projets que je n’aurais pas eu le temps de réaliser en France. Aujourd’hui, une deuxième volontaire en VSI m’a rejointe, donc l’isolement est moins difficile à vivre.

Le fait de ne pas avoir de formation médicale a-t-il été un handicap pour toi ?

Effectivement, tout dans cette mission est nouveau pour moi ! Mais les équipes sur place m’ont tout appris sur le contexte de l’accès aux soins pour les populations et le système de santé du pays. Au-delà, cette mission m’apprend également à faire face aux imprévus, à des situations d’urgence, à vivre dans une autre temporalité que celle que nous connaissons en France, à se laisser bousculer par des évènements que je n’avais pas choisis. Mais à l’inverse, le fait d’être d’une culture différente apporte en contrepartie une certaine neutralité dans les décisions qu’on doit prendre. N’appartenant à aucune ethnie ou n’ayant pas d’attaches particulières, il m’est plus facile de prendre des décisions justes qui favorisent l’équité entre les personnes.

© DR

As-tu as une anecdote particulière à nous raconter ?

Oui, je peux parler de l’accueil que m’a réservé la chorale du village par exemple. Partager les moments de répétitions de chants et de danses avec les villageois est à la fois une source de gêne mais aussi de rires ! Car évidemment je ne comprends rien à ce que je chante et je n’ai pas de partition, donc je vous laisse imaginer les sons mélodieux qui sortent de ma bouche !

Quels sont tes projets pour la suite ?

Edifiée par la résilience des femmes rencontrées à la maternité et dans le personnel de l’hôpital, je monte un projet pour mon retour en France qui consistera à la création d’un podcast autour de douze figures féminines, philosophes et autres, qui nous parlent encore aujourd’hui. Après ce projet, je compte candidater à des offres de chargée de projets dans le secteur de l’action sociale en France ou dans le secteur humanitaire dans une ONG. Mon VSI me permet d’acquérir des bases solides et d’être polyvalente sur de nombreux prochains postes.

La pesée des enfants dans le cadre du programme de prévention de la malnutrition et de vaccination / © DR

Bio express

Passionnée par le continent africain et son histoire depuis une mission de volontariat en Zambie réalisée en famille entre l’âge de 8 et 10 ans avec Fidesco, elle a orienté ses études vers un master en management de la solidarité internationale et de l'action sociale à l’Ircom -Ecole supérieure des Humanités et du Management dAngers. Elle a également effectué une année de césure en philosophie et théologie en Suisse. Son parcours et ses stages professionnels oscillent entre la France et l'Afrique (association Le Rocher, ONG ANGE, ferme agroécologique au Rwanda).
Constance Prouvost
Volontaire de solidarité internationale

La structure d'envoi

Fondée en 1967, la Délégation Catholique pour la Coopération (DCC) est le service du volontariat international de l’Église en France. Elle envoie des volontaires de solidarité sur des missions de trois mois à deux ans. Les volontaires agissent dans tous les domaines de développement et dans tous les types de métiers. La DCC ne porte pas de projets elle-même : elle répond aux demandes de ses partenaires du Sud qui mettent en place des projets de développement. La DCC est une association de loi 1901 agréée par l’État pour l’envoi de volontaires de solidarité internationale et l’accueil de volontaires en service civique. Elle est membre de la plateforme France Volontaires.

Un fan de photographie en Congé solidaire auprès des jeunes béninois

Les apprentis photographes de Raymond Lahoul, en reportage sur le terrain lors de sa dernière mission en Congé solidaire au Bénin. © Raymond Lahoul

Technicien chez France Télévisions, Raymond Lahoul a participé cette année à sa troisième mission dans le cadre d’un congé solidaire. Ce dispositif, mis en place par l’ONG Planète Urgence, permet à des salariés de donner de leur temps de vacances pour réaliser des actions de solidarité internationale. Au Bénin, Raymond était chargé de former les jeunes d’une association de protection de l’environnement à la pratique de la photographie.

Du temps en moins passé à la plage, à la campagne ou en virée au ski pendant l’hiver… chaque année, ils sont entre huit et dix salariés de France Télévisions à « renoncer » à une quinzaine de jours de vacances pour les remplacer par une mission de solidarité internationale à l’étranger. Depuis une dizaine d’années désormais, l’entreprise publique d’audiovisuel a en effet mis en place un partenariat avec Planète Urgence : l’ONG d’aide au développement, membre de la plateforme France Volontaires, a créé ce dispositif du Congé solidaire au début des années 2000.

Une idée originale qui permet à l’employé d’une entreprise de partir en Asie, en Amérique latine ou en Afrique pour partager et transmettre ses connaissances en appui à des actions de préservation de l’environnement. En échange de ce temps, l’employeur s’engage à financer la mission en contribuant à l’achat du billet d’avion, aux frais de transports ou de logement sur place, etc. Ils sont aujourd’hui plus de 11.000 à avoir ainsi été envoyés sur le terrain par Planète Urgence.

