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LE MAG’

Des cacahuètes pour la planète

28 Fév. 2024

© Radu Marcusu / Unsplash

Chauffer à la cacahuète plutôt qu’au bois ? Cela ressemble à une blague, mais c’est pourtant le défi que Yaakaar Environnement a décidé de relever. En confectionnant des briquettes de coques d’arachides, cette entreprise sénégalaise propose une alternative au bois et au charbon et contribue à réduire la déforestation. Shabbaz Noc, envoyée sur place par l’association Initiative Développement, est la première volontaire déployée dans le cadre du programme des Volontaires pour la Grande Muraille verte, qui soutient cette initiative.

À environ deux-cents kilomètres à l’est de Dakar, dans les terres, s’étend le Bassin arachidier du Sénégal : une vaste zone agricole où la petite légumineuse est reine. Au milieu des paysages arborés, on y cultive l’arachide depuis les années 1960. Si cette production a longtemps été au cœur du projet agricole du pays, la production d’arachide fait l’objet d’une diversification plus récente. Mieux : celle-ci est aujourd’hui valorisée d’une toute autre manière. Dans le village de Ndem, on transforme ainsi les coques de la graine en briquettes. Objectif : remplacer le bois et le charbon comme combustibles !

L'arachide, un produit innovant

Au Sénégal, ces deux matériaux restent les principales sources d’énergie pour la cuisson des aliments, ce qui conduit à une déforestation grandissante. Couteux, ils constituent par ailleurs une charge financière importante pour les ménages, tandis que leurs fumées, toxiques, présentent un risque important en termes de santé publique. Une triple problématique à laquelle entendent répondre ces fameuses briquettes de coques d’arachides.

Lancé il y a presque dix ans maintenant en 2014, le projet Yaakaar (« espoir » en wolof) a d‘abord été imaginé par l’ONG des Villageois de Ndem, une bourgade située à quelques encablures de la ville de Touba. Soutenus par l’association poitevine Initiative Développement (ID), la Région Nouvelle-Aquitaine et l’Agence française de développement (AFD), ils développent ce biocombustible en réutilisant les déchets de l’exploitation de la cacahuète pour les mélanger avec de l’argile.

Au fil du temps, la technologie a évolué et les briquettes sont finalement confectionnées à 100% avec de l’arachide. « Le projet est perçu comme quelque chose d’innovant car nous sommes pour le moment la seule unité de production de ce type dans toute l’Afrique de l’Ouest ! », explique Shabbaz Noc. En volontariat de solidarité internationale (VSI) depuis le mois de septembre, elle a été envoyée sur place par l’association ID, et fait partie des premiers volontaires déployés dans la région dans le cadre du programme Grande Muraille verte (V-GMV), qui doit permettre de lutter contre la déforestation. « Le processus de fabrication ainsi que le produit final intriguent les industriels et les organisations scientifiques par son efficacité. », ajoute-t-elle.

L’unité de production de briquettes d’arachides à Ndem (Sénégal)

Un carburant moins toxique et moins cher

Le pouvoir calorifique de ces briquettes est équivalent à celui du bois, tandis que la combustion génère moins de fumées. Le tout pour un coût inférieur de 25%. Avec un potentiel de production annuelle de plus de 1100 tonnes de briquettes, l’unité de fabrication de Ndem peut fournir dans toute la région aux particuliers mais aussi aux professionnels comme les boulangers, les entreprises qui transforment les céréales ou les « dibiteries », ces rôtisseries où l’on fait griller de la viande. 

Avec le succès de cette activité, l’ONG des villageois de Ndem a passé la main : l’activité est désormais gérée par la société Yaakaar Environnement, lancée le 23 novembre 2023, qui doit pérenniser la commercialisation des briquettes. À très court terme, l’entreprise entend recruter sept à huit personnes pour assurer son autonomie. Et peut également compter sur des volontaires motivés comme Shabbaz : « La gestion des ressources naturelles et la résilience climatique sont des thématiques qui me sont chères. Je souhaitais évoluer dans ce domaine que je trouve particulièrement pertinent parce qu’il se trouve à la croisée de la préservation des écosystèmes et du développement local », conclut-elle.

Le programme Volontaires pour la Grande muraille verte

Shabaaz Noc est l’une des deux premières personnes envoyées sur le terrain en tant que volontaires dans le cadre du programme Volontaires pour la Grande muraille verte. Lancée il y a quatorze ans, la Grande Muraille verte est un projet panafricain dans plusieurs pays du Sahel, de l’Afrique du Nord et de la Corne de l’Afrique dont le but est de lutter contre la désertification et le changement climatique. Projet avant tout forestier à l’origine, l’approche est désormais plus globale, intégrant le territoire et ses composantes environnementales, sociales et économiques. L’appel à manifestation d’intérêt (AMI) lancé en début d’année 2023 par France Volontaires a permis de retenir 62 projets portés par 43 structures. Au total, 71 volontaires, tous dispositifs confondus, seront envoyés sur place dans le cadre de ce programme.

© Vince Gx / Unspash

Bio express

Shabbaz Noc, 25 ans est en volontariat de solidarité internationale (VSI) depuis le 18 septembre 2023 à Mbour au Sénégal. Après des études de sciences politiques puis de relations internationales (master 2 Relations internationales et Action à l'étranger à l’université Paris 1), elle a occupé un premier poste dans la gestion de projets de reforestation et de développement économique au sein de l'ONG Planète Urgence. Dans le cadre de sa mission chez Initiative Développement (ONG française de solidarité internationale basée à Poitiers), elle partage son temps entre des journées au bureau de la direction d'ID et d'autres sur le terrain, pour des séances de travail in situ sur le projet Yaakaar.
Shabbaz Noc
Volontaire chez Initiative Développement

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