Des entreprises qui défendent des valeurs de solidarité

« On est partis du constat que nos collaborateurs souhaitaient s’engager dans des actions qui ont du sens » explique Yannick Monsnereau, responsable de la gestion du dispositif pour le groupe audiovisuel. « France Télévisions est une entreprise de service public, nous portons des valeurs fortes de solidarité, et il n’est pas étonnant que nos salariés désirent eux aussi partager ces valeurs au-delà de leurs activités professionnelles », complète-t-elle.

Raymond Lahoul fait justement partie de ces salariés qui ont tenté l’aventure. La première fois, pour lui, c’était il y a cinq ans déjà, en 2019. « Je travaille aux Antilles pour la chaîne Martinique Première, qui appartient au groupe France Télévisions » se remémore-t-il. « J’ai entendu parler de ce partenariat entre mon employeur et Planète Urgence et de la possibilité pour les salariés de bénéficier de ce Congé solidaire. Cela a tout de suite suscité une grande curiosité de ma part. »

« J’ai été envoyé dans une association locale qui travaillait avec Planète Urgence autour de la protection des forêts. L’objectif était de réaliser des reportages photo dans le cadre de leurs activités »

Raymond Lahoul, volontaire en mission de Congé solidaire au Bénin

Il part alors quinze jours à Yaoundé, au Cameroun, dans une association qui initie les jeunes à la photographie pendant leurs vacances scolaires. Technicien de métier, c’est aussi un grand fan de photographie, qu’il pratique assidument de manière amateure. Il a ainsi suivi diverses formations autour de la photo de mode ou du photoreportage, acquérant des savoirs qu’il entend désormais partager avec d’autres passionnés comme lui. Cette première est pour lui une révélation. Désireux de réitérer l’expérience l’année suivante, il entame un deuxième Congé solidaire dans une ferme de permaculture, en métropole cette fois. Mais la pandémie de covid-19 interrompt son aventure. Il repart finalement dans le courant de l’année 2024, au Bénin cette fois, pour une troisième mission.

« J’ai été envoyé dans une association locale qui travaillait avec Planète Urgence autour de la protection des forêts. L’objectif était de réaliser des reportages photo dans le cadre de leurs activités, afin qu’ils puissent justifier auprès de leurs partenaires du travail qu’ils réalisaient sur le terrain ». Pendant quinze jours, il conseille une équipe composée de six jeunes Béninois et d’un Français en Service civique. Les matins sont réservés à des enseignements théoriques tandis que les après-midis permettent de mettre en pratique les astuces de Raymond.

Un salarié désormais ambassadeur du Congé solidaire

Après trois expériences, ce dernier semble conquis par le dispositif, même s’il reconnaît lui-même que « l’adaptation n’est pas toujours évidente. Il faut savoir être flexible pour prendre en compte des modes de fonctionnement professionnel qui ne sont pas les mêmes que chez nous », plaide-t-il. Du côté de son employeur, on est également ravis d’avoir mis en place ce Congé solidaire qui sort parfois les salariés de leur quotidien. « Certains mettent en œuvre des compétences liées à leur expertise, mais d’autres vont un peu hors des sentiers battus. Nous avons par exemple des journalistes ou des communicants qui vont participer à des séances d’alphabétisation. Ils ne sont pas professeurs de français, mais la maîtrise des mots fait partie de leur bagage professionnel », explique Yannick Monsnereau.

Raymond, lui, fait désormais partie du groupe des ambassadeurs du Congé solidaire au sein du groupe France Télévisions. Histoire de faire la promotion auprès de ses collègues d’un dispositif qui, à défaut d’avoir changé sa vie, a donné du sens à ses vacances.

 © DR

Planète Urgence et le Congé solidaire

Association du groupe SOS, Planète Urgence est une ONG de solidarité internationale et d’aide au développement créée en 2000 et reconnue d’utilité publique. À travers ses dispositifs de volontariat et de renforcement de compétences, ses actions de sensibilisation et ses projets de préservation des forêts, elle entend permettre à chacune et chacun d’être davantage acteur de son développement et de celui de sa communauté. Planète Urgence agit en direct via ses équipes de terrain dans les trois grands bassins forestiers tropicaux mondiaux – l’Amazonie, le bassin du Congo, le bassin du Bornéo Mékong – là où la déforestation est la plus vive, la biodiversité la plus exceptionnelle et les vulnérabilités humaines les plus fortes. Elle s’appuie également sur la mobilisation et l’engagement des citoyens, et notamment des salariés via le Congé solidaire, un dispositif qu’elle a elle-même imaginé.

Raymond Lahoul (à droite en t-shirt rouge) en photoreportage sur le terrain. © DR